LES 7 ET 8 DÉCEMBRE 2006, des experts en cardiologie ont été conviés par la FDA à une réunion visant à faire le point sur les complications de l’implantation des stents enrobés. Ils s’intéressaient en particulier au risque de thrombose intrastent qui pourrait être majoré avec les dipositifs de nouvelle génération par rapport aux stents métalliques. Le « New England Journal of Medicine » présente les cinq nouvelles études que les experts ont analysées, ainsi qu’un éditorial et deux articles qui permettent d’éclairer les lecteurs sur la teneur des débats.
L’histoire des stents enrobés a commencé par des travaux fondamentaux sur les mécanismes de croissance néo-intimale après la réalisation d’une angioplastie ou la mise en place d’un stent. Les résultats de ces études ont conduit à la fabrication de stents délivrant, après leur implantation dans la lumière coronarienne, des médicaments tels que le paclitaxel ou le sirolimus qui inhibent la croissance néo-intimale. En 2003, les résultats d’études très encourageantes, incluant plus de 1 000 patients, prouvaient un moindre taux de sténose intrastent ou de geste de revascularisation après neuf mois. La FDA approuvait la commercialisation des deux stents. Les indications mentionnées étaient très précises : lésion coronarienne denovo, de 28 à 30 mm de long, chez des patients stables cliniquement et sans pathologie grave surajoutée.
Dans deux tiers des cas, implantés hors indications.
Dans les mois qui ont suivi l’approbation par la FDA, des cas de thrombose subaiguë de stent ont été signalés chez les patients ayant reçu l’un des deux stents. En dépit de ces notifications, la part d’implantation des stents enrobés s’est accrue de façon très rapide puisque, en moins de deux ans, ils ont gagné 80 % du marché aux Etats-Unis. Il faut dire aussi que, dans deux tiers des cas, ils étaient implantés hors des indications retenues par les autorités de santé.
En mars 2006, une étude (BASKET-LATE) a suggéré que, entre le 7e et le 18e mois après l’implantation, le taux d’infarctus du myocarde non fatal, de décès d’origine cardio-vasculaire ou de thrombose intrastent documentée par angiographie était plus élevé chez les sujets ayant reçu un stent enrobé par rapport aux sujets contrôles.
En septembre 2006, deux nouvelles études contradictoires ont été publiées ainsi que deux métaanalyses. C’est devant l’ensemble de ces données que la réunion d’experts a été organisée en décembre 2006 à l’initiative de la FDA. Les cardiologues avaient aussi pour mission de se prononcer sur la durée optimale de traitement par bithérapie antithrombotique (clopidogrel et aspirine) qui ne faisait pas l’objet de consensus thérapeutique. A cette question, les experts ont tranché en recommandant une durée de traitement de douze mois.
Pour se prononcer sur les risques de thrombose, les experts ont pu s’appuyer sur trois nouvelles études. La première, coordonnée par le Dr Christian Spaulding (hôpital Cochin, Paris) conclut, par l’analyse poolée de 1 748 patients qui ont participé à quatre essais cliniques comparant les stents métalliques et ceux délivrant du sirolimus, qu’il n’existait pas de différence de mortalité à quatre ans entre les deux groupes. La deuxième, à laquelle participait le Dr Marie-Claude Morice (institut Jaques-Cartier, Massy) prenait en compte ces mêmes 1 748 patients et 3 513 autres qui avaient reçu après randomisation soit un stent métallique, soit un stent au paclitaxel. Les auteurs précisent que l’incidence des thromboses est plus importante chez les patients traités par stent enrobé que chez ceux qui avaient reçu un stent métallique, mais que l’utilisation de ces nouveaux matériaux s’associait à un risque moindre de revascularisation. Ils concluent en signalant que le taux de mortalité et d’infarctus du myocarde était similaire dans les différents groupes. La troisième étude coordonnée par le Dr Laura Mauri (Harvard) et qui prenait en compte 878 patients traités par stent au sirolimus, 1 400 par stent au paclitaxel et 2 267 par stent métallique, concluait à l’absence de majoration du risque de thrombose lors de l’utilisation de stents actifs. Les auteurs ajoutaient néanmoins que l’étude n’incluait pas assez de patients pour pouvoir permettre de conclure formellement. En analysant ces nouvelles données, les experts de la FDA ont souligné l’importance de la mise en place de critères précis et actualisés d’appréciation des thromboses intrastent. Ils ont aussi précisé que l’incidence des thromboses ne devait pas être calculée de manière unique mais qu’il fallait aussi prendre en compte les caractéristiques du patient et de ses lésions puisque plus de 60 % des implantations ont lieu en dehors des indications retenues par la FDA. Dans ces conditions, la FDA insiste sur la nécessité de n’utiliser les stents enrobés que dans les indications actuellement reconnues et de mettre en place des études spécifiques pour toutes les autres indications.
« New England Journal of Medicine », édition avancée en ligne.
Le risque s’élève à trois ans
Une étude chez un grand nombre de patients indique une augmentation du risque de décès avec les stents qui délivrent des principes actifs comparativement aux stents simples. Au terme de son travail, le groupe suédois du Scaar (Swedish Coronary Angiography and Angioplasty Registry) appelle à la réalisation de grandes études randomisées pour s’assurer de la sécurité des stents actifs.
Au vu des récentes publications alertant sur l’éventualité d’un accroissement du risque de thrombose du stent à long terme avec les stents actifs, Bo Lagerqvist et coll. (Uppsala) ont évalué 6 033 patients consécutifs et les ont comparés à 13 738 patients traités par des stents en métal nu. L’analyse des résultats a couvert une période allant jusqu’à trios ans, pendant laquelle 1 424 décès et 2 463 infarctus du myocarde sont survenus.
A six mois, on observe une tendance vers une réduction du taux de ces événements dans le groupe des patients aux stents actifs : 13,4 événements en moins pour 100 patients. Mais, passé ce délai, la tendance s’inverse et le taux des événements s’élève chez les patients ayant un stent actif, avec 12,7 événements supplémentaires pour 1 000 patients par année, ce qui donne de 0,5 à 1 % de risque supplémentaire par année pour le critère composite des décès et des infarctus du myocarde. Ainsi, à trois ans, le taux de mortalité est significativement plus élevé chez les patients aux stents actifs : RR de 1,18.
« New England Journal of Medicine », 356 ; 10, 8 mars 2007, pp. 1009-1019.
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