U NE étude interne de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), qui doit être examinée en fin de semaine par les instances dirigeantes du syndicat, propose des solutions pour la retraite. Dans cette étude, élaborée par un groupe de travail coordonné par le Dr Yves Decalf, les auteurs affirment en préambule qu'ils proposent « les voies qui semblent les plus adaptées et acceptables par toutes les parties, reposant prioritairement sur l'effort de tous, sans attendre une solution venant de nulle part ailleurs avec, comme préoccupation, la faisabilité ».
« Dans l'urgence de la situation actuelle, il s'agit, selon les auteurs de l'étude, derespecter les engagements passés, d'apurer le passif suivant le degré de responsabilité de chacun, gouvernement, caisses, retraités et actifs, et de construire une nouvelle retraite pérenne, de façon à ce que les entrants soient assurés de leur retraite. »
A la question « Faut-il supprimer l'allocation supplémentaire de vieillesse (ASV), voire le régime complémentaire de vieillesse (RCV) ? », l'étude Decalf répond par la négative. Elle conclut « à la nécessité de maintenir une obligation de cotiser, afin de pallier l'insouciance d'un certain nombre de nos confrères et de permettre à chacun de faire face aux aléas de la vie, tout en préservant leur retraite ».
Selon la CSMF, la solution réside donc dans le maintien des trois étages de la retraite des médecins, à savoir le régime de base (environ 18 % de la retraite totale en 2000), le RCV (43 %) et le régime ASV (39 %). Mais, s'inspirant d'une piste proposée par le Dr Gérard Maudrux, président de la CARMF (« le Quotidien » du 26 mars), l'étude Decalf suggère d' « intégrer progressivement » dans l'ASV l'allocation de remplacement versée aux préretraités (dans le cadre du mécanisme d'incitation à la cessation d'activité ou MICA, qui prend fin normalement en 2008).
Le problème des médecins du secteur II
La valeur du point du régime ASV diminuerait alors progressivement sur huit ans, de 102 francs aujourd'hui à 80 francs, ce qui entraînerait une réduction de 21,5 % de la retraite versée. Dans le même temps, les cotisations augmenteraient en incluant la cotisation à la préretraite, égale actuellement à 2,048 % du revenu conventionnel net (0,64 % pour les médecins, plus 1,408 % à la charge des caisses d'assurance-maladie).
Les médecins généralistes du secteur I, qui acquittent le tiers de la cotisation totale, verraient leur cotisation passer de 60C (6 900 F) à 99C (11 385 F), les caisses d'assurance-maladie payant 198C au lieu de 120C aujourd'hui. En secteur II, leur cotisation passerait de 180C (20 700 F) à 60C. Puis elle augmenterait progressivement jusqu'à 99C sur huit ans.
En revanche, à cotisation égale, les médecins de secteur II obtiendraient alors trois fois moins de points que les médecins de secteur I (9 au lieu de 27).
En ce qui concerne le régime complémentaire vieillesse, l'étude de la CSMF préconise une « hausse de cotisation de 1 point dès 2002, soit un taux augmentant de 9 % à 10 %, puis de 1 point étalé progressivement sur sept ans pour arriver à une cotisation de 11 % en 2009, qui pourrait être réduite si les résultats du régime s'avéraient plus favorables ».
Ainsi, la hausse de cotisation devrait permettre le « maintien de la prestation retraite au niveau actuel ». Cette proposition de la CSMF est assez singulière, sachant que les élections à la CARMF ont montré en 2000 un large mouvement en faveur du gel de la cotisation au régime complémentaire.
Enfin, pour le régime de base, l'étude Decalf juge « indispensable de supprimer la compensation nationale avec les autres régimes qui coûte 7 900 francs par an à chaque médecin ». La CSMF estime en l'occurrence que « c'est à l'Etat d'assumer cette compensation ».
