LA MEDECINE EN 2003
Les recommandations de l'EULAR sont élaborées en trois étapes : une analyse de la littérature par une personne indépendante, des propositions faites par vingt-trois experts européens, sélectionnées en appliquant un processus décisionnel à plusieurs tours selon la méthode Delphi, et une évaluation de ces propositions en fonction du niveau de preuves réunies par chacune d'entre elles, effectuée par le responsable de l'analyse de la littérature. De ce processus est issue une série de dix recommandations (Cf. encadré), traduisant l'évolution de la littérature, mais aussi celle de l'opinion des experts.
Peu de changements
Si les recommandations de 2003 confirment globalement celles de 2000, certains points méritent d'être soulignés. Tout d'abord, comme le fait remarquer le Pr Maxime Dougados (hôpital Cochin, Paris), l'accent est mis de façon encore plus prononcée sur les mesures non pharmacologiques. Toutefois, si tout le monde s'accorde sur leur efficacité, les modalités pratiques d'application et de suivi sont des points qu'il faudra préciser.
La discussion sur le traitement pharmacologique a été très animée et les recommandations dans ce domaine ne suivent pas rigoureusement l'analyse stricte de la littérature. Ainsi, bien que l'avantage des anti-COX-2 sur les AINS non sélectifs en termes de tolérance gastro-intestinale soit reconnu et que les AINS, dans leur ensemble, se révèlent, dans la majorité des études, plus efficaces que les antalgiques, il a quand même été décidé de continuer à recommander le paracétamol en première intention. Selon le Pr Dougados, il y a deux raisons à cela. D'une part, même si, lorsqu'ils sont évalués sur un groupe de patients dans un essai thérapeutique, les AINS l'emportent en général, il n'en reste pas moins que, à l'échelon individuel, un antalgique peut très bien être aussi efficace qu'un AINS. D'autre part, les experts ont estimé que le risque d'effets indésirables à long terme est moindre avec les antalgiques. Il s'agit là d'une des principales différences entre les recommandations de l'EULAR et celles de l'ACR (American College of Rheumatology) qui, elles, préconisent les anti-COX-2 en première intention.
Une place pour les traitements symptomatiques d'action lente
Sur la foi de l'analyse de la littérature, il a été reconnu que les traitements dits spécifiques de l'arthrose, appelés aussi traitements symptomatiques d'action lente, tels que la diacerhéine, la chondroïtine sulfate, les insaponifiables d'avocat et de soja ou l'acide hyaluronique, ont un effet symptomatique, ce qui leur a valu de voir leur place consolidée au sein des recommandations. Les experts ont cependant jugé les données encore incomplètes, pour affirmer leur effet structural.
Enfin, en ce qui concerne la chirurgie, les experts de l'EULAR ont été unanimes pour reconnaître la nécessité de mettre au point des aides à la décision chirurgicale ou tout au moins des critères de priorité. Selon le Pr Dougados, le problème est d'éviter à la fois la sur- et la sous-utilisation, dont les risques respectifs sont variables selon les pays. Cette question, discutée dans le cadre de la gonarthrose, sera, selon lui, encore plus importante dans les futures recommandations sur la coxarthrose, qui devraient être présentées en juin 2005.
D'après un entretien avec le Pr Maxime Dougados, membre du comité d'experts de l'EULAR.
Les 10 points clés
1. La prise en charge optimale de la gonarthrose nécessite l'association de mesures non pharmacologiques et pharmacologiques.
2. Le traitement doit être adapté en fonction :
- des facteurs de risque pour le genou (obésité, facteurs mécaniques associés, activité physique) ;
- des facteurs de risques généraux (âge, maladies associées, traitements multiples) ;
- de l'importance de la douleur et du handicap ;
- de la présence ou de l'absence de signes inflammatoires ;
- de la localisation et de l'importance des lésions.
3. Le traitement non pharmacologique devrait associer : formation régulière, exercice physique, utilisation de cannes et/ou de semelles et perte de poids.
4. Le paracétamol est l'antalgique de première ligne et, s'il est efficace, le traitement antalgique oral au long cours à privilégier.
5. Les topiques (AINS) sont efficaces et bien tolérés.
6. Les AINS doivent être envisagés en l'absence de réponse au paracétamol. Chez les patients à haut risque gastro-intestinal, il faut associer un protecteur gastrique aux AINS non sélectifs ou prescrire des anti-COX-2.
7. Les opiacés, avec ou sans paracétamol, sont utiles lorsque les AINS, y compris les anti-COX-2, sont contre-indiqués, inefficaces et/ou mal tolérés.
8. Les traitements symptomatiques d'action lente (chondroïtine sulfate, insaponifiables d'avocat et de soja, diacerhéine, acide hyaluronnique) ont une action symptomatique et pourraient avoir des effets structuraux.
9. Les injections intra-articulaires de corticoïdes retard sont indiquées dans les poussées douloureuses, surtout lorsqu'elles sont accompagnées d'un épanchement.
10. L'arthroplastie doit être envisagée chez les patients présentant des signes radiologiques, des douleurs réfractaires et un handicap fonctionnel.
Les pistes génétiques
Les facteurs génétiques de l'arthrose constituent un sujet de recherche depuis de nombreuses années. Les études effectuées dans certaines formes familiales et chez des jumelles ont de fait révélé diverses mutations intéressant le gène du collagène de type IX ou 2A1, mais aussi d'autres gènes comme celui du récepteur de la vitamine D qui est impliqué dans la densité minérale osseuse (DMO). Le rôle de l'os et des gènes contrôlant la DMO, qui est augmentée chez les arthrosiques, semble en effet de plus évident.
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