POURQUOI avoir décidé de créer une banque publique de souris knock-out ? La raison est simple. Au-delà de l’avantage, pour les chercheurs, de travailler sur des échantillons standardisés, ce qui permet une comparaison fiable de leurs travaux respectifs, on sait que les souris constituent un modèle particulièrement intéressant pour l’étude de la biologie et des maladies humaines. Comme l’Homme, ces animaux sont des mammifères et 99 % de leurs gènes ont des homologues chez les humains. Or plusieurs milliers de maladies humaines ont un déterminant génétique. Enfin, la petite taille des souris ainsi que leur reproduction facile leur confèrent un avantage appréciable pour la recherche en laboratoire.
C’est à la fin des années 1980 que la technique du knock-out a été développée. Fondée sur la recombinaison homologue, elle consiste à supprimer ou à inactiver un gène dans les cellules souches embryonnaires. Celles-ci servent ensuite à la création d’une lignée de souris homozygotes pour le gène concerné. Il s’agit d’une insertion ciblée, contrairement aux souris transgéniques qui sont obtenues par un transfert d’un gène d’une autre espèce.
En 2003.
Le concept du Komp* a été développé il y a trois ans à l’occasion d’une discussion lors d’une réunion de travail internationale à New York. Dans leur compte rendu, publié en septembre 2004 dans « Nature Genetics » sur ce projet de création d’une banque de souris K.-O., la quarantaine de chercheurs américains impliqués soulignaient que, «malgré les efforts, le nombre total de souris K.-O. décrites dans la littérature est relativement modeste, ce qui correspond à seulement 10% des 25000gènes de la souris». On trouvait alors dans les différentes bases de données existantes 2 669 gènes uniques pour la Mouse Knockout & Mutation Database, 2 847 pour la Mouse Genome Database et 2 492 identifiés (mais non publiés) par la compagnie biopharmaceutique Lexicon Genetics. Cependant, précisaient les signataires, la plupart de ces souris K.-O. n’étaient pas facilement disponibles. La mise en place du projet Komp devrait permettre de résoudre ces difficultés. Selon eux, «la majorité des gènes de souris pourraient être invalidés dans les cellules souches embryonnaires dans les cinq ans». C’est justement sur cette durée que le NIH a décidé de financer le projet.
Le Komp compte aujourd’hui sept partenaires. Ses chercheurs ne travailleront pas de façon isolée. Une collaboration va, en effet, être établie avec des partenaires européens et canadiens dans le cadre de l’European Conditional Mouse Mutagenesis Program, financé par l’Union européenne, et du North American Conditional Mouse Mutagenesis Project, soutenu par Génome prairie et financé par Génome Canada. L’objectif de tous ces projets est de créer des mutations dans environ 20 000 gènes de souris, soit environ 70 % de son génome. Bien entendu, toutes les souris K.-O. seront gracieusement mises à la disposition de l’ensemble des chercheurs.
Applications.
La liste des souris K.-O. actuellement disponibles est en ligne sur le site du NIH**. Ces modèles ont déjà été utilisés pour des travaux sur différentes maladies, dont certaines fréquentes et en augmentation. Parmi celles-ci, on peut citer une étude sur la souris K.-O. pour l’ApoE qui a montré que l’épaisseur intima-média peut être mesurée par IRM de contraste lors de l’injection de liposomes paramagnétiques (Magn Reson Med, 2006). Des souris K.-O. pour l’ApoE ont également été utilisées pour évaluer l’action des polyphénols du vin rouge dans l’athérogenèse (« Br J Nutr », 2006). Des travaux sur des souris K.-O. pour les récepteurs CB1 des cannabinoïdes ont ouvert une piste de recherche thérapeutique dans l’ostéoporose (« Nature Medicine », 2005). Il en est de même pour l’obésité avec la mise au point de souris K.-O. pour la SHIP2 (SH2 Domain Containing Inositol 5-Phosphatase 2), une enzyme impliquée dans le métabolisme insulinique (« Nature Medicine », 2005).
* www.nih.gov/science/models/mouse/ knockout.
** www.nih.gov/science/models/mouse/deltagenlexicon/list.html.
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