Si, en France, les enfants sont généralement en bonne santé, des points noirs persistent ça et là, du fait d'une absence de prise en charge. Selon l'Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA), il est temps d'avoir « une vision unitaire de l'enfant » en considérant à la fois son environnement familial scolaire et social.
« L'enfant n'est pas source de dépenses, mais un investissement pour l'avenir », écrit-elle au chef du gouvernement et à Jean-François Mattei. Et de poursuivre : « Nos enfants seront les adultes de demain et la qualité des soins que nous leur apportons aujourd'hui conditionne leur bonne santé future. En voulant faire des économies, le système à venir ne doit pas rompre un équilibre déjà fragile, en particulier pour ce qui concerne le suivi néonatal, les consultations d'urgences, l'accompagnement extrahospitalier des affections graves ou bien encore les nécessaires démarches de prévention et de dépistage. »
Le Dr Brigitte Virey, présidente de l'association, énonce pour « le Quotidien » toute les faiblesses, qui, si elles ne sont pas corrigées, risquent de coûter très cher demain. Le taux de prématurité est passé de 6,8 % en 1998 à 7,2 % en 2002. La mortalité périnatale et infantile stagne, plaçant la France au treizièe rang mondial. L'allaitement maternel demeure insuffisant, avec 50 % des enfants allaités à la naissance et 5 % à 4 mois, contre respectivement 98 % et 64 % en Suède. Un nouveau-né sur mille est atteint de surdité profonde, et un sur cinq cents connaît une baisse auditive durable avant l'âge adulte. Plus de 20 % des jeunes de 5 ans ont eu une otite muqueuse bilatérale avec un retentissement auditif, associé à un problème de langage, donc de scolarité. Cent mille par classe d'âges ont un problème visuel. Un sur huit souffre d'obésité. Dix-huit mille sont maltraités. Un demi-million souffrent d'asthme (la prévalence a doublé entre 1975 et 1994). Deux mille nouveaux cas de cancer surviennent chaque année. Près de 40 000 enfants sont handicapés et non scolarisés. De 150 000 à 200 000 sont épileptiques, et 10 000 diabétiques insulinodépendants. Et 84 % ont été vaccinés contre la rougeole à 2 ans, ce qui est insuffisant.
Chez les adolescents, 20 % présentent des signes dépressifs, 7,3 % font une réelle dépression et 50 % ont une plainte somatique qui signifie un mal-être psychique. Deux cents adolescents âgés de 15 à 19 ans se suicident chaque année. Dix-sept pour cent consomment des psychotropes, 10 % boivent régulièrement et de 25 à 30 % fument quotidiennement.
Un comité interministériel
L'AFPA juge utile la mise en place d'un comité interministériel, sous la tutelle du Premier ministre. Sa mission consisterait à définir une politique de santé de l'enfance et de l'adolescence. Cette politique serait élargie à l'Education, pour tenir compte des troubles du langage, à la Jeunesse et aux Sports, en raison du doublement du nombre de jeunes obèses depuis 1985, et à la Justice, du fait de la maltraitance. Il importe d'agir sur la prévention et sur le dépistage, de « favoriser l'insertion sociale de l'enfant par le respect et le suivi rigoureux de son développement physique et psychique ». Cela implique des effectifs médicaux renforcés et mieux formés. Le généraliste a forcément sa place, au même titre que d'autres intervenants, dans les réseaux pédiatriques de ville. L'importance de l'éducation pour la santé dans le cadre du colloque singulier est primordiale.
Les gains de l'allaitement maternel sont multiples, tient à faire remarquer le Dr Brigitte Virey. Outre sa dimension nutritionnelle, il limite le risque de maladies infectieuses, d'allergies, d'obésité, de diabète, de problèmes d'orthodontie et de maltraitance. Sur le plan économique, un relèvement de 5 % du taux d'allaitement fait économiser 2,7 millions d'euros sur les dépenses de santé chaque année. Enfin, pour l'AFPA, il faut revaloriser la néonatalogie, libérer des crédits pour la constitution de réseaux périnatals à l'échelon régional et rationaliser les consultations d'urgence en milieu hospitalier.
Les pédiatres libéraux qui appellent, par la voix de l'AFPA, à une telle réforme, voient chaque année leurs effectifs (2 800*) diminuer de 2 %. Et la tendance risque de s'accentuer, si rien n'est entrepris, puisque 50 % de praticiens ont plus de 53 ans et que seulement 6 % sont âgés de moins de 40 ans.
* 2 262 pédiatres travaillent à l'hôpital, 557 à la PMI et 153 en centres de santé.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature