C’EST PRESQUE un événement : avec un mois de retard, l’arrêté d’approbation des avenants n° 14 (visite) et n° 15 (stomatologie) a été publié au « Journal officiel » du 7 novembre. La parution de ces textes était attendue depuis que la Cnam (Caisse nationale d’assurance-maladie) avait déclaré irrecevable – hors délai – le droit d’opposition formulé par MG-France, la FMF, Espace Généraliste et l’Uccmsf, et transmis ces deux avenants au gouvernement pour signature (« le Quotidien » du 30 octobre et du 6 novembre). L’avenant 14 porte la valeur de la lettre clé V des médecins généralistes à 21 euros (soit une rémunération de 31 euros pour une visite justifiée V + MD) et revalorise la lettre clé VS des spécialistes à 23 euros. Cet alignement du tarif de la visite sur celui de la consultation (qui aurait dû s’appliquer dès le 15 octobre) s’accompagne d’un «engagement de maîtrise médicalisée» visant à réduire le nombre de visites injustifiées : les partenaires se fixent comme objectif national «un taux de visites de 10% en 2008» contre 14 % en 2005 (rapport entre le nombre de visites – V – et le total des visites et consultations – C + V).
Cet objectif est réparti entre les régions. Quant à l’avenant n° 15, il précise la place de la stomatologie dans le parcours coordonné – en inscrivant certains soins bucco-dentaires dans le champ de l’accès direct spécifique – et prévoit un alignement de plusieurs tarifs sur ceux des chirurgiens-dentistes.
Les « pro » et « anti » convention ont aussitôt réagi à la publication de ces textes, alimentant la longue chronique syndicale sur le droit d’opposition. Sur le fond, les signataires estiment qu’ils ont emporté une bataille et que cette affaire a plutôt affaibli les adversaires de la convention. La Csmf «se réjouit» de la parution des avenants et souligne que la revalorisation de la visite permettra aux médecins généralistes de «disposer en moyenne de 800euros d’honoraires supplémentaires par an». La Confédération veut croire que les médecins «sauront se souvenir de la tentative de blocage des tarifs engagée contre nature par le “cartel du non”». Le SML voit dans la publication de ces avenants «importants»«un essai à transformer»; il stigmatise, lui aussi, les «manoeuvres procédurières» qui ont conduit les opposants à vouloir «bloquer deux textes allant dans le sens de l’intérêt commun des médecins et des patients».
MG-France : une « provocation ».
Cet épisode n’entame pas la détermination des opposants qui mettent en avant leur «légitimité majoritaire» gagnée dans les urnes (54,6 % des suffrages aux élections aux Urml) pour obtenir une révision globale de la convention. Ils se réuniront dès aujourd’hui pour décider des modalités intersyndicales de leur riposte. Première salve : comme la FMF et MG-France l’ont laissé entendre, les anticonvention devraient déposer très rapidement un recours concerté en Conseil d’Etat contre l’analyse de la Cnam qui juge irrecevable l’opposition aux avenants 14 et 15. Le Conseil d’Etat devra arbitrer le litige sur les délais (les opposants font valoir que la Cnam leur a transmis très tardivement les avenants signés), mais aussi sur le principe retenu par la caisse d’un droit d’opposition «par collège»,donc séparé,bien que la convention médicale soit unique.
Sans attendre l’issue judiciaire, les opposants placent l’affaire sur le terrain politique. MG-France dénonce «le choix partisan» du gouvernement de valider des avenants négociés par des syndicats «minoritaires». Pour le président du syndicat, Pierre Costes, cette décision constitue même une «provocation délibérée». MG-France, qui réunira son assemblée générale les 9 et 10 décembre, se réserve la possibilité de recourir à d’autres moyens d’action et de pression «si le gouvernement continue de balayer plus de 28000 voix» (addition du nombre de suffrages recueillis par la FMF, MG, EG et l’Uccmsf).
Tout aussi combatif, Jean-Claude Régi, président de la FMF, entend «aller au bout de la logique» qui a conduit les opposants à faire barrage aux avenants 14 et 15. «A quoi ont servi les élections aux Urml si rien ne change», fulmine le Dr Régi, qui dénonce le scrutin «trompe-couillon» des Urml et la «contorsion juridique» des pouvoirs publics pour valider des avenants «qui ne respectent pas le principe démocratique».
Reste une question de stratégie : en attendant la clarification sur le droit d’opposition, les « anti » peuvent-ils faire barrage à tous les textes conventionnels élaborés en leur absence (comme ils l’avaient proclamé), attitude qui risque d’être incomprise sur le terrain ? Rien n’est moins sûr, et la question se pose immédiatement pour les deux derniers avenants signés – et déjà transmis par la Cnam aux opposants, rapidement cette fois. L’un revalorise les tarifs des médecins de Guyane, l’autre permet l’indemnisation de séminaires de formation professionnelle conventionnelle (FPC) d’un seul jour. Difficile pour un syndicat de bloquer ce genre d’avancées. Pierre Costes (MG-France) s’en tire par une pirouette. «Je ne considère pas ces textes comme des avenants, mais comme un rattrapage de bévues anciennes. Il ne me semble pas utile de s’y opposer.»
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