Décidément, l'accord de revalorisation tarifaire conclu le 21 juin entre les pédiatres libéraux et l'assurance-maladie n'en finit pas de jeter le trouble. Après son contenu, ce sont les modalités d'application de cet accord, signé par le Syndicat national des pédiatres libéraux (SNPF), la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) et le Syndicat des médecins libéraux (SML), qui sont aujourd'hui contestées par les praticiens de la spécialité.
Considéré par le SNPF lui-même comme un pis-aller en attendant les prochaines négociations conventionnelles (« le Quotidien » du 26 juin), l'accord devait entrer en vigueur le 15 juillet dernier dans son intégralité. Or seulement une partie des mesures prévues sont parues au « Journal officiel »... du 2 août. Il s'agit notamment de la majoration de 5,13 euros (« forfait pédiatrique » ou FP remboursé à 100 % par les caisses) applicable aux consultations ou visites pour les bébés âgés de 0 à 24 mois inclus. Le tarif des consultations pour la petite enfance, qui représentent 45 % de l'activité des pédiatres, passe donc de 22,87 à 28 euros.
En réalité, le forfait pédiatrique n'est entré en vigueur que le 4 août car les caisses appliquent toujours les nouveaux textes « un jour franc » après leur parution au « Journal officiel », souligne la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM).
En contrepartie du nouveau forfait pédiatrique, les pédiatres libéraux s'engagent désormais à libeller leurs prescriptions en DCI. Comme les médecins généralistes, ils doivent viser l'objectif de 25 % de lignes de prescriptions médicamenteuses en DCI en moyenne nationale, dont au moins 12,5 % entrant dans le répertoire des génériques, et cela pendant une période transitoire d'un an à compter du 15 juillet 2002.
Le reste des mesures de l'accord des pédiatres libéraux doit faire l'objet d'un arrêté de nomenclature, qui vient seulement d'être examiné par les administrateurs de la CNAM et devrait être publié dans les prochains jours. Les pédiatres doivent donc patienter avant de facturer une majoration cotée K14 (soit 26,88 euros) pour leurs actes de petite chirurgie réalisés en urgence au cabinet. De même, l'alignement de la tarification de leurs visites de nuit sur les récentes majorations accordées aux médecins généralistes (visites facturées 35 euros entre 20 heures et minuit, puis entre 6 et 8 heures, et 40 euros entre minuit et 6 heures) reste virtuel malgré les promesses du mois de juin.
Le Dr Francis Rubel, président du SNPF, estime que les pouvoirs publics « ont un peu traîné » pour appliquer l'accord de bonnes pratiques et de bon usage des soins (AcBUS) des pédiatres, dont les termes avaient été finalisés le 11 juillet. Au ministère de la Santé, on soutient au contraire qu' « un texte transmis le 12 juillet ne pouvait en aucun cas sortir au "JO" le 15 ».
Menaces de déconventionnement
Quoi qu'il en soit, « tous les pédiatres libéraux appliquent les nouveaux tarifs depuis le 15 juillet », affirme le Dr Rubel. Un empressement qui, selon lui, n'est pas étranger à la publicité faite autour de l'accord de juin, à la demande même du directeur de la CNAM, Daniel Lenoir. « Maintenant, nous avons plein d'histoires avec les caisses ici ou là, c'est scandaleux », martèle le Dr Rubel qui suit de près les dossiers des pédiatres menacés de déconventionnement par les CPAM de Nantes et d'Epinal, entre autres. « Certaines caisses ont refusé de rembourser [pour les actes réalisés avant le 4 août, NDLR] non seulement le forfait pédiatrique mais aussi la consultation. Il est inadmissible que les parents des jeunes patients subissent cela ! »
Jusqu'au début du mois de septembre, le SNPF « ne veut pas trop envenimer les choses et essaye de régler ces problèmes régionalement ». Mais, « il est hors de question qu'il y ait une quelconque mesure de rétorsion contre un quelconque pédiatre libéral », prévient le Dr Rubel car « on ne peut pas démarrer des négociations conventionnelles dans un tel climat ». Si les mesures de rétorsion sont maintenues, le SNPF « se retournera contre l'assurance-maladie, avec le soutien des centrales syndicales », précise le Dr Rubel, qui est aussi secrétaire général de l'UMESPE, la branche spécialiste de la CSMF.
Le mécontentement est également perceptible chez les farouches opposants à l'accord des pédiatres.
Le Collectif des pédiatres libéraux, « mouvement associatif » qui affirme représenter « 650 pédiatres sur 2 800 », continue de revendiquer « 35 euros minimum » pour toutes les consultations de ces spécialistes et appellent les pédiatres du secteur I à appliquer des dépassements d'honoraires (DE). Quant à la Fédération des médecins de France (FMF), qui préfère l'ouverture du secteur II à « un simulacre de revalorisation », elle « soutient sans réserves » les pédiatres « inquiétés » par les CPAM de Corse-du-Sud, de Savoie et de Loire, « pour des dépassements d'honoraires [DE] qu'ils n'ont même pas pratiqués ! ».
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