APRÈS AVOIR MAL VÉCU leur mise à l'écart lors de la concertation des états généraux de l'organisation de la santé (EGOS), les spécialistes libéraux redoutent que les réformes en préparation aboutissentà leur «marginalisation» dans l'offre de soins en France . Qu'il s'agisse du sort des disciplines cliniques ou des plateaux techniques de proximité, l'UMESPE, branche spécialiste de la CSMF, monte au front.
Valoriser la place du spécialiste autour des patients chroniques
Sans spécialiste libéral correspondant ou consultant, le parcours de soins devient «squelettique et coûteux avec des hospitalisations inutiles», explique le Dr Jean-François Rey, président de l'UMESPE . Une pierre dans le jardin de ceux qui défendent une filière directe du généraliste gate-keeper à l'hôpital, schéma qui ferait l'impasse sur le tissu de la médecine spécialisée libérale. Pour l'UMESPE, il convient au contraire de valoriser par tous les moyens le rôle des spécialités cliniques et les plateaux techniques de proximité. «La réforme de l'organisation des soins doit privilégier les mécanismes de régulation professionnelle et non pas se traduire par une régulation administrée et bureaucratique.» En clair, l'UMESPE refuse que la future loi Santé aboutisse à une mise sous tutelle étatique de la médecine spécialisée (via les agences régionales de santé, la DHOS…) qui conduirait à sa lente agonie, à des «files d'attente» et à une baisse de la qualité des soins. L'UMESPE propose de renforcer notamment la place des spécialistes libéraux dans le cadre de la prise en charge des patients chroniques. «On revendique un rôle majeur, on pourrait faire beaucoup mieux qu'aujourd'hui», juge le Dr Rey pour qui le spécialiste doit être le «monsieur plus» de la réforme. L'UMESPE se dit ouverte à des paiements forfaitaires complémentaires de la rémunération à l'acte dans le cadre de la prise en charge des patients chroniques ou pour inciter à des pratiques plus coopératives.
Négociations: des consultations lourdes pour les cliniciens
Au bas de l'échelle des revenus, les spécialités cliniques, souvent pénalisées par le dispositif du médecin traitant (activité principale en CS), doivent être au coeur des prochaines négociations conventionnelles, réclame l'UMESPE. Le directeur de l'assurance-maladie est également partisan d'un «rééquilibrage». Reste à savoir quelle sera sa marge de manoeuvre financière. L'idée qui fait son chemin serait de négocier des mesures spécifiques de rattrapage pour les pédiatres, les psychiatres, les endocrinologues et les neurologues. L'UMESPE consulte en ce moment ses « verticalités » pour connaître exactement leurs attentes. Selon nos informations, la revalorisation devrait prendre la forme de consultations lourdes ciblées.
Concernant cette fois les spécialités techniques, l'UMESPE refuse que la troisième et dernière étape de la nouvelle nomenclature des actes techniques (CCAM) se fasse «au rabais». «Il faut un investissement négocié dans le cadre conventionnel», souligne le Dr Rey. En clair, pas question d'atteindre les nouveaux tarifs CCAM sans éclaircissement préalable du «coût de la pratique» des spécialistes et sans «valorisation du point travail». Mais les moyens sont limités. Pour le Dr Rey, il serait plus raisonnable d'attendre 2010 pour franchir la dernière étape de CCAM.
L'UMESPE prévient, par ailleurs, que la CSMF refusera de signer un avenant conventionnel prévoyant des baisses «comptables» de tarifs de certaines spécialités qui seraient exigées par le gouvernement dans un éventuel plan d'économies. L'an passé, les radiologues étaient dans la ligne de mire et de longues tractations avaient abouti à un accord «acceptable» par la profession prévoyant des décotes de certains actes d'imagerie. «Cette fois, c'est niet,prévient le Dr Rey. Sinon ce sera le retour des coordinations.»
En revanche, il plaide pour la mise en place de nouveaux accords de bon usage des soins (ACBUS) ou de bonnes pratiques qui pourraient, selon lui, procurer des économies considérables. Et d'ajouter que la CNAM dispose désormais de tous les instruments précis de codage et de suivi (CCAM technique, informatique) pour contrôler les dépenses et les pratiques médicales, acte par acte, praticien par praticien.
Dépassements: le secteur optionnel, seule voie possible
L'UMESPE s'indigne des attaques «démagogiques et injustifiées» concernant les dépassements d'honoraires des spécialistes. S'il ne conteste pas certains abus «très minoritaires», le Dr Rey estime que la seule solution pérenne est celle du secteur optionnel (avec dépassements encadrés solvabilisés). Une réunion est programmée mardi prochain avec les complémentaires santé. Mais le temps presse. Si le secteur optionnel ne fait pas l'objet d'un accord «au 31juillet», met en garde le Dr Rey, le gouvernement prendra des mesures de restriction du secteur II.
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