Les pneumologues français « déclarent la guerre » à la broncho-pneumopathie obstructive (BPCO). Cette affection grave, insidieuse et chronique est en effet encore trop peu connue du public et des médecins. De ces lacunes, il résulte une mauvaise prise en charge tant en matière de prévention (tabagisme) que de diagnostic. Le retard à la reconnaissance de la maladie entraîne une inadéquation thérapeutique, les malades étant le plus souvent diagnostiqués à un stade de handicap lourd et définitif, en état de dépendance à un apport d'oxygène.
Pour ces raisons, sous l'égide de la Société de pneumologie de langue française (SPLF), des groupes de travail ont été mis en place afin de dresser un état des lieux des populations à risque et des facteurs déclenchants ou aggravants de la BPCO. Dans un deuxième temps, ces experts seront chargés de rédiger un « livre blanc » de la BPCO en France. La SPLF a aussi prévu de mener des campagnes d'information, tant auprès des médecin généralistes - en première ligne du dépistage et du diagnostic - que de la population générale. En outre, des programmes de recherche, soutenus par la SPLF, seront développés afin d'améliorer la prise en charge et le pronostic de la maladie.
15 000 décès recensés chaque année
Actuellement, en France, la BPCO représente la troisième cause de mortalité d'origine médicale avec près de 15 000 décès recensés chaque année. Cette maladie se définit par une diminution non réversible des débits expiratoires provoquée par une obstruction progressive des bronches. Cliniquement, il apparaît dans un premier temps une dyspnée d'effort, puis de repos ; il peut s'y associer un emphysème lié à une altération progressive du tissu élastique pulmonaire.
Un fumeur sur cinq, âgé de plus de 40 ans, est atteint de BPCO. On estime qu'en France actuellement 2,5 millions de personnes en sont atteintes et que, parmi elles, il existe 30 000 insuffisants respiratoires chroniques traités à domicile par une oxygénothérapie ou une ventilation assistée. Le sex-ratio est estimé à une femme pour cinq hommes. Un chiffre qui s'explique surtout du fait des différentes habitudes tabagiques, mais qui se modifie avec le développement du tabagisme chez la femme. Globalement, 30 % des fumeurs développent une BPCO alors que 70 % sont épargnés. Il semblerait que la sensibilité des sujets à l'inflammation provoquée par le tabac soit en cause dans le développement des phénomènes bronchiques.
Eviction des facteurs de risque
« Le traitement de la BPCO est actuellement bien codifié : éviction des facteurs de risque, prescription médicamenteuse et mise en place, dans les formes avancées de la maladie, de thérapeutiques spécifiques, telles que la réhabilitation respiratoire et, dans certains cas, des interventions chirurgicales », explique le Pr Michel Fournier (hôpital Beaujon, Clichy). Seul l'arrêt total du tabac peut limiter le déclin de la fonction respiratoire et une aide personnalisée doit être proposée aux fumeurs motivés, dans le cadre d'une consultation antitabac.
Les traitements symptomatiques médicaux ont pour but de réduire la gravité des symptômes et sont prescrits dans les affections déjà évoluées : bonchodilatateurs (en aérosols ou poudres à inhaler), corticoïdes (dans les formes très évoluées ou associées à un asthme) et fluidifiants bronchiques. En outre, diverses mesures préventives permettent de diminuer l'incidence et la gravité des poussées évolutives de la BPCO : traitement des foyers infectieux du sinus et des dents, vaccination contre la grippe (tous les ans) et contre le pneumocoque tous les cinq ans. Les poussées (exacerbations) de la BPCO requièrent en général des antibiotiques. « Dans le cadre d'une réhabilitation respiratoire, une prise en charge plus globale par une équipe pluridisciplinaire peut être proposée. Elle vise à diminuer la dyspnée en réhabilitant les muscles respiratoires et en apprenant à utiliser l'ensemble des capacités respiratoires », continue le Pr Fournier.
Enfin, des traitements chirurgicaux sont indiqués dans des situations très particulières : chirurgie de l'emphysème, notamment des grosses bulles des parties hautes des poumons, et transplantation pulmonaire chez des patients jeunes, très motivés, dont l'affection est évoluée. Actuellement, une trentaine de malades sont transplantés annuellement en France.
Précoce et sévère chez la femme
Comme chez l'homme, le tabagisme représente le facteur essentiel responsable de la BPCO chez la femme.
Les hommes et les femmes ne sont pas égaux devant les maladies bronchiques (asthme et BPCO). Ces dernières, en effet, développent, plus souvent et plus facilement, des formes précoces et sévères de la maladie.
La BPCO est généralement sous-diagnostiquée chez la femme, les médecins évoquant d'abord une pathologie asthmatique. Le diagnostic est donc généralement plus tardif et le caractère de la maladie est plus sévère d'emblée.
En France, 31 % des femmes fument.
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