L A repentance est décidément à la mode. Après avoir publiquement admis ses torts vis-à-vis des médecins, la semaine dernière à Bordeaux, l'ancien Premier ministre Alain Juppé s'est longuement expliqué devant l'Union régionale des médecins libéraux d'Aquitaine (1) sur les raisons qui l'ont conduit à prendre des mesures impopulaires à l'égard des professions médicales, dans le cadre de la réforme de la Sécurité sociale.
Dans un dialogue franc et direct organisé via le site Internet de l'union, Alain Juppé explique que c'est l'urgence de la situation économique qui l'a conduit à prendre des mesures draconiennes dans le domaine de la maîtrise des dépenses de santé. « Nous étions en situation de crise. Il y avait le feu à la maison (...) Il y avait 100 milliards de déficit à l'assurance-maladie (...) Et c'est parce que je me suis trouvé confronté à cette situation de crise que j'ai fait ce qui est la cause de toute l'incompréhension, de toute la rupture avec le corps médical : quelque chose qui n'était pas du tout dans la philosophie du plan Juppé, je le reconnais, c'est-à-dire un mécanisme de reversement (d'honoraires en cas de dérapage des dépenses) qui était, c'est vrai, plus comptable que médicalisé et plus collectif qu'individuel (...) tout simplement parce que les instruments de la maîtrise individualisée n'existaient pas. »
Rappelant que ce mécanisme n'a toutefois jamais été mis en œuvre depuis, Alain Juppé estime que la mission d'un gouvernement, « c'est aussi de prendre les mesures d'urgence et de sauvetage. Je l'ai fait, j'en ai payé le prix, c'est très bien. »
L'ancien Premier ministre constate toutefois que le problème de la maîtrise des dépenses de santé « reste entier » puisque, en quatre ans, les dépenses sont passées de 600 à 700 milliards de francs et que les objectifs annuels sont dépassés chaque année.
Interrogations sur le G7
Inquiet du ralentissement de la conjoncture qui risque de conduire dans les mois à venir à des « déséquilibres considérables », il estime que la balle est désormais dans le camp des médecins pour définir les modalités d'une maîtrise médicalisée.
Réagissant aux propositions du G7 (2), il affirme ne pas être « allergique » à l'idée d'aller vers une revalorisation significative des actes. « Mais qu'est-ce qu'il y aura dans l'autre plateau de la balance pour éviter que ce ne soient 40 milliards de francs de charges supplémentaires pour l'assurance-maladie ? C'est ça que je ne vois pas bien », s'interroge-t-il, en se déclarant favorable à un système « donnant-donnant ». Alain Juppé prévoit également des difficultés à l'hôpital public du fait de la mise en œuvre des 35 heures qui risque, selon lui, de provoquer un « dérapage généralisé » et se dit peu convaincu, pour sa part, par la mise en concurrence de la Sécu avec les assurances privées.
(1) L'intégralité des réponses d'Alain Juppé aux questions des médecins est consultable sur le site de l'union : www.urlma.org
(2) Le G7 regroupe la CGT, FO, la CFTC, la CFE-CGC et, du côté des médecins, la CSMF, la FMF et el SML.
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