Si 62 % des déplacements internationaux se font au sein de l'Europe, quelque 4,25 millions de Français (données de 2006) se rendent chaque année dans un pays tropical (Afrique, Amérique, Asie-Pacifique) d'endémie du paludisme, un nombre en croissance exponentielle depuis 1996.
La diminution du nombre de cas de paludisme d'importation observée depuis 2000 s'est encore accentuée en 2007 (4 400 cas), ce qui témoigne sans doute «d'une répartition nouvelle des voyages en zone d'endémie (moins en Afrique subsaharienne) et peut-être d'un meilleur suivi de la chimioprophylaxie». Mais, poursuit le Pr Danis, «elle s'accompagne malheureusement d'une augmentation des birésistances des isolats d'Afrique de l'Ouest testés au CNR du paludisme». Cinq pays sont ainsi passés du groupe 2 au groupe 3 (sur 3) de chloroquinorésistance : le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. En outre, le paludisme est encore à l'origine d'une vingtaine de décès par an. «C'est pourquoi il convient de rappeler une fois de plus que toute pathologie fébrile au retour des tropiques doit être considérée a priori comme pouvant être d'origine palustre et nécessite une consultation en urgence», insiste le président du CMVI.
Environ 3 % des paludismes à P.Falciparum surviennent au-delà de deux mois après le retour. Le choix d'une chimioprophylaxie doit tenir compte des zones visitées, de l'intensité de la transmission, des conditions et de la durée du séjour, mais aussi de l'âge, du poids, des antécédents pathologiques du voyageur, d'une grossesse en cours ou future et, bien sûr, des possibles interactions médicamenteuses ou intolérance aux antipaludiques. À ce propos, un chapitre intitulé « Séjours itératifs de courte durée » a été ajouté pour mieux cibler la prévention chez certains professionnels qui sont amenés à faire des séjours répétés pendant plusieurs années (navigants aériens, ingénieurs et techniciens pétroliers ou miniers, commerciaux divers, etc.). Chez eux, un traitement présomptif peut être envisagé, même s'il est rappelé que le traitement antipaludique «sans avis médical pendant le séjour doit rester l'exception et ne s'impose qu'en l'absence de possibilité de prise en charge médicale dans les douze heures». Le schéma de traitement proposé tient compte de la récente révision de la conférence de consensus sur le paludisme d'importation à P.falciparum : atovaquone-proguanil (Malarone), quatre comprimés en une prise par jour à prendre avec une collation ou un repas pendant trois jours ; Artéméther-luméfantrine (Riamet, Coartem), quatre comprimés en une prise, deux fois par jour, pendant trois jours, avec une collation ou un repas. Il est aussi rappelé que les tests de diagnostic rapide disponibles sur le marché ne sont pas recommandés pour l'autodiagnostic.
Moustiques et répulsifs.
Les vaccinations constituent un des aspects importants de ces recommandations qui tiennent compte des modifications du calendrier vaccinal 2008. Compte tenu des épidémies de fièvre jaune survenues en 2007-2008 en Amérique du Sud, au Brésil, au Paraguay, en Argentine et au Pérou, une nouvelle carte de répartition des zones d'endémie, plus précise, est publiée dans le « BEH ». La vaccination est obligatoire pour tout séjour en zone d'endémie, «même en l'absence d'obligation administrative». Le chapitre sur les risques liés aux insectes et autres animaux a largement été revu et enrichi, avec la protection contre Anopheles (paludisme), Aedes (dengue, chikungunya) ou contre les moustiques du genre Culex (filariose et encéphalite japonaise). Le Pr Danis signale une difficulté à propos de l'usage des répulsifs : «Les recommandations de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) sont très prudentes quand il s'agit de l'enfant et des femmes enceintes, et concernent surtout une utilisation prolongée pour des personnes vivant en zone d'endémie. Elles doivent être interprétées, précise-t-il, avec moins de rigueur s'il s'agit d'un voyage de courte durée dans une zone à haut risque de paludisme et/ou d'arboviroses.»
Quant aux précautions à prendre en fonction des personnes, certains paragraphes ont été enrichis. Chez les enfants, la vaccination antirabique est désormais conseillée en cas de séjour prolongé dans une zone isolée d'enzootie (Asie, Afrique, dont le Maghreb) dès l'âge de la marche. Les précautions à prendre pour les personnes âgées sont mieux détaillées, en particulier en ce qui concerne les points à explorer avant le voyage, et les adaptations à envisager pour les vaccinations et la chimioprophylaxie. Comme pour les personnes âgées, une visite médicale s'impose avant le départ pour les patients atteints de pathologies chroniques. > Dr LYDIA ARCHIMÈDE
Le profil épidémiologique change
- Selon les études, le taux de voyageurs malades varie de 15 à 64 % en fonction des destinations et des conditions de séjour.
- La diarrhée est toujours le plus fréquent des problèmes, suiviE par les affections des voies aériennes supérieures, les dermatoses et la fièvre.
- Les études les plus récentes montrent une modification du profil épidémiologique des pathologies de voyage avec l'émergence d'affections comme le mal d'altitude, le mal des transports, les traumatismes et blessures d'origine accidentelle ou intentionnelle.
- Le risque de décès par mois de voyage est de 1 pour 100 000 et de 1 pour 10 000 pour les personnes impliquées dans des opérations humanitaires.
- Les causes de mortalité sont, dans la moitié des cas environ, cardio-vasculaires ; les autres causes de décès se partageant entre accident de la voie publique, noyade, homicide, suicide. Elles sont proches des causes de rapatriement.
- Les infections ne rendent compte que de 1 à 3 % des décès.
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