DE NOTRE CORRESPONDANTE
UNE PETITE BANDE visiblement bien organisée semble être à l’origine des agressions des professionnels de santé qui ont lieu depuis plusieurs mois à Vénissieux, dans le Rhône. La dernière en date remonte au mercredi 1er février aux alentours de 19 h 30 : «J’étais avec deux patients, en fin de consultation, lorsque deux individus gantés et cagoulés ont fait irruption dans mon cabinet», raconte Dominique Bost, kinésithérapeute à Vénissieux. «Nous nous sommes retrouvés ligotés avec du gros Scotch, à plat ventre, les mains attachées dans le dos, poursuit-il. Pendant que l’un nous tenait en joue, l’autre a fouillé le cabinet.»
Les deux individus ont pu dérober «un ordinateur portable, ma carte bleue ainsi que celles de mes patients et un téléphone portable», indique ce professionnel, qui précise avoir été contraint, avec ses patients, de fournir les codes des cartes de crédit. Avant de repartir, les agresseurs ont pris soin de neutraliser la ligne téléphonique du cabinet, de confisquer les clefs du véhicule de Dominique Bost, puis de bâillonner et d’enfermer leurs victimes dans le cabinet pour les empêcher de donner rapidement l’alerte.
«Quand nous avons pu nous libérer, une vingtaine de minutes plus tard, ils avaient déjà effectué des retraits au distributeur le plus proche», précise Dominique Bost. Une plainte a immédiatement été déposée par les victimes.
Près de 48 heures avant cette agression, le Dr Serge Bardin, qui exerce dans un cabinet situé à 500 m de celui de Dominique Bost, était lui aussi victime d’une bande agissant selon le même mode opératoire. Et, en novembre dernier, un médecin récemment installé à Vénissieux avait été victime d’une agression de ce type, en début de journée. «Depuis, il a dévissé sa plaque...», précise Dominique Bost.
Avertissement.
Alertés par cette recrudescence d’actes violents qui les visent tout particulièrement, les professionnels de santé exerçant à Vénissieux ont décidé de se mobiliser.
Un appel à la fermeture des cabinets médicaux, paramédicaux et des pharmacies a été lancé pour la matinée du jeudi 16 février. Une marche de protestation, au départ du quartier des Minguettes, est également programmée (1). L’objectif est de «lancer un avertissement à la population», souligne le Dr Pascal Dureau, généraliste à Vénissieux. «Aux Minguettes, tout passe par les réseaux, explique-t-il. Notre logique est de mettre ces événements au grand jour pour que les gens comprennent que si ces agressions ne cessent pas, ils devront aller se faire soigner ailleurs.» Une marche de solidarité avait déjà été organisée dans la même commune, et pour les mêmes raisons, le 2 décembre 1999. Elle faisait suite à une violente agression contre le Dr Olivier Fayet, généraliste à Vénissieux, et répondait au besoin de briser l’« omerta » autour de cette affaire puisque des personnes qui avaient reconnu les agresseurs avaient privé les enquêteurs de leurs témoignages. Ce fait divers avait notamment conduit les généralistes de la ville à proposer une permanence des soins plus sécurisée.
A peine trois ans plus tard, grâce au soutien actif de son maire André Gérin (PC), Vénissieux était la première commune de France à ouvrir une maison médicale de garde (MMG). Mais alors que des agressions perturbent à nouveau le bon déroulement des soins, la sécurité de cette maison médicale vient de prendre un sérieux coup : la diminution de son budget accordé par le Fonds d’aide à la qualité des soins de ville (Faqsv), qui devrait aboutir à la suppression du personnel d’accueil.
(1) Départ 10 h 30 à côté du château d’eau.
La manif contre la convention
Environ 80 généralistes exerçant surtout à Lyon et dans sa proche banlieue se sont rassemblés devant le nouveau siège de la Cpam à Villeurbanne, jeudi dernier, après l’appel lancé par MG-69 (« le Quotidien » du 9 février).
A grand renfort de pancartes, de slogans et d’affiches, ils ont exprimé leur malaise face à la nouvelle convention. Pour dénoncer la complexité des nouveaux textes et une paperasserie « décuplée», les manifestants ont brûlé un grand mannequin, noyé sous les formulaires de remboursement, symbole du «médecin traitant papier». «J’ai réalisé que c’est une nouvelle Sécu qui se met en place, avec des dispositifs de contrôle et de contraintes qui font froid dans le dos», a affirmé le Dr Alain Lichon, généraliste à Lyon.
De son côté, le Dr Bernard Rougier, généraliste à Tullins (38) et secrétaire général de l’Union régionale des médecins libéraux (Urml) de Rhône-Alpes, a souhaité nuancer les résultats de cette mobilisation en rendant publics les résultats d’une enquête «réalisée en urgence, par l’Urml et sous la responsabilité de son secrétaire général» et qui montre que sur 76 médecins contactés, un seul était réellement fermé pour cause de grève. On sait que, depuis le début de l’année 2004, les élus de MG-France ne siègent plus à l’Urml Rhône-Alpes : ils ont pris cette décision après une altercation avec le Dr Rougier.
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