LA SUSCEPTIBILITÉ génétique au cancer de la prostate peut être favorablement modifiée par l'alimentation. Une étude américaine vient de démontrer qu'un régime riche en acides gras polyinsaturés oméga 3 inhibe la croissance des tumeurs prostatiques de souris génétiquement prédisposées à cette maladie. L'espérance de vie de ces souris devient de ce fait supérieure à celle de souris porteuses du même facteur de risque génétique mais consommant peu d'oméga 3.
Depuis vingt ans, diverses données épidémiologiques ont suggéré qu'un régime riche en acides gras polyinsaturés oméga 3 pourrait réduire le risque de certains cancers, notamment celui de la prostate. Pour vérifier cette hypothèse et tenter de comprendre les mécanismes de leur action antitumorale, Berquin et coll. (Wake Forest University School of Medicine, Winston-Salem, Caroline du Nord) ont choisi d'utiliser le modèle expérimental de la souris.
Les chercheurs ont réparti en trois groupes des souris génétiquement prédisposées au cancer de la prostate, porteuses d'une mutation fréquemment détectée dans les tumeurs prostatiques humaines. Celles du premier groupe ont reçu une alimentation riche en oméga 3 (ratio oméga 6/oméga 3 égal à 1), celles du second groupe, un régime pauvre en oméga 3 (ratio égal à 20), et celles du dernier groupe, un régime riche en oméga 6 (ratio égal à 40).
Cette expérience a montré qu'il existe une relation entre la teneur en oméga 3 de l'alimentation des souris prédisposées au cancer de la prostate et la progression de leur maladie. Plus leur alimentation est riche en oméga 3 et plus leur survie est augmentée. Cette amélioration du pronostic est associée à une réduction de la croissance des tumeurs prostatiques et à un ralentissement de la progression histopathologique de la maladie.
L'analyse des tumeurs des souris des trois groupes a révélé qu'un régime riche en oméga 3 est associé à une augmentation de l'apoptose. Ce processus qui conduit à l'élimination de cellules anormales est très probablement à l'origine des effets bénéfiques des oméga 3.
L'effet proapoptotique de la protéine Bad déphosphorylée.
Au niveau moléculaire, il est apparu que les oméga 3 induisent une diminution de la quantité cellulaire de protéines Bad phosphorylées, au profit d'une augmentation de la quantité de la version non phosphorylée de cette même protéine. Bad est une protéine qui possède un effet proapoptotique lorsqu'elle est déphosphorylée. Reste encore à définir comment la consommation d'oméga 3 déclenche sa déphosphorylation.
Berquin et coll. n'excluent pas l'hypothèse selon laquelle les oméga 3 pourraient agir sur plusieurs mécanismes. Ils pourraient non seulement avoir un rôle proapoptotique, mais aussi modifier d'autres processus impliqués dans la cancérogenèse, tels que la prolifération cellulaire, l'inflammation ou encore l'angiogenèse. Ces différentes possibilités sont en cours de test.
Berquin et coll. comptent, en outre, étudier l'effet d'un régime riche en oméga 3 sur des tumeurs prostatiques de taille importante. Ce travail permettra de savoir si l'alimentation ne permet que d'inhiber la croissance d'un cancer en cours de développement ou si elle peut aussi induire une réduction de la taille d'une tumeur avancée.
Berquin I M et coll. « The Journal of Clinical Investigation », juillet 2007, vol. 117, pp. 1866-1875
Un ratio oméga-6/oméga-3 trop élevé
Selon les recommandations des nutritionnistes, l'alimentation devrait apporter autant d'acides gras polyinsaturés oméga-3 que d'acides gras polyinsaturés oméga-6 (ratio oméga-6/oméga-3 ≤ 5). Mais, en Europe et en Amérique du Nord, le ratio oméga-6/oméga-3 moyen constaté est proche de 30. Chez certaines personne, ce ratio atteint même une valeur de 50.
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