PAR LE Pr ISABELLE TILLIE-LEBLOND*
La part attribuable à l'allergie dans l'asthme est de 30 à 65 % en fonction des facteurs pris en compte chez l'adulte. Les sensibilisations et l'exposition aux allergènes de l'environnement domestique et extérieur augmentent le risque de survenue de symptômes d'asthme, ainsi que le risque d'exacerbations de l'asthme, qu'il s'agisse des consultations aux urgences ou des hospitalisations (NP1). Il est recommandé d'interroger tout asthmatique sur son environnement domestique, extérieur et professionnel, et de rechercher un lien entre une exposition à un allergène et la survenue de symptômes (recommandation de grade A).
L'enquête
Il est recommandé de faire une enquête allergologique chez tout asthmatique âgé de plus de 3 ans (recommandation de grade A).
Il est recommandé de faire une enquête allergologique chez tous les enfants de moins de 3 ans qui présentent des symptômes respiratoires persistants et/ou récidivants et/ou sévères et/ou nécessitant un traitement continu et/ou associés à des symptômes extra-respiratoires compatibles avec une origine allergique. Cela inclut une histoire compatible avec une allergie alimentaire (recommandation de grade B).
Les allergènes à tester sont proposés à titre indicatif.
La réalisation de pricks-tests est recommandée en première intention dans le bilan allergologique (recommandation de grade B). Il est recommandé de pratiquer un prick-test avec un témoin négatif (avec le diluant qui sert à diluer les allergènes qui seront testés) et un témoin positif (recommandation de grade A). Il est recommandé de ne pas répéter les pricks-tests dans l'évaluation de l'efficacité d'une immunothérapie spécifique (recommandation de grade B). Il est recommandé de retenir une positivité du prick-test à un allergène lorsque le diamètre de la papule est supérieur ou égal à 3 mm (témoin avec le diluant négatif) (recommandation de grade B). Il est recommandé de confronter le résultat d'un prick-test à un allergène aux données de l'interrogatoire et de la clinique (recommandation de grade B).
La place des examens biologiques sériques dans le diagnostic de l'allergie chez l'asthmatique est discutée.
Si la réalisation de pricks-tests n'est pas possible en première intention, il est recommandé de réaliser un test multiallergénique. En cas de positivité, l'enquête allergologique doit être poursuivie (NP3) (recommandation de grade C).
Le dosage des IgE sériques totales n'est pas recommandé en pratique chez l'asthmatique, sauf dans deux situations cliniques : avant mise en place d'un traitement par anti-IgE et lorsqu'une aspergillose bronchopulmonaire allergique est suspectée (recommandation de grade A). Il est recommandé de ne pas pratiquer le dosage des IgE sériques spécifiques d'un pneumallergène en pratique courante en première intention (recommandation de grade A). Il est recommandé de pratiquer ce dosage en cas de discordance entre les manifestations cliniques et les résultats des pricks-tests ou lorsque les pricks-tests ne peuvent être réalisés ou interprétés (recommandation de grade B). Il est recommandé de ne pas rechercher une hyperéosinophilie sérique en première intention chez un asthmatique (recommandation de grade B).
Le risque d'anaphylaxie
Il est recommandé de ne pas faire systématiquement de tests vis-à-vis des curares chez l'asthmatique allergique qui doit bénéficier d'une anesthésie générale (recommandation de grade B).
Chez le patient sensibilisé à l'oeuf, sans histoire clinique d'allergie à l'oeuf, il est recommandé de ne faire une enquête allergologique que chez un patient ayant eu une réaction allergique après une vaccination contre la grippe ou la fièvre jaune ou un autre vaccin contenant des protéines de l'oeuf (recommandation de grade C).
Il est recommandé de ne pas contre-indiquer l'administration de bêtalactamines chez l'asthmatique allergique, sauf s'il existe un antécédent d'allergie documenté à cette classe d'antibiotiques. En cas de suspicion d'allergie à la pénicilline sur les données de l'interrogatoire, il faut faire un bilan pour affirmer ou infirmer l'allergie à la pénicilline, avant toute prescription d'un antibiotique de cette classe. En cas d'allergie à la pénicilline documentée, tout antibiotique de cette classe est à proscrire (recommandation de grade C). Le choix d'une céphalosporine sera orienté par les tests cutanés à cette céphalosporine (recommandation de grade B).
Il est recommandé de ne pas prendre de précautions particulières dans la pratique des tests cutanés ou de la désensibilisation aux hyménoptères chez l'asthmatique, sauf chez l'apiculteur (avis d'experts). Il faut retarder une désensibilisation (initiation ou dose de maintien) vis-à-vis des hyménoptères si l'asthme n'est pas contrôlé (recommandation de grade C).
Il est recommandé de signaler au radiologue l'existence d'un asthme avant un examen nécessitant une injection de produit de contraste iodé (recommandation de grade A). Il faut retarder une injection de produit de contraste iodé, dans la mesure du possible, si l'asthme n'est pas contrôlé (avis d'experts). Chez l'asthmatique, il est recommandé d'utiliser des produits de contraste iodés de basse osmolalité (recommandation de grade C). Il n'est pas recommandé d'utiliser une prémédication chez l'asthmatique avant injection de produits de contraste iodés (recommandation de grade C).
