Théâtre
L'affiche superpose l'image d'une Miss pour podium, saisie de dos, et d'un Christ à couronne d'épines. Une interprétation du destin de Maureen Nolan (Marianne Epin), soumise à une mère égoïste et cruelle, Mag (Isabelle Sadoyan) et qu'un brave garçon, Pato Dooley (Vincent Winterhalter) aurait pu arracher à sa vie de servitude, avec l'aide d'un messager d'occasion, son petit frère Ray (Lorànt Deutsch), n'était le désir de détruire de la mère et la douce folie de Maureen.
Pas de référence directe à la Passion du Christ dans cette pièce de l'auteur britannique Martin MacDonagh qui inscrit « la Reine de beauté de Leenane » dans un triptyque qu'il situe dans la région de ses vacances d'enfance, le Connemara. Et si l'on entend les ricanements du diable, ce sont ceux de l'auteur et, dans une certaine mesure, du metteur en scène. Gildas Bourdet, en effet, ne dédaigne pas l'excès, la férocité voire le grand guignol à irisations Grand guignol.
Prenant les personnages de MacDonagh, gens de peu, ceux qui connaissent les mêmes souffrances que les princesses de tragédie classique mais n'ont pas les mots pour les soutenir, Bourdet renoue avec son propre univers d'écriture. Et il ne craint pas la compassion de l'auteur pour ces personnages déchirés.
A Isabelle Sadoyan, femme qui inspire naturellement confiance, douce et lumineuse, il donne le rôle de la terrible Mag. A Marianne Epin, Tanagra très urbain, il confie Maureen, la fille qui trime au poulailler. Ces deux contre-emplois sont très fructueux car les comédiennes sont remarquables. Sadoyan se délecte à jouer les mères monstrueuses et sournoises, tapie dans son fauteuil à bascule. Epin, sous une perruque rousse, entre dans la peau de cette fille de 40 ans qui rêve encore. Entre elles, le jeune Ray, excellemment dessiné par Lorànt Deutsch et Pato, qui a donné son surnom à Maureen et pourrait l'emmener jusqu'en Amérique, n'était la méchante mère, que Vincent Winterhalter impose finement.
Dans une maison (scénographie Edouard Laug et Bourdet) comme tapissée du décor naturel extérieur - la beauté du monde, ici, ne console de rien - le metteur en scène qui signe également l'adaptation d'un texte qui se joue de la langue spécifique, anglo-irlandais - là aussi, il y a eu meurtre du gaélique, irruption du politique, domination, asservissement... -, dirige rigoureusement, imprime un mouvement implacable. Et n'oublie pas la pluie. La tristesse de la pluie. Une eau qui lavera Maureen de toutes les cruautés du réel, jusqu'à la folie.
Théâtre de l'Ouest Parisien, à 20 h 45 du mardi au samedi sauf jeudi à 19 heures et le dimanche en matinée à 16 heures. Durée : 1 h 45 sans entracte (01.46.03.60.44). Jusqu'au 28 mai. Le texte est publié par « l'Avant-Scène Théâtre », n° 1135, 1er mai 2003 (10 euros).
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