CHAQUE INDIVIDU possède, dans ses cellules, deux copies de chaque gène : l'une héritée de sa mère et l'autre héritée de son père. Pour la plupart des gènes, les deux copies s'expriment de la même manière. Mais il existe des gènes pour lesquels une seule des deux copies s'exprime, l'autre copie étant réprimée. Autrement dit, pour que ces gènes-là s'expriment correctement, il faut que l'une de leur copies parentales se taise. Ce phénomène de répression génique qui dépend de l'origine parentale s'appelle « empreinte génétique ». Chez les humains et d'autres mammifères placentaires, précise un communiqué du Cnrs, cette répression est essentielle pour le développement du placenta et de l'embryon.
« Les modifications du génome qui sont à l'origine de l'empreinte restent mal comprises : il ne s'agit pas de modifications de la séquence de l'ADN mais de modifications "épigénétiques" » - c'est-à-dire des modifications qui affectent l'information héréditaire sans que le code génétique soit modifié ; par exemple, la fixation de groupements chimiques sur l'ADN (méthyle) et les protéines (méthyle, phosphate, acétyle ou autres).
Les perturbations de l'empreinte parentale sont fréquemment associées à des maladies, notamment au cancer, explique le Cnrs. Par exemple, il existe chez l'homme une grande région du chromosome 11 dont l'empreinte est souvent perturbée dans des tumeurs et chez les nouveau-nés atteints de « surcroissance » (surpoids, hypertrophie de la langue, du foie, des reins). Dans la genèse de certaines tumeurs, signalons la contribution d'une anomalie de la répression des deux copies de l'un des gènes contrôlant la prolifération cellulaire.
L'équipe de Robert Feil (institut de génétique moléculaire de Montpellier, Cnrs, université Montpellier-II) a identifié chez la souris les mécanismes en cause dans l'inactivation spécifique de la copie paternelle des gènes sur l'ensemble de cette région.
Modification des histones.
Surprise : « La répression de la plupart des gènes n'implique pas la méthylation de l'ADN mais plutôt la modification des histones » (histones : protéines qui organisent l'ADN dans la cellule).
Une autre étude de la même équipe, menée en collaboration avec une équipe de Cambridge, a montré que « la répression paternelle le long du domaine, et donc les modifications des histones, était dépendante de la présence d'une courte séquence d'ADN », précise le communiqué du Cnrs.
« Ces découvertes ouvrent de nouvelles perspectives quant à la compréhension des mécanismes "épigénétiques" qui semblent être extrêmement importants pour l'expression adéquate des gènes. Leur étude devrait permettre de mieux comprendre les dérégulateurs de l'empreinte génomique observées dans les pathologies humaines », conclut le Cnrs.
David Umlauf et coll. Annabelle Lewis et coll. « Nature » en ligne du 31 octobre 2004.
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