REFERENCE
A) Quelques chiffres concernant les pancréatites aiguës
A1) En France, l'incidence annuelle de la pancréatite aiguë chez les sujets de plus de 15 ans a été estimée à 22 pour cent mille.
A2) Les formes graves (nécrosantes) sont responsables de complications intraabdominales (infection de la nécrose, en particulier) et de défaillances viscérales responsables d'une mortalité entre 10 et 20 %.
B) Comment faire le diagnostic de pancréatite aiguë ?
B1) Les arguments cliniques sont :
a) le type de la douleur : épigastrique, transfixiante, irradiant vers les hypocondres ou le dos, voire l'omoplate gauche ;
b) l'association fréquente à un iléus (nausées, voire vomissements, météorisme).
B2) Sur le plan biologique, une élévation de la lipasémie au-dessus de trois fois la limite supérieure de la normale (N) est évocatrice. Elle doit être dosée dans les quarante-huit premières heures.
B3) L'amylasurie des vingt-quatre heures est surtout utile si le patient est vu tardivement.
C) Quelle est la place de l'imagerie ?
C1) Les examens morphologiques sont utiles pour :
a) éliminer une autre urgence chirurgicale, telle une perforation d'organe creux (pneumopéritoine) ;
b) conforter un diagnostic douteux cliniquement.
C2) L'abdomen sans préparation (debout prenant les coupoles diaphragmatiques) recherche notamment un pneumopéritoine*.
C3) L'échographie abdominale :
a) est souvent gênée par des gaz ;
b) peut montrer un aspect démateux du pancréas (forme bénigne) ou, au contraire, des collections extrapancréatiques (forme grave) ;
c) son intérêt principal est la recherche d'une étiologie fréquente (40 %) : la lithiase vésiculaire. Pour ce diagnostic, elle est plus performante que le scanner (mais moins que l'écho-endoscopie).
C4) Scanner abdominal.
C'est l'examen clé. Il a, en effet, un double intérêt : diagnostique et pronostique.
a) L'absence de rehaussement de la glande après injection du produit de contraste iodé fait porter le diagnostic de nécrose pancréatique.
b) L'extension des zones de nécrose a une valeur pronostique (score de Balthazar).
c) La présence de bulles gazeuses au sein des coulées de nécrose signe la surinfection (facteur majeur de gravité).
d) Un scanner doit être fait pour toute pancréatite non résolue en deux ou trois jours (et c'est à ce moment qu'il est le plus informatif, plus que lors des premières heures).
e) En cas de pancréatite grave, il faudra répéter le scanner tous les huit à quinze jours, à la recherche de complications plus tardives (pseudokystes, abcès, thrombose porte, etc.).
C5) Le scanner abdominal fait partie des examens à réaliser systématiquement dès le premier jour.
D) Quelle est la cause de cette pancréatite ?
D1) La lithiase biliaire et l'alcoolisme représentent, chacun, 40 % des causes.
D2) Les arguments en faveur d'une lithiase biliaire sont indiqués dans l'encadré 1.
D3) Les arguments en faveur d'une pancréatite alcoolique sont indiqués dans l'encadré 2.
D4) Les autres étiologies (non A, non B) sont indiquées dans l'encadré 3.
E) En pratique, quelle doit être la démarche diagnostique ?
E1) Une première orientation est donnée par l'examen clinique, l'anamnèse et quelques examens biologiques simples (voir en particulier les encadrés 1 et 2).
E2) Le diagnostic est ensuite souvent conforté par des examens d'imagerie classiques : échographie et/ou scanner abdominal.
E3) En l'absence de diagnostic étiologique après ces deux premières étapes (et malgré un interrogatoire poussé, Cf. encadré 3), il faut avoir recours à l'échoendoscopie. Celle-ci recherche notamment une lithiase vésiculaire et/ou cholédocienne qui aurait pu échapper à l'imagerie classique (échographie percutanée et scanner abdominal) et une petite tumeur pancréatique (notamment une tumeur intracanalaire papillaire et mucineuse pancréatique [TIPMP]).
Réponse
L'assertion C5 est inexacte. En effet, le scanner abdominal ne fait pas partie des examens à réaliser systématiquement dès le premier jour. Son indication en urgence est réservée aux situations où il persiste un doute diagnostique, après la réalisation des examens de base : lipasémie, imagerie courante (radios d'abdomen sans préparation et des poumons, échographie abdominale). Le scanner n'est pas indispensable dans les formes bénignes. Réalisé trop tôt dans les formes graves, il risque de sous-estimer les lésions.
Pour en savoir plus :
Paye F. Pancréatites aiguës : diagnostic et principes thérapeutiques. « Revue du Prat », 2002 ; 52 : 1554-1560.
Conférence de consensus. Comment faire le diagnostic positif et étiologique de pancréatite aiguë ? «Gastroenterol Clin Biol », 2001 ; 25 : 1S7-1S33.
* Absent dans la pancréatite aiguë.
1 - Lithiase biliaire
Arguments cliniques
- Age : > 50 ans.
- Sexe : féminin.
- Antécédents biliaires.
Arguments biologiques
- Cytolyse (ALAT > ou = 3 N*).
- Cholestase (phosphatases alcalines).
Arguments d'imagerie
- Lithiase vésiculaire.
*N = limite supérieure de la normale
2 - Pancréatite alcoolique
Arguments du diagnostic
- Anamnèse.
- Macrocytose globulaire.
- Gamma-GT.
- Calcifications (pancréatite chronique).
3 - Autres causes (en dehors de l'alcool et de la lithiase)
Métaboliques
- Hypertriglycéridémies (habituellement > 10 g/l).
- Hypercalcémie.
Médicamenteuses
- Aminosalicylés.
- Azathioprine.
- Furosémide.
- Corticoïdes.
- Pentamidine.
- Antirétroviraux (VIH).
Iatrogènes
- Postopératoires.
- Après CPRE*.
Traumatiques
- Contusion abdominale.
- Brûlures graves.
Obstruction canalaire (pancréas)
- TIPMP.**
- Adénocarcinome.
- Parasitaire (ascaris).
- Pancréas divisum (controversé).
Obstruction duodénale
- Tumeur papillaire (ou duodénale).
- DKPA.***
- Pancréas annulaire.
Infectieuses
- Virales (oreillons, virus A, B, Coxsackie...).
- Bactériennes (mycoplasme, Campylobacter...).
Ischémiques
- Après CEC.****
- Vascularites (lupus, PAN...).
Héréditaires
- Gène CFTR (mucoviscidose).
- Gène du trypsinogène cationique.
*CPRE : cholangiographie et pancréatographie rétrograde endoscopique.
**TIPMP : tumeur intracanalaire papillaire et mucineuse du pancréas.
***DKPA : dystrophie kystique sur pancréas aberrant.
****CEC : circulation extracorporelle.
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