M. Crichton, R. Rendell, P. Cornwell, J. Higgins
TRANSFUGE de la médecine, Michael Crichton a suscité une belle polémique aux Etats-Unis en publiant «Etat d’urgence»(1), un techno-thriller qui vise à montrer que les organisations écologistes créent de fausses peurs pour leurs propres besoins.
Chiffres à l’appui, il cherche notamment à convaincre le lecteur que, si le réchauffement climatique est réel, il n’est pas et ne sera pas aussi important qu’on l’affirme et que l’homme n’en est pas le premier responsable. Il fait aussi des écologistes des menteurs, des manipulateurs et des terroristes.
Michael Crichton se défend d’avoir relayé les thèses de George W. Bush, des compagnies pétrolières et des néoconservateurs hostiles à la ratification du protocole de Kyoto. «Il est primordial de réexaminer nos priorités environnementales... J’espère qu’à la fin, quand la controverse se sera estompée, les effets du livre seront positifs. Le sujet a été politisé dans un mauvais sens. C’est un enjeu scientifique, et ce n’est pas un bien que d’en avoir fait un enjeu bassement politicien», rétorque-t-il à ses détracteurs. Dont acte.
Mais il vaut mieux en l’occurrence s’en tenir au mot « roman » qui figure sur l’ouvrage, et considérer « Etat d’urgence » comme une nouvelle pierre à l’édifice de techno-thrillers qu’il édifie depuis 1969 et la parution de « la Variété Andromède », l’histoire d’un virus mortel venu de l’espace. Depuis, il y a eu une dizaine de best-sellers dont « Sphère », « Jurassic Park », « Harcèlement », « Prisonniers du temps », « la Proie », sans oublier la série télévisée « Urgences », qui s’appuient pour la plupart sur des bases scientifiques, comme la primatologie, la neurobiologie, la biophysique, la génétique.
La fiction du jour, donc, commence par la disparition d’un milliardaire philanthrope alors qu’il vient de retirer son soutien financier à un mouvement écologiste international. Meurtre ou accident ? Deux fidèles, son assistante et un avocat, héros modèles par excellence, entreprennent au péril de leur vie de trouver le fin mot d’un message énigmatique qu’il a laissé. Un périple qui les conduit dans les glaces de l’Antarctique, dans les déserts de l’Arizona et dans les forêts vierges de Mélanésie tandis qu’en face d’eux un ennemi multiforme est prêt à déclencher tremblements de terre, tsunamis et autres cyclones pour prouver que la Terre est en danger. Science sans conscience, que de pages n’écrit-on pas en ton nom !
Le mors aux dents.
Ruth Rendell est, elle, experte du thriller psychologique. Depuis son premier roman, « Un amour importun », en 1964, point de départ des enquêtes de l’inspecteur Wexford, elle a publié une soixantaine de récits qui sont traduits dans plus de vingt-cinq pays.
Bien qu’assistant tous les après-midis aux séances de la Chambre des lords depuis qu’elle a été nommée pair en 1997 – elle est particulièrement engagée dans la lutte contre l’illettrisme et défend activement les droits des femmes et des enfants –, elle ne poursuit pas moins activement sa peinture de la société britannique d’aujourd’hui à travers ses romans à suspense.
Le dernier en date, «Rottweiler» (2), n’a rien à voir avec le triste milieu des combats de chiens mais avec un tueur de jeunes femmes que les médias avaient ainsi surnommé parce que la première victime portait une trace de morsure sur le cou ; que la police ait identifié l’ADN comme étant celui de son petit ami n’y a rien changé. Ce qui est certain, c’est qu’il les étranglait avec un lacet et qu’il dérobait à chacune un petit accessoire.
Ruth Rendell nous entraîne dans le périmètre du dernier meurtre, dans le quartier de Marylebone, à Londres, tout près de la boutique d’antiquités d’Inez Ferry et sa jeune employée de toute beauté Zeinab. Depuis la mort de son mari – auquel elle voue toujours un culte secret –, la dame complète son modeste revenu en prenant des locataires au-dessus de la boutique.
