Les patients attendent plus d'un mois pour un examen IRM

Publié le 17/10/2001
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Depuis l'an dernier, le retard français en matière d'imagerie à résonance magnétique (IRM) et de tomographie à émission de positons (PET) « s'est encore aggravé, et les patients et leurs associations ont pris conscience de la gravité de la situation », souligne le Pr Guy Frija, secrétaire général de la Société française de radiologie et d'imagerie médicale (SFR).

C'est pourquoi le Pr Frija espère que le ministre délégué à la Santé, Bernard Kouchner, annoncera lundi « une rupture politique », à l'occasion des Journées françaises de radiologie qui vont se tenir du 20 au 24 octobre au palais des Congrès à Paris.
Selon le Syndicat national des industries de technologies médicales (SNITEM), il y avait, en 2000, sur notre territoire seulement 196 IRM et 5 PET-scan destinés à l'imagerie médicale (dont 2 à Paris). La France devance de peu la Turquie avec 3 IRM par million d'habitants et reste loin derrière le Japon (30 IRM par million d'habitants), les Etats-Unis (28) et l'Allemagne (14). La France fait aussi figure de lanterne rouge en termes de taux d'équipement en PET, puisqu'elle a un peu moins de 1 PET-scan pour 10 millions d'habitants en 2000, contre 16,7 en Belgique, 9,1 en Allemagne et 6,4 aux Etats-Unis.

Retard à l'installation

Certes, l'ex-ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Martine Aubry, avait promis, en mars 2000, l'installation de 94 IRM supplémentaires. En février de cette année, 88 autorisations ont effectivement été accordées, mais seulement 2 nouveaux équipements IRM ont été installés depuis, compte tenu des longs délais administratifs. Or le Pr Frija estime qu'il faudrait en France « au moins 300 appareils ». Pour Francis Bailly, de l'association Imagerie Santé Avenir, le « besoin théorique » est même de 600 appareils si l'on tient compte, outre les domaines privilégiés de l'IRM (neurologie, cancérologie, pathologies ostéo-articulaires), de ses nouvelles indications comme le système cardio-vasculaire, l'urologie ou la gynécologie.
Imagerie Santé Avenir évalue de même que la France aurait besoin de 50 à 60 PET-scan, cet outil permettant de diagnostiquer des cancers primitifs et tumeurs résiduelles, et de rechercher des métastases.

Disparités régionales

Une étude CEMKA-EVAL a été réalisée pour Imagerie Santé Avenir afin de mesurer l'impact de la situation de pénurie sur les pratiques médicales. Ont été interrogés pour cette étude 350 cancérologues et 450 neurologues, qui exercent en secteur hospitalier exclusif dans 58 % des cas et prescrivent à 95 % des IRM. Selon l'étude, les neurologues prescrivent en moyenne 15,8 IRM par mois, soit deux fois plus que les cancérologues (7,7). Imagerie Santé Avenir note que le délai moyen d'obtention d'une IRM a augmenté depuis sa précédente enquête. Il est de 45,2 jours pour les neurologues interrogés (contre 33 en 2000) et de 29,8 jours pour les oncologues (19 jours l'an passé). Les oncologues ont une situation a priori plus favorable puisqu'ils travaillent dans de grands hôpitaux ou des centres anticancéreux mieux équipés que la moyenne. En moyenne, le délai d'attente serait de 38 jours. L'étude révèle, en outre, de grandes disparités régionales, le délai moyen d'obtention des IRM prescrites par les neurologues pouvant dépasser deux mois dans certaines régions : Alsace, Franche-Comté, Centre, Limousin, Aquitaine. Plus que l'éloignement de l'IRM ou le coût de l'examen, ces délais constituent une difficulté pour 86 % des médecins prescripteurs. Ces difficultés ont une répercussion sur la fréquence de prescription des IRM. En effet, selon l'étude, 54 % des neurologues et 60 % des oncologues avouent éviter « parfois » ou « souvent » de prescrire les examens souhaités.
En cas d'urgence (qui peut réduire le délai d'attente à 4 jours), 93 % des spécialistes interrogés reconnaissent qu'ils ont recours à une ou plusieurs « stratégies de contournement » pour obtenir une IRM dans les délais escomptés : prise de rendez-vous avec le radiologue à la place du patient (89 %), hospitalisation (32 %), contacts avec des correspondants non radiologues (8 %), recherche d'une IRM disponible ailleurs (7 %), etc. Or, souligne le Pr Frija, les « pressions exercées sur les radiologues » ne profitent pas aux patients les plus défavorisés et créent donc, selon lui, « une inégalité dans l'accès aux soins ». Le niveau d'équipement actuel en IRM en France est d'ailleurs « jugé inacceptable » par 91 % des spécialistes interrogés.

Agnès BOURGUIGNON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6991