Le jeune enfant présente un risque particulier de carence en fer en raison de besoins élevés. La prévalence de l’anémie ferriprive en Europe est inférieure à 2 % avant l’âge de 6 mois, de 2 à 3 % entre 6 et 9 mois et de 3 à 9 % entre 1 et 3 ans. Le risque en est particulièrement élevé en cas de petit poids de naissance, d’alimentation à base de lait de vache, d’absence de supplémentation en fer, de bas statut socio-économique et chez les familles d’immigrants. Des experts du comité ESPGHAN* sur la nutrition font le point dans le Journal of Pediatric Gastroenterology and Nutrition (1) et soulignent leurs recommandations.
La carence en fer se développe selon trois stades :
–
déplétion en fer, caractérisée par la baisse des réserves ;
–
érythropoïèse
ferriprive ;
– anémie
ferriprive.
L’association des mesures de l’hémoglobine et de la
ferritine
sérique est considérée comme le marqueur le plus fiable du statut
ferrique. Chez l’enfant, des seuils adaptés à l’âge doivent être utilisés (cf. Tableau 1).
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0-1 semaine
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2 mois
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4 mois
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6-24 mois
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2-5 ans
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Hb (g/L)
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135
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90
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105
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105
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110
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Ferritine (µg/L)
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40
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40
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20
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10-12
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10-12
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Tableau 1 : Seuils indicatifs d’hémoglobine et de ferritine en fonction de l’âge
Jusqu’à 4-6 mois, l’enfant né à terme et en bonne santé dispose de réserves suffisantes en fer pour être
autosuffisant, même en cas d’allaitement exclusif. Entre 6 et 24 mois, il devient dépendant des apports alimentaires additionnels et, du fait de sa croissance très rapide, ses besoins en fer sont plus importants qu’à toute autre période de la vie. Entre 6 et 24 mois, le contenu en fer de l’organisme doit doubler, passant de 300 à 600 mg. Ainsi, les besoins théoriques en fer à cet âge sont de 0,76 mg/j/kg, en prenant pour hypothèse une
biodisponibilité moyenne de 10 %.
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6-12 mois
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1-3 ans
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4-8 ans
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9-13 ans
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Apports journaliers en mg
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7,8 à 11
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5,8 à 9
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6,1 à 10
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8 à 11
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Apports journaliers en mg/kg/j
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0,9 à 1,3
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0,5 à 0,8
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0,3 à 0,5
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0,2 à 0,3
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Tableau 2 : Apports recommandés en fer
L’absorption du fer est très variable : de 50 % pour le fer du lait maternel, 10 % pour le fer des formules enrichies, 25 % pour celui de la viande. L’absorption du fer est augmentée en cas de
déplétion.
La principale conséquence d’une carence en fer chez l’enfant est le risque de retard de développement neurologique et mental. L’anémie
ferriprive de la petite enfance est associée à un déficit cognitif et
comportemental durable. La
supplémentation en fer a montré un effet positif sur les indices de développement mental et le développement moteur chez les nourrissons
carencés.
Le fer est aussi un puissant
pro-oxydant et, contrairement à d’autres
micronutriments, il ne peut pas être éliminé activement par l’organisme. Une
supplémentation intempestive en fer chez les nourrissons non
carencés peut avoir des conséquences négatives : retard de croissance et risque majoré d’infections.
Recommandations :
- En Europe, la supplémentation en fer de la femme enceinte ne semble pas améliorer le statut en fer de l’enfant.
- Un clampage retardé (3 minutes) du cordon est conseillé chez tous les nouveau-nés de façon à augmenter la transfusion du sang du cordon au bébé.
- Il n’est pas utile de supplémenter systématiquement en fer les nourrissons de poids de naissance normal.
- En cas d’alimentation par formule infantile, jusqu’à 6 mois celle-ci doit être enrichie en fer à raison de 4 à 8 mg/L.
- Les enfants de relativement faible poids de naissance (2 à 2,5 kg) doivent être supplémentés en fer (1-2 mg/kg/j) à partir de 2 à 6 semaines et jusqu’à l’âge de 6 mois, quel que soit leur terme.
- Les enfants de petit poids de naissance – inférieur à 2 kg – doivent être supplémentés à la dose de 2 à 3 mg/kg/j.
- Les formules de suite doivent être enrichies en fer, mais les données sont insuffisantes pour déterminer la concentration optimale.
- À partir de 6 mois, tous les enfants doivent recevoir une alimentation riche en fer, incluant de la viande et/ou des aliments enrichis en fer.
- Le lait de vache non modifié ne doit pas constituer le principal apport lacté avant l’âge de 12 mois et doit être limité à 500 mL par jour chez le nourrisson.
- Ces recommandations diététiques doivent en particulier être communiquées aux groupes à haut risque tels que familles de niveau socio-économique faible ou migrantes.
Dr Elisabeth MILLARA
Référence
1. Domellöf M, Braegger C, Campoy C, Colomb V et al. ; ESPGHAN Committee on Nutrition.
Iron requirements of infants and toddlers. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2014 ; 58 : 119-29.
* ESPGHAN =
European Society for Paediatric Gastroenterology, Hepatology and Nutrition
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