Autant de personnages réunis par le fait du hasard et qui, chacun d’une certaine façon, ont un comportement étrange ou quelque chose à cacher, du jeune Will un peu « retardé » au trop « clean » Jeremy Quick en passant par l’insupportable Freddy... Aussi, lorsqu’Inez découvre plusieurs objets ayant appartenu aux mortes dissimulés dans son magasin, la tension monte-t-elle d’un cran...
OEil pour oeil.
Réglée comme un métronome, Patricia Cornwell délivre avec «Sans raison» (3) une nouvelle enquête de son héroïne récurrente, le docteur Kay Scarpetta. Depuis « Postmortem », en 1991, qui lui a valu un succès fulgurant tant en France qu’outre-Manche et outre-Atlantique, elle a publié treize autres romans mettant en scène ce médecin légiste.
Qui est cette fois confrontée à la disparition, dans une maison tranquille, de quatre personnes, dont deux enfants, et bientôt à l’assassinat d’une vieille femme dans une maison voisine.
Autour de Kay Scarpetta, qui officie depuis son bureau de Hollywood, en Floride, évoluent ses proches habituels.
Son amant, Benton Wesley, psychologue spécialisé en criminologie, qui, à Boston, travaille sur un programme de recherche portant sur les déterminants préfrontaux de la réactivité agressive manifeste, dont l’acronyme made in USA n’est autre que PREDATOR ; il interroge dans ce cadre un certain Basil Jenrette, meurtrier compulsif de trente-trois ans.
Sa nièce Lucy, qui a créé l’Académie nationale de sciences médico-légales que dirige Kay, motarde et pilote d’hélicoptère, homosexuelle et, dans ce nouvel opus, malade ; elle s’interroge d’ailleurs sur la mort – suspecte – de son médecin. Sans oublier l’ineffable Marino, gros ours mal léché mais enquêteur criminel de premier ordre.
Toutes ces affaires morbides vont finalement converger vers la piste d’un tueur en série semblant agir sans raison et qui distille des informations dont Kay ignore si elles visent à la mettre sur sa piste ou à l’égarer ; il dit s’appeler Odd, ou Ode – OEil de Dieu peut-être.
Pour Jack Higgins, auteur de best-sellers internationaux traduit en cinquante-cinq langues – plus de vingt-cinq titres sont disponibles en français –, le temps s’est arrêté. «Pas de pitié» (4) nous ramène au bon vieux temps de la guerre froide et des récits d’espionnage manichéens, même si les chefs d’Etats ont changé.
On retrouve ainsi le général Charles Ferguson, qui dirige une unité de renseignement indépendante, et son homologue américain, Blake Johnson, dans une conférence au sommet après qu’ils ont appris la « résurrection » de Josef Belov, le milliardaire à la tête du groupe Belov international, qui avait été autrefois colonel du KGB et qui s’était allié aux irréductibles de l’IRA avant d’être abattu. Or, voilà que le mort-vivant – en réalité un acteur contraint de tenir ce rôle – réapparaît à Londres afin de signer bientôt le « protocole Belov ». Ce qu’il faut empêcher à tout prix.
C’est Sean Dillon, jadis l’un des activistes de l’IRA les plus redoutés et désormais le bras droit de Ferguson, qui va mener l’affaire. Non seulement parce que c’est lui qui avait effectivement éliminé Belov mais parce qu’il se sent aussi responsable de la mort d’Hannah Bernstein, une enquêtrice blessée au cours de l’opération et que des sbires de l’IRA ont ensuite froidement achevée sur son lit d’hôpital. De l’Irlande à l’Algérie, de l’Angleterre à Moscou, Dillon et ses comparses traquent l’ennemi en souvenir d’Hannah.
(1) Editions Robert Laffont, 647 p., 22 euros.
(2) Editions des DeuxTerres, 426 p., 22,50 euros.
(3) Éditions des Deux Terres, 449 p., 22,50 euros.
(4) Editions Albin Michel, 382 p., 19,50 euros.
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