Au total, les mesures proposées visent à maintenir un taux de remplacement minimal d'environ 45 % du revenu d'activité ( « autour de 14 000 francs par mois pour un revenu annuel moyen de 360 000 francs ») et une « cotisation tolérable » de « moins de 20 % de prélèvement sur le revenu ». Ce niveau de retraite est « véritablement le minimum », estiment les auteurs de l'étude, « les médecins ne pouvant plus compter sur la cession de leur clientèle, de plus en plus aléatoire ».
Dr Gérard Maudrux(CARMF) : des propositions qui vont avancer les choses
LE QUOTIDIEN - L'étude réalisée par le groupe de travail « Retraite » de la CSMF reprend l'idée d'une fusion du régime ASV avec le régime des préretraites des médecins libéraux, à peu près dans les conditions que vous envisagiez fin mars.
Dr Gérard MAUDRUX - Si on veut le maintien du régime ASV, il n'y a pas trente-six autres solutions. On avait un petit peu travaillé avec la CSMF, au départ. Quand il y a dans les syndicats des gens compétents qui sont capables de réfléchir, cela fait un peu avancer les choses.
Mais vous semblez aujourd'hui beaucoup moins tenté par l'idée de pérenniser l'ASV en faisant bénéficier ce régime du financement actuel de la préretraite.
Oui, parce que depuis, au conseil d'administration et au niveau de la base, j'ai eu des réflexions de gens qui me reprochaient de ne plus privilégier la solution de l'arrêt de l'ASV. Moi, je ne privilégie aucune solution, même si, pour moi, la meilleure solution est l'arrêt de l'ASV, car c'est la moins chère pour tout le monde. A cause du tiers payant (les caisses d'assurance-maladie, NDLR) , il y a trop d'inconnues dans la poursuite du système. Mais j'ai très honnêtement recherché une solution de remplacement et c'est la base qui décidera.
L'étude de la CSMF propose que la cotisation au régime complémentaire augmente de 1 point dès 2002. Qu'en pensez-vous ?
Cela dépend de ce qu'on en fait. Si l'augmentation de la cotisation sert à améliorer la retraite de demain, je ne suis pas contre le principe. Si c'est pour distribuer ce point supplémentaire aux retraités qui ont déjà bénéficié de bons rendements, je suis contre.
Cela dépend aussi de ce qu'on fait avec l'ASV. Si l'on est déchargé de la cotisation à l'ASV en ne gardant que deux régimes (régime de base et régime complémentaire, NDLR) , je veux bien augmenter la cotisation du régime complémentaire. Je l'ai déjà dit aux retraités d'ailleurs.
ASV : le référendum à la fin de l'année
Qu'attendez-vous de l'assemblée générale de la CARMF, le 24 juin, en ce qui concerne l'avenir du régime de l'allocation supplémentaire de vieillesse (ASV) ?
Recueillir l'opinion des gens. L'assemblée générale est là pour donner des orientations, mais c'est la base qui décidera.
On ne sait pas encore quelles questions poser si l'on fait un référendum, donc on va commencer par tester certaines questions auprès de l'assemblée générale. Le référendum idéal, c'est une réponse par oui ou par non. Mais l'avenir du régime ASV, c'est un peu plus compliqué que cela. Est-ce que je dois faire un référendum avec trois questions ? Mais à ce moment-là, le résultat est difficilement interprétable. Est-ce qu'on peut poser deux questions, avec deux options possibles à partir des réponses à la première question ?
Le principe d'un référendum sur l'ASV cette année est donc acquis ?
Oui, tout à fait. Il aura lieu sans doute en novembre-décembre.
Cela dit, pour que la base décide, il faut qu'elle soit bien informée et qu'elle ait compris les problèmes. En réunion, les gens me disent souvent « On ne comprend rien. » Par conséquent, ce n'est pas encore mûr. Je sais bien que les gens me font confiance, parce que j'ai raison, même ceux qui n'ont rien compris, mais je préférerais qu'ils comprennent d'abord. C'est pourquoi nous allons continuer le travail d'information, d'explication, consulter aussi les syndicats.
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