Les MAIA, guichets uniques LE Dr JEAN-PHILIPE FLOUZAT, gériatre, était l’un des onze membres de la commission Ménard. Il est actuellement conseiller technique à la Direction générale de l’action sociale (DGAS). Il revient sur la mesure numéro 6 du plan Alzheimer, qui incite à favoriser le maintien à domicile. « Il faut retarder l’entrée en institution des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et donc permettre aux aidants d’apprendre certains gestes simples, la communication non verbale…, ce qui impliquera des modifications réglementaires qui devraient voir le jour début 2009. » Pour lui, les formations des professionnels sont insuffisantes, voire inexistantes. « Nous devons envisager la création d’équipes spécialisées pour intervenir à domicile. Elles doivent être formées. Nous sommes en train d’élaborer un référentiel, qui devrait voir le jour début 2009. » Les MAIA (Maison pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer), indiquées dans la mesure 4 du plan joueront le rôle de porte d’entrée unique, selon lui, grâce au soutien du conseil général, des collectivités locales, des services de l’État et de l’ensemble des acteurs du secteur sanitaire et médico-social. Aujourd’hui, plus de cent dossiers MAIA ont été reçus, huit projets ont été retenus pour l’expérimentation lors d’une première sélection et une quinzaine le seront au total. « Ces expérimentations devraient nous fournir d’ici deux ans une boîte à outils, qui permettra de généraliser les MAIA. » Seront associés à ces MAIA des professionnels, les « gestionnaires de cas » ou « coordonnateurs », uniquement pour les situations complexes. Issus du milieu sanitaire ou médico-social, ils seront les interlocuteurs privilégiés des familles. « Le plan ne comporte pas que ces deux mesures, il prévoit aussi des formules de répit innovantes. Nous allons mettre en place des palettes variées. Quant au diagnostic, un groupe travaille sur la mise en place d’un dispositif d’annonce et d’accompagnement qui devrait voir le jour courant 2009. » Une vision trop médicalisée BERNARD ENNUYER, chargé de cours sur le vieillissement à l’ENSP (École nationale de santé publique) de Rennes, Lille, Paris-V, Marseille, dirige par ailleurs une association d’aide à domicile dans le 17e arrondissement, les Amis. Pour le sociologue, le plan Alzheimer exprime une « vision médicale, individuelle, spécialisée » à laquelle il oppose une vision « sociale, collective, spécialisée ». « J’ai lu le rapport Ménard, je l’ai lu avec attention. c’est un rapport de spécialistes. Mais pourquoi n’avoir pas interrogé de sociologues ? Sur 150 personnes consultées, une seule juriste, une seule économiste. » « Nos sociétés développent des crises de pathologie sociale de la raison. Mettre en place des MAIA, des gestionnaires de cas spécialisés… tout cela me parait une grosse bêtise, dit Bernard Enuyer. On ne gère pas les gens, on les accompagne. Les MAIA seront-elles une nième structure pour chapeauter celles d’en-dessous ? Cette spécialisation me semble le corollaire d’une forme de ségrégation… pourquoi isoler la démence d’autres pathologies qui demandent, elles aussi, un accompagnement important ? Je revendique la polyvalence. » « Aujourd’hui, tant que l’APA (allocation personnalisée d’autonomie) sera insuffisante (elle s’élève à 509 euros en moyenne), tant qu’elle n’atteindra pas le niveau de la PCH (prestation compensatoire du handicap, créée par la loi du 11 février 2005) c’est-à-dire 1 200 euros », le sociologue ne voit pas« comment on pourra correctement accompagner les personnes à domicile. Cela coûterait cinq millions de plus ? Et bien, moi, je réclame cinq millions supplémentaires. Je crois qu’il nous faut banaliser la démence dans une société folle. » Lutter contre la stigmatisation MARIE-JO GUISSET-MARTINEZ est responsable du pôle Initiatives locales à la Fondation Médéric Alzheimer (qui aide des aidants des personnes atteints de la maladie d’Alzheimer ou troubles apparentés liés au vieillissement). « La créativité qui s’exprime en France, vu les moyens dont on dispose, est telle que les professionnels n’ont pas à rougir par rapport à ce qui se passe outre nos frontières, estime-t-elle. Mais ailleurs, j’ai constaté que l’Alzheimer est considéré comme une maladie comme les autres, elle n’est pas taboue, du coup ils sont dans le’vivre ensemble’. Aux États-Unis, par exemple, il existe des groupes de paroles de patients, les malades occupent des sièges au sein des associations… Tout cela conditionne grandement la façon de voir ces personnes et donc de concevoir les services qu’on leur propose. Il faut lutter contre la stigmatisation. » Elle propose par ailleurs la création de lieux de rencontres dans la ville, sur le principe des cafés Alzheimer qui fleurissent aux Pays-Bas. › AUDREY BUSSIÈRE Ces trois experts se sont exprimés lors de la journée d’étude et d’échanges à Paris de la fédération ADESSA, réseau des associations d’aide à domicile. |
Le Quotidien du Médecin du : 18/12/2008 |
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature