De notre correspondante
La régionalisation serait-elle la panacée de la crise du système de santé ? Pour l'union régionale des médecins libéraux (URML) de Rhône-Alpes, qui a organisé un débat national sur ce thème à Lyon, la réponse est d'autant plus affirmative qu'elle y verrait bien l'occasion d'acquérir enfin ce fameux « contre-pouvoir » que les unions étaient censées exercer après leur création, en 1993. Dans l'intention, clairement affichée, d'accélérer la réflexion autour de la régionalisation du système de santé, l'URML Rhône-Alpes a donc diligenté une enquête auprès des assemblées régionales de France, réalisée par le groupe Image entre les mois d'août et de décembre 2002.
Ni acteur ni promoteur
Présentés à Lyon devant un auditoire essentiellement composé de représentants d'institutions, les résultats confirment l'enquête sur la décentralisation réalisée par « le Quotidien » dans son édition du 21 octobre et montrent que le projet du gouvernement, en la matière, embarrasse quelque peu les élus, concernant particulièrement la santé. En fait, dans ce domaine, l'Alsace semble avoir été « la seule région à prendre officiellement position en faveur de la décentralisation », a expliqué le Dr Yann Bourgueil, médecin de santé publique et coordinateur de cette enquête. Si les conseils régionaux interrogés ont déjà tous financé des actions en matière de santé, ils n'apparaissent pas pour autant comme des promoteurs de programmes. « Seule la région Nord - Pas-de-Calais fait aujourd'hui exception, dans la mesure où le conseil régional s'intéresse à la santé depuis les années soixante-dix et a su se doter d'une doctrine en la matière », poursuit Yann Bourgueil. Cette région est également la seule candidate au renforcement de ses compétences sur les questions de santé ; les autres envisagent éventuellement de développer des actions, mais uniquement dans les champs de compétence acquis, comme c'est le cas pour la formation en Rhône-Alpes ou de l'aménagement du territoire pour la Bourgogne.
Concernant leurs éventuels partenaires, les conseils régionaux se tournent spontanément vers les ARH ; les URCAM et les unions de médecins libéraux n'arrivent qu'en dernière et avant-dernière positions des instances citées.
Interrogés sur la façon dont ils envisagent la régionalisation, les conseils régionaux ne sont que cinq, sur les seize qui ont répondu, à opter pour un transfert de compétence vers des agences régionales de santé (ARS), projet évoqué par Jacques Chirac lors des élections présidentielle et législatives de cette année et auxquelles les élus seraient associés. Globalement, toutes les régions questionnées tiennent à préserver les fonctions régaliennes de l'Etat, ce qui explique sans doute l'attentisme des élus. En revanche, une inquiétude relative au transfert des moyens financiers est clairement exprimée : « Les élus ont peur de voir les inégalités régionales se renforcer, commente Yann Bourgueil, pour eux, la péréquation est une blague, ça ne marche pas. »
Régionaliser l'ONDAM
En clair, si le gouvernement actuel tend à souligner l'idée que la région serait le niveau le plus pertinent pour répondre aux besoins de la population, garantir l'équité et, pourquoi pas, maîtriser les dépenses de santé, la majorité des élus reste à convaincre. Et notamment ceux qui expriment leur crainte d'« une décentralisation de dupes », où l'Etat se défausserait sur les régions, à propos de problèmes restés sans solutions au niveau national. D'où l'idée d'expérimenter certaines mesures avant de les étendre aux régions, comme le suggère le député UMP du Rhône, Jean-Michel Dubernard, qui est aussi président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Egalement invité à s'exprimer, le député de la Vendée et secrétaire national UDF pour la santé, Jean-Luc Préel, auteur d'une proposition de loi relative à la régionalisation du système de santé en 2000, s'est montré plus téméraire. Il propose de régionaliser les objectifs de dépenses afin de rendre les usagers et les professionnels, « acteurs et responsables ». Quant au sénateur (PS) Gilbert Chabroux, dernier invité de ce débat, il a joué la carte du pragmatisme, en rappelant que la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades avait nettement fait avancer la régionalisation par la création des conseils régionaux de santé. « Cette mesure va dans le bon sens, a-t-il estimé, et il appartient à la nouvelle majorité de prendre les décrets d'application nécessaires. »
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