Tranches d'âge, femmes à risque, surveillance

Les questions après la mise sur le marché du vaccin HPV

Publié le 07/03/2007
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«L'âGE de la vaccination contre le papillomavirus est une question clé. Les recommandations existantes sont similaires pour les Etats-Unis et l'Europe: vacciner les femmes de 9 à 26ans, avec un premier groupe de 9-15ans, et un rattrapage pour les 16-26ans. Nous attendons maintenant les recommandations préalables au remboursement. Elles pourraient ne pas correspondre tout à fait à l'AMM délivrée par l'Agence européenne du médicament», résume le Dr Joseph Monsonégo (Eurogin, Paris).

En prévention du cancer du col utérin, il s'agit d'une vaccination qui donne tout son bénéfice avant l'exposition aux virus. Le principe est d'offrir à toutes les femmes des taux d'anticorps et une immunité suffisants pour éliminer le virus dès son arrivée à la surface du col, avant même qu'il ne pénètre dans l'épithélium.

Une protection absolue… à condition.

L'efficacité vaccinale est fondée sur les essais cliniques avec le vaccin quadrivalent (Gardasil, déjà sur le marché) et le vaccin bivalent (Cervarix, non encore commercialisé). Ces essais cliniques ont été réalisés auprès de populations jeunes, âgées de 16 à 26 ans. Ils montrent une protection absolue vis-à-vis des lésions dysplasiques et des lésions de haut grade, à condition que : ces femmes soient naïves de tout contact avec les papillomavirus d'un des types contenus dans le vaccin ; que le protocole ait été suivi (trois injections) ; qu'elles n'aient pas déclaré d'infection intercurrente par HPV. «Il s'agit des lésions associées aux types viraux du vaccin. Pour la totalité des dysplasies, la protection est moindre, puisque les HPV16, 18, 6, 11 sont présents dans environ 65% des dysplasies moyennes à sévères. Pour le vaccin Gardasil, l'efficacité est également proche de 100% pour les condylomes acuminés. Des études viennent d'être présentées montrant aussi une protection contre les dysplasies vaginales et vulvaires associées à ces types viraux.»

«Dans le cas particulier des 16-26ans, poursuit le Dr Monsonégo , le vaccin est indiqué sans connaissance du statut viral avant les injections. Or certaines femmes, celles qui ont déjà eu des rapports, sont exposées au virus. Le bénéfice vaccinal pourrait donc être moindre par rapport à des femmes naïves… Mais la pratique suggère le contraire.» Le bénéfice vaccinal est conservé pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le vaccin n'est pas le seul moyen de prévention ; il s'accompagne d'un dépistage par frottis, avec, en outre, dans la majorité des cas, une élimination spontanée du virus. Ensuite, les infections à HPV 16 et 18 sont moins fréquentes avant 26 ans qu'au-delà. Le vaccin sera donc efficace sur les lésions qui y sont associées. Enfin, si, avant la vaccination, une jeune femme a été exposée à l'un des types viraux du vaccin, la protection existe contre les autres types d'HPV du vaccin.

Une adulte de 30 ou 35 ans.

«Une autre question se pose dorénavant: que faire chez les femmes de plus de 26ans? Il n'y a pas d'AMM, pas de recommandation, mais pourquoi une adulte de 30 ou 35ans, qui serait dans les mêmes conditions qu'une femme plus jeune (jamais exposée au virus), ne bénéficierait-elle pas d'une protection vaccinale?» L'infection par HPV 16 ou 18 est plus fréquente chez les adultes et la persistance virale est plus importante. Il s'agit donc d'une population à risque réellement plus élevé, qui pourrait tirer bénéfice d'un vaccin, à condition d'en réunir les critères. «Des essais sont en cours. Les seuls éléments disponibles pour envisager une éventuelle indication chez l'adulte sont des données immunologiques. Elles montrent, avec les vaccins tétravalent et bivalent, une immunogénicité protectrice suffisante chez des femmes de différents âges, naïves ou non.» Mais, à l'heure actuelle, les objectifs de la vaccination se fondent sur l'efficacité contre les lésions précancéreuses.

La protection absolue contre les lésions cervicales repose sur la conjonction synergique de deux approches : le vaccin, pour des populations jeunes avant l'exposition au virus ; le dépistage qui commence chez la femme après 20 ans et qui se poursuivra au rythme habituel afin de protéger des autres types viraux.

Au-delà de l'âge de la vaccination, trois questions se posent en pratique.

Faut-il connaître le statut viral avant de vacciner ? Les recommandations ne mettent aucune condition préalable au vaccin chez les 9-26 ans. «En revanche, si l'on devait envisager un vaccin au-delà, situation hors AMM, il y aurait intérêt à le connaître.» Chez les femmes porteuses d'un HPV contenu dans le vaccin, on sait que la vaccination n'est pas efficace. Pour obtenir le meilleur résultat, il faudrait donc sélectionner le sous-groupe HPV négatif et cytologie négative. «Ce sous-groupe n'aurait pas, a priori , de raison de moins bien réagir que des adolescentes dans la même situation.»

Association frottis et génotypage viral.

L'autre question porte sur le dépistage des femmes immunisées. Une politique vaccinale peut réduire de 50 % environ la fréquence des frottis anormaux, mais, en corollaire, diminuer leur valeur prédictive positive. L'association d'un test viral dans cette population pourra améliorer la valeur prédictive.

Enfin, comment suivre la vaccination ? Des sérologies ont été faites au cours des essais cliniques. Elles ne sont pas disponibles en pratique courante. L'évolution devrait se faire vers l'association frottis et génotypage viral à la fois en dépistage et en monitoring de la vaccination.

> Dr G. B.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8121