Spécialité pluridisciplinaire au carrefour entre la biologie, la médecine et la haute technologie, l'ingénierie tissulaire a pour objectif de remplacer les tissus humains par des substituts incluant des éléments vivants. En rhumatologie, les recherches explorent de nouvelles options thérapeutiques destinées à réparer des tissus osseux ou cartilagineux endommagés par des processus pathologiques ou traumatiques.
LE TERME d'ingénierie tissulaire définit un ensemble de techniques et de méthodes destinées à développer des substituts biologiques pouvant restaurer, maintenir ou améliorer les fonctions des tissus. Elle fait appel aux compétences acquises dans des domaines très variés : science des matériaux, biologie moléculaire et cellulaire, ingénierie chimique et mécanique, biochimie, robotique, bioinformatique, médecine et chirurgie, etc.
D'une façon générale, plusieurs types de cellules saines peuvent être utilisés en ingénierie : autologues (du même individu), homologues (d'un autre individu de même espèce) ou hétérologues (d'un individu d'une autre espèce). Il peut par ailleurs s'agir de cellules jeunes, adultes ou embryonnaires (indifférenciées).
Actuellement, en rhumatologie, les recherches s'orientent essentiellement vers la fabrication d'os et de cartilage. Dans l'exemple du tissu osseux, évoqué par Richard Oreffo (Southampton), on utilise des cellules spécialisées, déjà différenciées, ou des cellules souches, c'est-à-dire des cellules non encore différenciées, embryonnaires ou adultes. Les cellules souches embryonnaires peuvent être obtenues facilement, cultivées en grand nombre et ont un potentiel de différenciation important (cellules toti- ou pluripotentes). Mais elles soulèvent des problèmes éthiques car elles doivent être prélevées sur un embryon. Les cellules souches adultes, qui participent à la réparation tissulaire, sont prélevées directement sur l'organisme, mais elles sont en petit nombre, plus difficiles à cultiver et moins différenciables (cellules multipotentes).
Les cellules souches qui donnent naissance aux ostéoblastes, cellules stromales ou cellules mésenchymateuses, sont présentes dans la moelle osseuse, mais en faible quantité. Ce sont des cellules progénitrices multipotentes, qui peuvent se reproduire pendant plusieurs générations et se différencier en cellules osseuses, et aussi en cellules cartilagineuses, musculaires tendineuses, ligamentaires ou adipeuses. Le fait qu'elles soient présentes après la naissance, leur capacité de régénération et leur plasticité suscitent un grand intérêt. Plusieurs équipes travaillent actuellement sur des méthodes pouvant induire la différenciation permanente des cellules souches. Celle de Richard Oreffo à l'université de Southampton concentre ses recherches sur de nouvelles stratégies d'isolement de cellules souches et sur des systèmes associant des cellules progénitrices à des échafaudages de soutènement en polymères contenant les facteurs de croissance appropriés.
Pour Richard Oreffo, la mise au point de protocoles, d'outils et surtout d'approches multidisciplinaires pour le développement de tissus denovo à partir de populations de cellules progénitrices et de cellules souches offre de réels espoirs d'améliorer la qualité de vie de nombreux patients.
De la même façon, beaucoup de progrès ont été effectués dans l'ingénierie du tissu cartilagineux, mais les chercheurs ont à faire face à de multiples difficultés, comme notamment la variabilité interindividuelle des préparations cellulaires, la vascularisation des greffons, leur intégration aux tissus environnants et leur réponse à la mise en charge.
D'après les communications de R. O. Oreffo (Southampton, UK), T. E. Hardingham (Manchester, UK) et I. Martin (Bâle, Suisse).
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