Lors du Salon de gynécologie pratique, le Dr Gilles Dauptain, chef de service de la maternité de Gonesse (95), a animé un débat autour du « suivi partagé des grossesses ».
« La solution pour l'avenir, estime-t-il, c'est la création d'un réseau primaire avec l'ensemble des professionnels de la naissance. L'époque où l'accoucheur était un héros est révolue. La médecine ne peut plus être individuelle. Face à l'urgence démographique, il nous faut revoir l'organisation interne des maternités, le rôle des médecins, des sages-femmes, pour éviter l'utilisation inadéquate des compétences. » Une idée que partage la directrice de l'école de sages-femmes de Grenoble, Isabelle Ferrand, qui refuse d'être un « agent technique d'exécution », et demande aux médecins de laisser les sages-femmes faire ce à quoi elles ont été formées (par exemple la consultation du neuvième mois). La directrice encourage les sages-femmes de l'assistance à « reconstruire le suivi des grossesse physiologiques à la force du poignet ».
Le Dr Gilles Dauptain approuve cette initiative. « Si on ne mène pas nous-mêmes cette réflexion, ce sera fait à notre place, et mal, dit-il. Quand Jean-François Mattei parle de centres de proximité, on sent bien qu'il est à côté de la plaque ; c'est à nous de lui montrer ce qu'il faut faire. »
Pour les grossesses non pathologiques, le Dr Dauptain cite en exemple un système de suivi qui comprendrait sept consultations, dont deux seulement seraient effectuées par un médecin spécialiste. « Ce n'est qu'une piste de travail, certes un peu polémique. A nous d'aller plus loin dans la réflexion. »
Tanguy Kervran, du centre hospitalier de Lannion (22), propose pour sa part que la première consultation médicale soit longue, bien rémunérée et complète, avec recherche des antécédents, dépistage des facteurs de risque, informations sur le réseau de soins et le calendrier de surveillance. « On peut se demander s'il faut réglementer le suivi des grossesses normales, je ne suis pas sûr qu'il s'agisse là d'une bonne solution, car les médecins sont réfractaires à tout ordre reçu », poursuit Tanguy Kervran, qui penche pour la création d'un réseau transversal sans dépendance hiérarchique, avec un responsable alternativement issu du privé et du public, entouré par une cellule de pilotage. « Chaque patiente doit avoir un référent de suivi », dit-il en ajoutant qu'il n'est pas « sûr que les femmes météores constituent la solution ». Il fait allusion à l'idée du ministre selon laquelle les femmes volontaires seraient transférées dans des centres de périnatalité le lendemain de l'accouchement.
Si l'idée semble bien acceptée par tous les professionnels concernés, la constitution de réseaux de la naissance pose un problème non résolu pour l'heure : celui de l'assurance en responsabilité civile professionnelle. Car comment mutualiser le risque ? s'interroge un assureur. Les professionnels de la naissance risquent d'être opposés à ce concept, comme l'ont déjà été les ophtalmologues (ceux qui ne pratiquent pas d'actes chirurgicaux ont refusé de payer une prime plus élevée dans le cadre d'un contrat de groupe).
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