Les plus récents travaux ont suggéré une activité pléiotrope des statines : anti-inflammatoire, antioxydante, modulation de l’immunité cellulaire, amélioration de la fonction endothéliale, voire augmentation de la biodisponibilité du NO. Toutes ces propriétés, indépendantes de l’hypolipémie, sont susceptibles de contribuer aux améliorations enregistrées en cardiologie.
Les affections cardio-vasculaires graves sont associées à une augmentation du risque de sepsis, état infectieux aggravé, défini comme une réponse systémique inflammatoire à la présence d’une infection, accompagné par une défaillance d’organes (cardiaque, pulmonaire, rénale) et une hypotension. La prévention du sepsis est importante car il est coûteux en vies et en moyens.
Une analyse de population.
Hackam et coll. se sont livrés à une analyse de population (en se servant de données administratives de l’Ontario, Canada) entre 1997 et 2002. Ils ont identifié 141 487 patients hospitalisés pour une maladie cardio-vasculaire en relation avec une athérosclérose : syndrome coronaire aigu, AVC ischémique ou procédure de revascularisation. Les patients devaient avoir survécu un minimum de trois mois après la sortie de l’hôpital.
Deux groupes ont été identifiés : 46 662 (33 %) ont eu une statine contre 94 825 (67 %). Ce qui a permis de former deux groupes comparables et d’égale importance de 34 584 patients chacun, l’un ayant été sous statines et l’autre non.
Les auteurs observent que l’usage des statines chez les patients de plus de 65 ans est associé à une réduction de 19 % du risque de sepsis. Au terme d’un suivi de cinq ans, on compte 551 patients qui ont été admis à l’hôpital pour sepsis dans le groupe statine contre 667 dans le groupe contrôle. Les résultats font apparaître une réduction de tous les stades de gravité des sepsis, jusqu’aux états sévères et fatals.
«L’association apparemment protectrice entre les statines et le sepsis est constante parmi les sous-groupes des patients à haut risque (diabète, insuffisance cardiaque) et s’est manifestée pendant toute la durée du suivi.» Elle a été amplifiée par les analyses prenant en compte l’adhésion incomplète au traitement.
L’athérosclérose et le sepsis partagent des caractères physiopathologiques : une altération de la régulation immunitaire, une augmentation de la thrombogenèse et la présence d’une inflammation systémique. La relation entre les statines et le risque d’infection, qui commence tout juste à être explorée, pourrait s’expliquer par ces similitudes. Un commentateur fait remarquer : «Parmi les nombreuses approches cliniques et expérimentales entreprises pour infléchir la courbe de prévalence des sepsis, la protéineC activée et l’hydrocortisone à faible dose représentent actuellement les seules approches ayant donné un résultat tangible chez des patients souffrant d’un sepsis sévère. Si l’important effet des statines sur l’inflammation se confirme, cette classe thérapeutique pourrait constituer un atout supplémentaire de poids.»
Il existe des études chez l’animal et des rapports observationnels qui appuient cette notion. Comme une étude prospective de cohorte chez 361 patients souffrant d’infection bactérienne aiguë, chez qui un traitement par statines a été associé à une réduction substantielle des sepsis sévères et des admissions en soins intensifs, sans détecter de différences sur la mortalité.
Il existe une limite de taille à l’étude présentée par Hackam et coll. : c’est sa forme observationnelle qui ne permet pas d’exclure l’intervention de facteurs confondants sur les résultats. Les auteurs préconisent de mettre en place des études randomisées pour tester l’effet des statines dans la prévention du sepsis et aussi pour identifier les profils de patients à risque de sepsis.
« The Lancet », 25 janvier 2006.
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