Chez un asthmatique ayant une allergie alimentaire, il est recommandé de prendre toutes les mesures (éviction de l'allergène causal, trousse d'urgence et carte d'allergie) pour prévenir et traiter un choc anaphylactique (NP2) (recommandation de grade A).
L'examen clinique
Il est recommandé de rechercher par l'interrogatoire une rhinite associée chez l'asthmatique allergique : un écoulement antérieur et/ou postérieur, une anosmie, une obstruction et un prurit nasal et des éternuements (recommandation de grade B).
Il est recommandé de traiter la rhinite pour améliorer le contrôle d'un asthme associé (recommandation de grade B).
Les traitements spécifiques
Il est recommandé de ne pas réaliser une ITS avec plus de deux allergènes appartenant à des familles différentes (avis d'experts) (recommandation de grade B).
Il est recommandé de réaliser une ITS avec des allergènes pour lesquels une efficacité et une sécurité ont été démontrées (acariens, pollens de graminées, de bouleau et d'ambroisie) (NP1) (recommandation de grade B).
Compte tenu du risque d'effets secondaires, en particulier de bronchospasmes, notamment lors de la phase de montée de doses, il est recommandé de ne proposer l'ITS que chez des asthmatiques contrôlés ayant une fonction ventilatoire proche de la normale (VEMS à plus de 70 % de la théorique) (recommandation de grade A).
Il est obligatoire de réaliser les injections avec la proximité immédiate d'un médecin après vérification de l'état clinique, surveillance au cabinet au moins une demi-heure après l'injection, disponibilité des moyens thérapeutiques des réactions anaphylactiques (en particulier adrénaline injectable). Une information du patient sur le rapport bénéfice/risque est également indispensable.
La place des anti-IgE
Il est recommandé de réserver le traitement par anti-IgE à l'asthmatique allergique persistant sévère mal contrôlé, en plus du traitement conventionnel optimal (recommandation de grade A).
Il est recommandé de confirmer le diagnostic de sévérité de l'asthme (évaluation du contrôle par questionnaire et explorations fonctionnelles respiratoires), de s'assurer de la prise en charge des facteurs aggravants, de contrôler l'adhésion au traitement avant de proposer le traitement par anti-IgE (avis d'experts) (recommandation de grade B).
L'éviction allergénique
Il est recommandé de faire une éviction des allergènes responsables, la plus globale possible, chez l'enfant allergique asthmatique (recommandation de grade B). Bien qu'il n'y ait pas encore de données suffisantes chez l'adulte allergique asthmatique, l'éviction des allergènes est recommandée (recommandation de grade B).
Il est recommandé de se séparer du chat, du chien ou de tout autre animal de compagnie en cas d'asthme allergique à l'animal ou de maintenir l'animal en dehors du lieu d'habitation.
Lorsque l'éviction n'est pas réalisable, aucune technique n'a démontré son efficacité (recommandation de grade C).
* CHU de Lille, France.
L'asthme professionnel
Quel est le poids des facteurs professionnels dans l'asthme ?
Il est recommandé d'interroger tous les patients asthmatiques quant à la relation chronologique entre leurs symptômes et l'exposition professionnelle, en particulier chez les sujets exposés à un agent connu comme responsable d'asthme professionnel (recommandation de grade A).
Quels sont les métiers à risque ?
Il est recommandé de rechercher de façon approfondie une origine professionnelle chez un asthmatique exerçant une profession à haut risque : professions de nettoyage, agricoles, boulangers, peintres, coiffeurs, professionnels de santé, soudeurs (NP3) (recommandation de grade B).
Comment diagnostiquer l'origine professionnelle d'un asthme ?
Du fait du manque de spécificité de l'interrogatoire et des conséquences potentielles graves de la maladie sur l'emploi, il est recommandé d'étayer le diagnostic d'asthme professionnel par des méthodes objectives (NP2) (recommandation de grade B).
Les tests immunologiques sont-ils à pratiquer en cas de suspicion d'asthme professionnel ?
Le monitoring du débit expiratoire de pointe (DEP) a-t-il un intérêt dans le diagnostic de l'asthme professionnel ?
Il est recommandé d'interpréter les résultats des DEP en tenant compte des périodes d'exposition, du nombre et de la durée des mesures (au minimum 4 mesures quotidiennes pendant au moins 4 semaines), du traitement et de la coopération des patients (recommandation de grade C).
Il est recommandé de pratiquer le bilan pendant une période d'activité professionnelle, sauf si la gravité de l'asthme – ou son caractère particulièrement instable – impose une éviction immédiat (recommandation de grade B).
Il est recommandé de confier l'interprétation des résultats à un médecin ayant une expérience en asthme professionnel (recommandation de grade C).
Faut-il proposer un arrêt de l'exposition à l'agent causal ?
Il est recommandé, dans la mesure du possible, de soustraire le travailleur à l'agent causal (recommandation de grade B).
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