LA TAPISSERIE, élément de confort, de décor et d'ostentation, est un art autodestructible dont les témoignages les plus anciens ont presque disparu. Sous les attaques des mites, des rongeurs et surtout des humains qui n'ont pas hésité à les couper en deux, à leur convenance, ou à les percer d'une portière. Voire, quand elles étaient passées de mode, à s'en servir comme bâche de protection ou toile d'emballage, ou à y mettre le feu pour récupérer les parcelles d'or qui rehaussent les plus somptueuses.
Voilà qui permet de mesurer l'intérêt de l'exposition inaugurée à Toulouse il y a quelques semaines. Elle réunit les éléments d'une quinzaine de tentures de chœurs provenant de différentes cathédrales de France, sans aucun emprunt à des collections étrangères.
Moins transportées et moins transformées que les civiles, les tentures d'églises ont été mieux préservées, ce qui ne veut pas dire qu'elles n'aient pas souffert. Aucune n'est d'ailleurs vraiment complète. A part celle qui forme le cœur de l'exposition, l'Histoire de la Vierge et du Christ de la cathédrale d'Aix-en-Provence, qui aurait pu l'être si un cambriolage ne l'avait, dans les années 1970, amputée de deux éléments sur huit.
Un siècle d'art des liciers.
Du milieu du XVe au milieu du XVIe siècle, les tentures, exposées dans l'ordre chronologique, permettent d'apprécier l'évolution de l'art des liciers sur un siècle. Du jardin où s'active saint Maurille vers 1460, qui ressemble encore aux mille-fleurs médiévales, aux envolées baroques du manteau de saint Martin, tissé dans les Flandres dans le premier tiers du XVIe siècle pour la collégiale de Montpezat-de-Quercy.
En dehors des choix esthétiques, ces peintures de laine et de soie nous disent tout de la vie quotidienne des gens de l'époque. Les Noces de Cana nous invitent à des tables de festin nappées de blanc, chargées de mets et d'une vaisselle d'orfèvrerie, d'autant plus précieuses que les originaux ont depuis longtemps disparu. Les scènes de Nativité nous font entrer dans des chambres au décor raffiné, meublées de crédences sculptées, de sièges variés et de délicats vases de fleurs, et tendues surtout de magnifiques étoffes.
Mais le plus extraordinaire, ce sont les costumes, ceux des hommes comme ceux des femmes. La mode de cour du XVe siècle est une des plus raffinées, des plus sophistiquées qui soit, et les liciers restituent avec une admirable virtuosité le tombé d'un manteau, la finesse d'un linon blanc, la richesse d'un brocart et les galons brodés d'or qui soutachent les robes à l'ampleur généreuse et les pourpoints à crevés. Les dames sont coiffées de résilles d'or et de perles, elles arborent des colliers et des ceintures ouvragés de pierres précieuses, qui rappellent que l'art de la joaillerie est alors porté au summum. Comme le prouvent les fermaux d'or et d'émail qui attachent les manteaux des hommes comme des nobles seigneurs et gentes dames.
« Saints de Chœurs », jusqu'au 31 août, ouvert tous les jours, y compris les jours fériés, de 10 h à 19 h . Ensemble conventuel des Jacobins, rue de Lakanal. Entrée : 5 euros, tarif réduit : 2,5 euros. Visites guidées sur demande. L'exposition se déplacera ensuite, avec des variantes, au musée des Tapisseries d'Aix-en-Provence (septembre à décembre) et au musée de Normandie de Caen (de janvier à mai 2005).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature