LA FRANCE s'apprête à renforcer sa ligne de soins de premier recours à travers le projet de loi Patients, santé et territoires, mais la Grande-Bretagne l'a largement devancée sur ce terrain, comme le rappelle une étude de la Caisse nationale d'assurance-maladie qui vient de paraître*.
Cette étude souligne que les soins primaires, «pierre angulaire du système de santé britannique», ont déjà fait l'objet de «multiples réformes depuis une quinzaine d'années». Au début des années 1990, les médecins généralistes anglais jouaient un rôle de gestionnaire de budget (fundholders) dans un système de filière de soins (rôle de gatekeepers). Après l'arrivée au pouvoir des Travaillistes en 1997, les budgets ont été confiés à des groupes de soins primaires (Primary care groups, puis Primary care trusts ou PCT). Aujourd'hui, 152 PCT anglais, organisés sur la base d'un maillage territorial, sont responsables de l'ensemble des soins de première ligne pour une population donnée (330 000 habitants en moyenne). Les PCT gèrent «plus de 80% des dépenses totales du NHS» (National Health Service). Ils chapeautent chacun environ 50 cabinets de médecine générale en moyenne, passent des contrats avec d'autres professionnels indépendants, emploient directement du personnel soignant (infirmiers à domicile, kinés salariés…), et « achètent » des soins hospitaliers aux NHS Trusts pour la population couverte.
Nouvelle convention.
Placés au-dessus des 152 PCT et des 290 NHS Trusts, 10 autorités stratégiques de santé sont chargées de décliner au niveau régional des objectifs généraux fixés par le ministère anglais de la Santé au niveau national.
Sur les 33 091 médecins généralistes recensés en 2006, 79 % exercent en cabinet de groupe. L'étude de la CNAM observe «une tendance récente à l'augmentation des grands cabinets parmi les 8325 du pays: la proportion de cabinets comprenant cinq médecins ou plus est passée de 26% en 2003 à 36% en 2006». Grâce aux facilités de remplacement, «26,7% des généralistes anglais exercent à temps partiel». Chaque généraliste dispose en moyenne de 2,2 personnes en équivalent temps-plein pour les activités administratives et paramédicales.
Le nouveau contrat General Medical Services a été conclu en 2004 entre le NHS et les cabinets de groupe (et non les généralistes eux-mêmes). Cette nouvelle convention, qui implique les deux tiers des généralistes anglais (un tiers étant sous contrat particulier avec un PCT), incite au regroupement et à la délégation des tâches. Elle fixe aussi trois niveaux de services aux cabinets : les consultations (essential services), les services additionnels optionnels (vaccinations, suivi de la contraception, frottis vaginal…), les services avancés facultatifs (enhanced services) portant sur la prévention, le suivi, les aspects de qualité de service (horaires, délais de rendez-vous…) et, enfin, l'adressage vers un choix de médecins spécialistes. L'étude de la CNAM souligne que le gouvernement britannique mise actuellement sur le développement des services avancés pour «intégrer dans la médecine de ville certains soins habituellement dispensés en milieu hospitalier», avec souvent de longues listes d'attente à la clé.
Le contrat de 2004 a instauré un paiement des praticiens aux résultats (Quality and Outcomes framework) en fonction de 135 indicateurs, en plus de la rémunération à la capitation, laquelle tient compte des deux premiers types de services et des populations spécifiques. Ces indicateurs portent sur la qualité des soins (80 indicateurs), l'organisation des cabinets (43 items), l'attention au patient (4) et les services additionnels (8). La rémunération à la performance «représente aujourd'hui entre 20 et 30% du revenu total du praticien».
L'étude se garde de dresser un bilan des réformes anglaises car «la multiplicité et le rythme des changements apportés au système rendent leur évaluation globale difficile».
* Points de repère n° 17, « Les réformes dans l'organisation des soins primaires en Angleterre ».
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