LE COLLECTIF INTERASSOCIATIF sur la santé (Ciss) a mal vécu les brusques changements de cap intervenus ces dernières semaines dans la mise en place du dossier médical personnel (DMP). Pour des raisons techniques, financières, mais aussi pour respecter un calendrier de plus en plus tendu – chaque Français de plus de 16 ans doit disposer d’un dossier médical personnel au 1er juillet 2007 –, le groupement a en effet décidé de mettre en place un DMP centralisé auprès d’une plate-forme nationale, alimenté à partir du Web-médecin (« le Quotidien » du 11 avril).
Le GIP a une nouvelle fois changé de pilote. Jacques Beer-Gabel a été limogé du poste de directeur général. Le Ciss, qui regroupe 24 associations de patients, s’est immédiatement alarmé de la remise en cause du projet d’origine : «Le comité d’orientation du GIP-DMP reste une chambre d’enregistrement, si ce n’est un comité de promotion d’un DMP sur lequel nous avons perdu toute visibilité: une nouvelle orientation vient d’être adoptée par le conseil d’administration sans que le comité d’orientation en ait été saisi! A quoi sert-il?»
Trois semaines plus tard, à la veille d’une importante réunion du conseil d’administration, qui doit valider les nouvelles orientations stratégiques, le Ciss frappe du poing sur la table. «Nous avons perdu beaucoup de temps, confie son vice-président Christian Saout. Nous en sommes maintenant au troisième directeur du conseil d’administration du GIP-DMP. Les expérimentations ne devraient pas commencer avant septembre. Nous allons donc poser la question de l’utilité de rester dans le GIP-DMP lors du prochain conseil d’administration du Ciss le 14mai. Nous ne voulons pas participer à une entreprise de tromperie.»
Le président de l’association Aides se dit «désabusé par la tournure des événements». Il demande que trente ans après la création de la commission nationale de l’Informatique et des Libertés (Cnil), le ministre de la Santé ouvre un débat national sur les questions de sécurité des données personnelles de santé. «Il faut enfin savoir comment les utiliser et quoi en faire», indique-t-il.
Un dossier sans patient ?
Ces dernières semaines, le GIP-DMP a tenté de renouer le dialogue avec les industriels, les médecins et les patients. Son directeur par intérim (1), Jacques Sauret, a annoncé dans nos colonnes que le conseil d’administration du GIP était prêt «à modifier le scénario adopté le 7avril [...]beaucoup plus protecteur des patients et des professionnels de santé», alors que, «jusqu’à présent, l’argent du DMP était donné aux industriels» (« le Quotidien » du 19 avril). Il précisait également que le GIP ne souhaitait pas «mettre dehors les industriels», mais voulait «redonner la main aux acteurs de terrain». Vingt-six millions d’euros d’aides collectives doivent être alloués aux médecins, mais aussi aux réseaux et aux structures locales pour leur permettre d’alimenter le DMP sur les sites d’expérimentation en 2006. Vingt millions d’euros seront consacrés à la formation des médecins pour l’accompagnement des médecins.
Après cette première tempête, le GIP-DMP pourrait être confronté à un nouvel orage si le Ciss venait à quitter son comité d’orientation alors que les expérimentations prévues dans 17 sites pilotes et 13 régions reposant sur 30 000 patients volontaires n’ont pas encore démarré. Le dossier médical personnel peut-il décemment être mis en place sans le soutien des patients ?
(1) Le nouveau directeur du conseil d’administration doit être nommé demain.
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