Il N'EST PAS DANS LES habitudes d'un président de la République de recevoir à l'Elysée les syndicats de médecins. C'est chose faite depuis lundi.
Pendant trois quarts d'heure, Nicolas Sarkozy s'est entretenu avec le président de la CSMF et les Drs Jean-François Rey et Michel Combier, représentants des branches spécialiste et généraliste de la Confédération.
Par la réception de la CSMF, le président de la République a réaffirmé, selon les propres termes du communiqué de l'Elysée, «que les représentants des professionnels de santé seront pleinement associés aux concertations, avec l'ensemble des acteurs du système de santé, pour garantir l'accès aux soins de tous les Français, mettre en place les agences régionales de santé, réformer l'hôpital et ramener durablement à l'équilibre l'assurance-maladie».
Le président de la République a précisé, en présence de trois de ses conseillers – Raymond Soubie, conseiller social, Bertrand Martinot, chef du pôle « santé » et Julien Samson, chef du pôle « protection sociale » –, les grandes lignes des réformes qu'il entend mener d'ici à la fin de l'année. «Le président a souligné que c'est l'absence d'argent dans les caisses qui motive ces réformes et les rendent urgentes», souligne Michel Chassang.
Financement de l'assurance-maladie : une priorité.
La réforme du financement reste une priorité du chef de l'Etat qui a annoncé son souhait d'aboutir avant l'automne 2008. Nicolas Sarkozy souhaite s'attaquer au financement de l'assurance-maladie en revoyant le système des affections de longue durée (ALD) – qui représentent plus de 50 % des dépenses – et en redéfinissant le panier de soins, c'est-à-dire définir «ce qui relève de la solidarité nationale et ce qui doit relever des assurances privées et complémentaires».
Lors de cet entretien, le président de la République a réaffirmé son attachement à l'accès aux soins. Après les multiples polémiques des derniers mois autour des dépassements tarifaires pratiqués par certains spécialistes, il a demandé à ses conseillers de travailler sur la mise en place du secteur optionnel, «en commençant d'ores et déjà par les établissements privés».
Le président de la CSMF relève que Nicolas Sarkozy s'est montré favorable à une «hiérarchisation des consultations» à travers la mise en oeuvre de la classification commune des actes médicaux (CCAM) clinique. «Le président a indiqué qu'il était juste et légitime de ne pas rémunérer de la même façon une consultation courte au cours de laquelle on renouvelle une ordonnance et une consultation complexe qui nécessite plus de temps», confie le Dr Chassang. Parmi les grands chantiers annoncés par le chef de l'Etat : la réforme de l'hôpital devrait tenir une grande place. La carte sanitaire devrait ainsi être revue, de même que l'organisation de l'hôpital, en redéfinissant notamment la place des médecins libéraux en son sein. Les représentants de la Confédération ont noté que Nicolas Sarkozy restait très attaché à la médecine libérale « à la française ».
«Il n'est pas question pour lui de se diriger vers un système de santé de type britannique», souligne le Dr Jean-François Rey, qui s'inquiétait depuis plusieurs semaines, et plus particulièrement depuis le début des états généraux de l'organisation des soins (EGOS), d'une telle dérive.
Démographie : vers des mesures « désincitatives » ?
Le président de la République a profité de cet entretien pour rappeler certaines préoccupations concernant l'accès aux soins. Il a ainsi reproché au corps médical de ne pas participer et de ne pas s'impliquer suffisamment dans la permanence des soins de certaines zones (lire aussi page 4). Il a ainsi souligné les difficultés de remplir certains tableaux de garde. Il a surtout regretté la « frilosité » des médecins libéraux en matière démographique, jugeant «indispensable la mise en place de mesures de désincitation dans les zones excédentaires».
Les médecins ne sont donc toujours pas à l'abri de telles mesures, comme l'avait déjà affirmé Roselyne Bachelot lors de la conclusion de la première phase des états généraux de l'organisation de la santé (EGOS).
Cet entretien, qualifié « d'historique » par la CSMF, met en perspective les réformes à venir. Il permet également de montrer à la CSMF que le gouvernement compte sur son soutien pour les réformes à venir après que le syndicat s'est montré très sévère contre le PLFSS 2008 et réservé quant à la tenue des EGOS. La CSMF avait exprimé à plusieurs reprises ses craintes d'assister à une nationalisation de la médecine libérale et de voir se mettre en place, à l'échelle nationale et de façon uniforme, des maisons de santé et un salariat comme modèles uniques qui mettraient à mal le paiement à l'acte.
«Cette entrevue a été constructive et nous attendons le contenu des textes qui nous seront proposés pour voir si nos propositions ont été suivies», prévient le Dr Chassang. Le président de la CSMF note que le président de la République a donné une impulsion à ses collaborateurs en leur donnant notamment «des instructions pour mettre en chantier le secteur optionnel et la CCAM clinique». Le président n'a en revanche donné aucune assurance du passage de la consultation des généralistes à 23 euros en 2008, tel qu'il l'avait promis il y a un an lors de la campagne présidentielle. De même, le chef de l'Etat n'a pas abordé les revalorisations des spécialités pénalisées par la mise en place du parcours de soins en 2004.
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