LE PREMIER PLFSS de l'ère Sarkozy suit sa route parlementaire et fait escale au Sénat à partir d'aujourd'hui, pour toute la semaine, dans un climat marqué par le mécontentement disparate, mais vif, du monde de la santé.
Au terme de l'adoption de ce texte par les députés en première lecture et après les amendements de la commission des affaires sociales de la Haute Assemblée (« le Quotidien » des 5 et 9 novembre), difficile de trouver des voix qui défendent avec ardeur ce budget de la Sécu. Même au sein de l'UMP, la discussion en première lecture à l'Assemblée nationale a montré que l'enthousiasme de la majorité était mesuré. «A droite comme à gauche, il y a un sentiment d'impuissance, résume le sénateur socialiste Bernard Cazeau. Ce texte est sans élan, sans vision. Il ne résout rien.»
Dans le secteur de la santé en tout cas, les représentants des professionnels libéraux comme de l'hôpital public ont trouvé dans ce PLFSS de solides motifs de mécontentement, et autant de raisons de maintenir la pression sur le gouvernement et les élus ; les entretiens que nous ont accordés le Dr Michel Chassang, président de la CSMF, tout juste propulsé à la tête du Centre national des professions de santé (CNPS), et Claude Evin, président de la FHF (lire ci-dessous), expriment crûment le malaise en ville et à l'hôpital. Deux voix critiques qui peuvent peser sur l'évolution des réformes en cours…
Marche forcée.
En substance, les acteurs du secteur ambulatoire, médecins libéraux en tête, redoutent que ce PLFSS fragilise l'exercice libéral et le système conventionnel national. Les nouvelles possibilités de contractualisation individuelle, l'instauration de « stabilisateurs économiques» qui gèleront les revalorisations en cas de dérapage ou encore la mise sous surveillance des surprescripteurs sont notamment visés et entretiennent le sentiment diffus d'un abandon de souveraineté. «Il y a dans ce PLFSS quelques éléments comptables ou de durcissement, concède au « Quotidien » le sénateur UMP Jean-Claude Etienne . Mais c'est parce que la maîtrise médicalisée conventionnelle n'a pas eu tous les effets escomptés…» Une façon de souligner que les médecins de ville sont devant leurs responsabilités.
Dans les hôpitaux publics, cette fois, on redoute l'accélération à marche forcée de la convergence d'ici à 2012 (vers les tarifs des établissements les plus efficients du secteur et à raison d'un écart d'évolution de 3 % de moins chaque année que les tarifs des cliniques). La puissante FHF y voit même une «offensive sans précédent» contre l'hôpital public, qui ignorerait la situation dégradée des établissements, leurs contraintes et leurs missions propres. A quatre mois des élections municipales, le discours est, là aussi, assez clair.
Mobilisation « citoyenne ».
Enfin, les représentants des usagers restent mobilisés contre les futures franchises médicales (sur les médicaments, les actes paramédicaux et les transports sanitaires) qui s'ajouteront à tous les forfaits et restes à charge existants. Une «mobilisation citoyenne» est programmée devant le Sénat, aujourd'hui à 18 heures, à l'appel de plusieurs dizaines d'organisations d'usagers, de mutuelles, de syndicats de professionnels (Association des médecins urgentistes de France – AMUF, médecins référents – AMEDREF, praticiens des centres de santé – USMCS, collectif des médecins généralistes pour l'accès aux soins – COMEGAS…) mais aussi de partis de l'opposition (PS, PC, Verts, LCR) et du mouvement alternatif.
Hôpitaux et professionnels libéraux en alerte, usagers inquiets pour l'accès à la santé : au moment d'entamer l'examen d'un texte qui fâche pas mal de monde, les sénateurs ne pourront ignorer ce bruit de fond. Demain, ils ont convenu d'organiser un débat exceptionnel sur un autre sujet lourd : la démographie et la liberté d'installation. Mais, sur ce dossier au moins, la pression (des internes et des jeunes médecins) est retombée après le renoncement du gouvernement à établir un lien entre conventionnement et densité médicale.
Principales dispositions
Recettes : taxation anticipée des contributions sur les dividendes ; taxation limitée des stock-options (le Sénat veut ajouter une taxe de 2 % sur les niches sociales et une taxe sur les boissons sucrées).
Maintien de la taxe exceptionnelle de 1 % sur le chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique.
Déficit 2008 du régime général réduit à 8,7 milliards d'euros.
ONDAM général fixé à 2,8 %.
Mesures sur la démographie renvoyées aux états généraux de la santé, concertation avec les jeunes médecins.
Possibilité de contrats individuels caisses/médecins avec rémunération à la performance.
Expérimentation de nouveaux modes de rémunération.
Revalorisations : période d'observation de six mois, suspension en cas d'alerte.
Renforcement de la transparence tarifaire (affichage dans les salles d'attente, devis préalables) ; le Sénat propose de supprimer l'encadrement du secteur II voté par les députés.
Extension de la mise sous entente préalable (surveillance des gros prescripteurs).
Création de franchises médicales (50 centimes par boîte de médicament et par acte, 2 euros par transport sanitaire).
Promotion des maisons de santé pluridisciplinaires (amendement du Sénat).
Statut de médecin collaborateur salarié (amendement du Sénat).
T2A à 100 % dans les hôpitaux dès 2008.
Accélération de la convergence tarifaire des hôpitaux et des cliniques (amendement du Sénat).
Renforcement de la lutte contre la fraude.
Autorisation des infirmières à renouveler des vaccinations sans prescription.
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