La transplantation hépatique est actuellement le seul traitement de l'insuffisance hépatique. Elle-même résultant, en grande partie, d'un déséquilibre entre une perte hépatocytaire importante et une régénération insuffisante ou retardée des hépatocytes résiduels. La pénurie de greffons disponibles et les complications d'un traitement immunosuppresseur incitent à la recherche d'alternatives.
La thérapie cellulaire appliquée au foie apparaît comme une approche prometteuse. Les travaux portant sur la transplantation d'hépatocytes isolés dans des modèles animaux et des études cliniques ont montré qu'elle pourrait rétablir une fonction hépatique transitoire permettant d'attendre un greffon. Toutefois, l'injection de ces cellules différenciées ne résout pas le problème du manque de donneurs ou celui du rejet.
S'intégrer dans le foie
En l'absence d'un stimulus régénératif, les hépatocytes matures injectés n'ont pas un avantage prolifératif par rapport aux hépatocytes de l'hôte. De plus, ils se prêtent difficilement au transfert de gènes. Selon le Dr P. Mavier, si les résultats sont encore décevants, il ne faudrait pas pour autant abandonner cette piste, si l'on se réfère à une étude récente sur les rats cirrhotiques. Elle a montré que des hépatocytes injectés dans la rate sont capables de s'intégrer dans le foie.
La découverte de la potentialité des cellules souches hématopoïétiques à se différencier en cellules épithéliales hépatiques (et, selon les récents travaux, également en cellules digestives, cutanées ou pulmonaires) est d'un grand intérêt, car les mécanismes sont totalement inconnus. Les cellules souches indifférenciées ne sont pas immédiatement actives, mais ont des atouts par rapport aux hépatocytes isolés. D'une part, elles prolifèrent facilement in vitro. D'autre part, l'utilisation des propres cellules du patient permet de résoudre les problèmes de tolérance et de disponibilité des greffons.
La possibilité de colonisation du foie par les cellules hématopoïétiques et leur différentiation en hépatocytes et en cellules de type biliaire a été démontrée tant chez l'homme que chez l'animal. A ce titre, une étude a montré chez des femmes ayant reçu une greffe de moelle osseuse, provenant des donneurs hommes, que 10 % des hépatocytes avaient un chromosome Y au bout quatre mois et demi.
Une survie de sept mois
L'efficacité thérapeutique de cette stratégie thérapeutique a été validée par Lagasse et coll. (« Nat Med » 2000) dans un modèle murin de tyrosinémie de type I, par déficience en fumarylacétoacétate hydrolase (FAH), laquelle entraîne une accumulation des métabolites et une nécrose hépatique. Dans cette étude, l'injection de cellules souches hématopoïétiques, non déficientes en FAH, restaurait les fonctions du foie et apportait une survie de sept mois (en l'absence de transplantation, la survie n'est que 0 à 5 semaines), chez 4 des 7 animaux traités.
Les meilleures indications de l'utilisation des cellules souches hématopoïétiques sont actuellement les maladies métaboliques héréditaires (tyrosinémies, maladie de Wilson, etc) qui pourraient être traitées par correction in vitro de l'anomalie génétique, suivie de l'injection des cellules dans le foie. On peut aussi imaginer les utiliser dans le traitement des hépatites chroniques B ou C (à condition que les cellules soient protégées de l'infection virale) et dans le traitement de l'insuffisance hépatocellulaire (cirrhoses au stade terminal, hépatites fulminantes lorsqu'une greffe auxiliaire est pratiquée, hépatectomies majeures).
Autre perspective : grâce aux connaissances acquises des facteurs favorisant l'intégration des cellules souches dans le foie et leur différenciation, on pourrait disposer in vitro d'un nombre élevé de cellules nécessaires pour la réalisation d'un foie bio-artificiel.
D'après la communication du Dr Philippe Mavier (Créteil), à l'occasion de la Journée d'hépatologie Henri-Mondor.
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