LE TEMPS DE LA MEDECINE
Certaines des épidémies qu'a connues la planète ces dernières années ont montré la place prise par la collaboration scientifique internationale. L'infection par le VIH en est le plus vif exemple. L'apparition du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob a permis aussi de voir apparaître un front franco-britannique contre le prion.
Une autre démonstration de mise en commun des savoirs internationaux est l'épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère, le SRAS. Avec illustration des possibilités de mise en route quasi instantanée. Mesures de prévention généralisées, échanges entre chercheurs, mise à disposition des découvertes sur Internet..., personne n'a travaillé seul dans son coin. Il y avait « urgence à agir ».
Téléconférences et site spécifique
Le 15 mars 2003, l'OMS lance un bulletin d'alerte informant de l'émergence d'une nouvelle maladie respiratoire au Vietnam. Des contacts téléphoniques sont pris aussitôt par les médecins de l'organisation pour constituer un réseau de surveillance ; des téléconférences et un site Internet spécifique sont mis en place. L'échange de données est rendu possible en temps réel. Dans le même temps, une mission française du SAMU arrive à Hanoi, accompagnée du Dr Jean-Claude Manuguerra, de l'Institut Pasteur.
Quelques jours après la mise en place du réseau, une première piste (fausse) est proposée par des virologues allemands. Ils impliquent un paramyxovirus. Le même jour, des chercheurs de Hong Kong incriminent le même responsable. Mais, deux jours plus tard, c'est un métapneumovirus qu'isolent quatre équipes différentes. Hypothèse rejetée, peu de temps après, au cours d'une conférence téléphonique par les virologues de Rotterdam, qui, les premiers, avaient décrit ce virus.
La vérité, nous le savons maintenant, est révélée le 22 mars par des chercheurs du CDC d'Atlanta. Ils identifient un virus inconnu, également isolé par les virologues de Hong Kong et une équipe allemande : un coronavirus ne correspondant à aucune description connue*. Dans les jours qui suivent, plusieurs autres laboratoires internationaux (dont l'Institut Pasteur) confirment, microscopie électronique et PCR à l'appui, les conclusions américaines. L'identification de l'agent responsable du SRAS est démasqué dans des délais optimaux. La coopération mondiale a fonctionné à plein régime.
Mesures sanitaires
Un accord international se fait aussi sur les mesures sanitaires, notamment aéroportuaires : prise de température par détection infrarouge dans les pays asiatiques et au Canada, fiches de renseignements mentionnant des épisodes fébriles ou de toux, mesures de protection sanitaires (réactivées en Italie, en septembre).
La nécessité de mise au point de tests fiables de détection a également fait jouer à plein l'entente internationale. A la fin du mois d'avril, l'institut Bernard Notch de Hambourg propose un test génétique de détection. Evalué par l'Institut Pasteur de Paris, le test est mis à la disposition des laboratoires français et du réseau international des instituts Pasteur et associés. A la fin de mai, le Center for Disease Control (CDC) d'Atlanta évalue un test de détection précoce de l'infection (4e ou 5e jour). Un travail similaire est mené en collaboration par l'institut Pasteur de Hong Kong et des chercheurs de l'université de Hong Kong.
Dernière étape, la recherche vaccinale, encore débutante contre le SRAS, ne bénéficie pas moins de cette entente internationale. Au début d'octobre, une équipe canadienne annonce la mise en place d'un programme de recherche en utilisant comme vecteur un adénovirus. Un gène d'une protéine nucléaire du coronavirus étant inséré au sein du génome du vecteur. Au début de novembre, l'OMS, à l'occasion de deux jours de travail sur le SRAS, confirme qu'aucun vaccin ne sera disponible si une nouvelle épidémie surgit en 2004. Le groupe de travail envisage également de quelle manière les brevets et la propriété intellectuelle pourraient contribuer et non entraver cette recherche vaccinale.
* « The Lancet », vol. 361, pp. 1730-1736, 17 mai 2003.
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