Pour le Pr Christophe Cellier, l'expérience acquise à l'hôpital européen Georges-Pompidou montre que l'entéroscopie à double ballon permet une résection endoscopique satisfaisante des polypes de l'intestin grêle. Cette méthode peut être envisagée chez les patients à haut risque de cancer de l'intestin grêle.
L'ENTEROSCOPIE à double ballon, initialement développée au Japon en 2001 par H. Yamamoto et coll., permet, en combinant les insertions orale et anale, d'explorer la totalité du grêle dans 86 % des cas selon les données des équipes japonaise et européennes. Cette technique utilise un vidéo-endoscope muni d'un surtube flexible. Des ballonnets souples sont attachés à l'extrémité de l'endoscope et à l'extrémité distale du surtube. La progression au sein de l'intestin grêle se fait par la répétition de manoeuvres de poussée et de « retrait » de l'endoscope et du surtube.
L'entéroscopie à double ballon est principalement utilisée pour déterminer le diagnostic étiologique de saignements digestifs chroniques obscurs. L'efficacité de cette méthode est alors sensiblement comparable à celle de la vidéocapsule endoscopique, c'est-à-dire qu'elle permet de 60 à 80 % de diagnostics positifs. Par ailleurs, elle permet, théoriquement, du moins, la réalisation d'une polypectomie dans l'intestin grêle, ce que l'entéroscopie poussée ne permet pas. Dans ce contexte, la faisabilité et les complications de la polypectomie du grêle sont encore mal évaluées.
L'expérience acquise à l'hôpital européen Georges-Pompidou entre 2004 et 2006 porte sur 10 patients pour lesquels un traitement endoscopique de polypes du grêle a été réalisé par voie haute à l'occasion d'une endoscopie à double ballon. Les indications de ces actes étaient un syndrome de Peutz-Jeghers dans 4 cas, un cancer du côlon héréditaire non polyposique (syndrome Hnpcc) chez deux malades, une adénomatose hépatique familiale, deux cas d'anémie ferriprive et un cas de méléna.
L'entéroscopie à double ballon a permis de visualiser 28 polypes chez les 10 sujets de la série. Ils étaient sessiles dans 7 cas et pédiculés dans 21 autres cas. Leur diamètre moyen était de 27 mm. La localisation était : duodénum pour 8 d'entre eux, jéjunum proximal pour 10, jéjunum médian pour 4 et jéjunum distal pour 6.
Le traitement endoscopique a été récusé chez un patient en raison du nombre de polypes (n = 10). En revanche, le traitement endoscopique a été effectué pour 17 des 18 autres polypes. Une résection endoscopique à l'anse diathermique a été réalisée dans 13 cas sur 18, dont deux mucosectomies. La résection a été complète dans 12 des 13 cas. Quatre polypes ont été détruits par plasma argon.
Un traitement le plus souvent satisfaisant.
Une analyse histologique était disponible pour 21 des 28 polypes : il s'agissait de 17 hamartomes, de 3 adénomes, dont 2 en dysplasie de bas grade et 1 en dysplasie de haut grade, et de 1 lipome. Les hamartomes avaient un contingent adénomateux en dysplasie de bas grade dans 3 cas.
L'absence d'examen histologique s'explique par les 4 destructions au plasma argon, l'absence de récupération d'un polype et une interruption de l'acte dans le dernier cas.
Au total, le traitement endoscopique a été considéré comme satisfaisant chez 8 patients sur 10 et un traitement chirurgical complémentaire a été proposé chez deux malades. Deux cas d'hémorragie après polypectomie (d'évolution favorable) et une pancréatite aiguë (score de gravité de Balthazar coté D) ont été observés. D'une manière générale, par ailleurs, en dehors de la résection des polypes, il n'a pas été observé de complication mortelle avec l'entéroscopie à double ballon.
Deux complications ont été rapportées dans l'expérience initiale japonaise. Il s'agissait de perforations multiples chez un patient ayant un lymphome intestinal et d'un épisode fébrile avec douleurs abdominales matérialisant une perforation chez un patient ayant une maladie de Crohn. La pancréatite observée dans la série de l'hôpital européen George-Pompidou est à rapprocher d'autres complications similaires récemment rapportées. Elles avaient été expliquées par une hyperpression duodénale au niveau de la région papillaire.
Ainsi, l'entéroscopie à double ballon permet la résection endoscopique de polypes de l'intestin grêle chez les patients à haut risque de cancer de l'intestin grêle, comme en cas de syndrome de Peutz-Jeghers, de cancer du côlon héréditaire non polyposique ou d'autres polyposes.
D'après un entretien avec le Pr Christophe Cellier, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.
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