REFERENCE
Pourquoi faut-il réentraîner ?
Si le primum movens de l'insuffisance cardiaque reste une faillite de la fonction pompe cardiaque, incapable notamment d'augmenter le débit cardiaque à l'effort, la limitation fonctionnelle de ces patients est également d'origine périphérique, incluant des facteurs musculaires (quantitatifs et qualitatifs) et vasculaires (capacité limitée de vasodilatation artérielle dans les muscles actifs). Outre une probable toxicité de facteurs cataboliques inhérents aux désordres neuro-hormonaux de cette pathologie, cette limitation fonctionnelle est aggravée par un déconditionnement favorisé par les hospitalisations répétées et l'inactivité (souvent encore prônée par le corps médical).
En pratique, seuls les patients stabilisés depuis au moins trois semaines-un mois, sans signes de rétention hydrique, redevenus en stade II/III de la NYHA, peuvent intégrer un programme de réentraînement. Les centres de réadaptation sont en sous-effectif (seuls 20 % des infarctus récents sont réadaptés en France) mais commencent pour la plupart à « s'intéresser » à ces insuffisants cardiaques.
Les techniques
Les techniques de réentraînement se sont inspirées de celles validées chez les coronariens depuis déjà plusieurs décennies (phase d'échauffement, puis entraînement aérobie sur vélo plutôt que sur tapis roulant, récupération...), avec des particularités méthodologiques inhérentes à la fragilité de ces patients (souvent très limités à l'effort, avec des tensions artérielles de repos basses, s'élevant mal à l'effort, à risque arythmique important, et souvent plus âgés...). Des techniques spécifiques telles que le réentraînement respiratoire, l'interval training, et des activités de résistance douces (réadaptation segmentaire) sur des bancs de musculation adaptés sont également largement utilisées. L'évaluation initiale et la programmation du réentraînement passent par une consultation cardiologique spécialisée et le plus souvent une évaluation spécifique par épreuve d'effort couplée à la mesure des gaz expirés (VO2max).
Les contre-indications à respecter
Les Sociétés françaises et européennes de cardiologie ont édité des contre-indications strictes et des critères d'arrêt lors du réentraînement à respecter chez ces patients fragiles. Plus encore que pour les coronariens, une surveillance cardiologique spécialisée est nécessaire.
Mécanismes d'actions
Ces techniques de réentraînement ont un impact limité sur le coeur lui-même. Les évaluations écho-cardiographiques et IRM montrent en tout cas qu'elles n'aggravent pas ni la dilatation cavitaire ni la cinétique ventriculaire gauche. Le bénéfice fonctionnel passe essentiellement par une correction de la dysfonction endothéliale artérielle périphérique et une amélioration des capacités oxydatives des muscles périphériques.
Bénéfices
Chez ces patients très handicapés initialement, les gains obtenus de 20 à 30 % de la capacité d'effort (ou du pic de VO2) peuvent changer radicalement leur vécu quotidien. Les tâches domestiques ne sont plus insurmontables, la qualité de vie est souvent transformée. Les poussées d'insuffisance cardiaque, les hospitalisations sont diminuées. Cependant, actuellement, aucune étude multicentrique fiable n'a pu démontrer un gain sur la survie à long terme. Mais il est vrai qu'il a fallu inclure des milliers de patients coronariens pour démontrer chez eux le bénéfice du réentraînement physique !
Un travail de longue haleine
Actuellement, le réentraînement des insuffisants cardiaques reste limité par les possibilités d'accueil, une certaine inertie des pouvoirs publics, voire une réticence de l'environnement médical, même cardiologique. Ce travail des kinésithérapeutes et des réadaptateurs est un travail de longue haleine, avec des progressions lentes souvent émaillées de nouvelles poussées d'insuffisance cardiaque démateuse. Le bénéfice psychologique ressenti par les patients est également considérable. Ce réentraînement s'intègre d'ailleurs de plus en plus dans le cadre des réseaux qui se mettent en place pour la prise en charge globale et adaptée de cette pathologie malheureusement en augmentation constante.
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