Psoriasis
« NOUS QUITTONS les ambiances nauséabondes des goudrons pour entrer dans l'ère aseptisée de la high-tech que représentent les biotechnologies, déclare d'emblée le Dr Bruno Sassolas (CHU de Brest). L'arrivée des thérapies biologiques marque un nouveau tournant dans le traitement du psoriasis. Après les topiques, les dérivés de la vitamine A, les immunosuppresseurs (méthotrexate, puis ciclosporine), ces nouveaux médicaments appelés immunomodulateurs ont pour ambition d'agir plus finement et d'entraîner moins d'effets secondaires. »
Quelques explications sont nécessaires pour comprendre leur mode d'action.
On considère actuellement que le psoriasis est une maladie auto-immune. Sa physiopathologie ressemble à celle d'une réaction cutanée d'hypersensibilité retardée, dont l'antigène (ou les antigènes cibles de l'épiderme) reste à découvrir.
Deux anomalies majeures contribuent à la formation d'une plaque de psoriasis. On constate d'abord une inflammation cutanée dans le derme et l'épiderme, où sont impliquées de nombreuses cellules inflammatoires. Survient ensuite une prolifération anormale des kératinocytes associée à un trouble de la différenciation de ces cellules et une hyperkératose, dont les squames représentent la traduction clinique.
Les lymphocytes que l'on trouve dans la peau sont des cellules mémoire qui ont été en contact avec un antigène. Ils ont acquis des propriétés et une expression des récepteurs en surface qui leur permettent de quitter l'endothélium et de pénétrer dans les tissus. Ils reviennent dans la peau à l'occasion d'un événement soit inconnu, soit infectieux, ou encore lors d'une agression physique (phénomène de köbner). Ils sécrètent alors des cytokines de type 1 (interféron gamma) auxquelles vont s'ajouter des chimiokines produites par d'autres cellules du derme et de l'épiderme, en particulier le TNF alpha et l'interleukine 8, qui contribuent à la formation de l'infiltration inflammatoire. D'autres médiateurs provoquent une prolifération kératinocytaire, d'où l'apparition de signes histologiques, puis des signes cliniques (érythème, troubles de la kératinisation, squames).
Des points d'impact thérapeutiques différents.
Les immunomodulateurs peuvent agir à quatre niveaux pour s'opposer au rôle des lymphocytes T dans l'induction ou le maintien du psoriasis : cibler et éliminer les cellules T pathogènes (lymphocytes T mémoire), induire une déviation immune en favorisant les cytokines Th2, pour corriger le déséquilibre Th1/Th2, inhiber l'activation des cellules T ou leur migration tissulaire et, enfin, inhiber les cytokines.
Les molécules les plus avancées dans les essais cliniques sont l'alefacept (Amvive, Laboratoires Biogen), l'efalizumab (Raptiva, Laboratoires Serono), l'etanercept (Enbrel, Laboratoires Amgen et Wyeth) et l'infliximab (Remicade, Laboratoires Centocor et Schering-Plough).
Les deux premiers sont déjà commercialisés en Amérique du Nord et aux Etats-Unis pour l'indication psoriasis. Les deux derniers le sont en France, mais dans d'autres indications. L'etanercept a une AMM dans la polyarthrite rhumatoïde et le rhumatisme psoriasique. L'infliximab (Remicade) a une AMM dans la maladie de Crohn.
Tous ces traitements sont en cours d'expérimentation dans les psoriasis modérés à sévères et n'ont pas encore d'AMM en France dans le psoriasis cutané. Ils ont en commun d'être utilisables uniquement par voie parentérale (les formes I.M. et sous-cutanée peuvent être utilisées en ville), en cures de douze semaines. Ils agissent lentement, une meilleure efficacité étant notée à la deuxième cure. Ils n'ont, en revanche, pas d'effet rebond à l'arrêt du traitement.
Cependant, tous les patients ne répondent pas favorablement à ces thérapeutiques : ainsi ces non-répondeurs seraient en faveur de l'existence de divers types de psoriasis (génétique ou immunologique). Enfin, la tolérance est généralement bonne, mais la survenue d'infections, notamment de réactivations de tuberculose, est possible sous anti-TNF alpha (etanercept, infliximab). Bien que les résultats cliniques de phase III de ces nouveaux médicaments soient très prometteurs, il est probable que leur coût sera un frein à leur utilisation.
D'après la communication du Dr B. Sassolas (CHU de Brest) lors de la session sur « Les thérapies biologiques : nouveaux traitements du psoriasis en 2003 ».
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