Au mois d'août, Philippe Douste-Blazy a fait parvenir un courrier aux syndicats de pharmaciens d'officine, ainsi qu'à l'association Gemme qui regroupe les principaux laboratoires pharmaceutiques fabriquant des génériques.
Il y les encourageait vivement à développer plus encore la vente des médicaments génériques, grâce, notamment, au droit de substitution dont disposent les pharmaciens. Et brandissait la menace d'appliquer le tarif forfaitaire de responsabilité (TFR, qui consiste à fixer un tarif unique de remboursement quel que soit le prix du médicament) aux groupes génériques dont la pénétration serait jugée insuffisante : « Nous avons demandé au président du Comité économique des produits de santé (Ceps), écrit notamment le ministre, de n'appliquer le TFRque lorsque la vitesse de pénétration des génériques est insuffisante pour engranger le bénéfice attendu de la tombée des brevets. Cela signifie pour les nouveaux groupes que le TFR s'appliquerait seulement si, après environ un an, la part de marché en volume des génériques n'atteint pas 50 %, voire 60 % pour les molécules à fort chiffre d'affaires, et pour lesquelles la montée du générique est naturellement plus rapide. »
Le défi est simple : depuis qu'ils ont obtenu en 1999 le droit de substituer auprès du patient un médicament princeps prescrit par le médecin par son équivalent générique (source d'économies pour l'assurance-maladie), les pharmaciens bénéficient d'un « bonus » leur permettant de vendre un générique avec la même marge que s'il s'agissait d'un princeps. Si la « menace » du ministre de la Santé d'appliquer le TFR était mise à exécution, les pharmaciens ne pourraient pas conserver les mêmes marges et seraient pénalisés financièrement.
Quant aux fabricants de génériques, ils seraient également pénalisés par le TFR, dans la mesure où un certain nombre de patients, à remboursement égal, pourraient préférer se soigner avec le princeps plutôt qu'avec sa copie. Si bien que l'association Gemme a fait parvenir aux pharmaciens d'officine une liste de « 38 molécules à substituer en priorité », qui correspond peu ou prou à la liste des molécules à plus fort chiffre d'affaires.
Pour Bernard Capdeville, président de la Fédération des syndicats de pharmaciens de France (Fspf), le ministre aurait intérêt à manier le TFR avec précaution, « car il sait que ça pourrait causer la mort du générique ». Plus généralement, la Fspf va prochainement se rapprocher du Comité économique des produits de santé, « pour analyser le marché du générique et cibler les molécules à privilégier ». Malgré tout, le responsable de la Fspf estime que, en dehors de molécules extrêmement populaires comme l'oméprazole, il est rare que les génériques arrivent au bout d'un an de mise sur le marché à des taux de pénétration de 60 %, mais veut espérer que le ministre regardera autant la tendance des taux de pénétration que les chiffres eux-mêmes. « Je crois malgré tout que l'objectif assigné par le ministre est atteignable, conclut Bernard Capdeville (1) ; maisles médecins ne s'intéressent que peu à la prescription en dénomination commune et se contentent de laisser les pharmaciens substituer. Il va donc falloir que les officinaux se bougent. »
(1) Bernard Capdeville quittera la tête de la Fspf le 23 novembre prochain sans solliciter de renouvellement de son mandat. A cette date, il deviendra membre du Conseil économique et social.
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