LA MICROSTRUCTURE MÉDICALE (MS) inaugure une pratique innovante en médecine générale, à même de s’adapter aux besoins de santé du terrain. Elle se limite, pour l’instant, au champ des addictions aux opiacés. Imaginée au départ comme un moyen de pallier les défauts de la médecine devant les mésusages des médicaments de substitution, elle offre aujourd’hui aux usagers une prise en charge globale grâce à l’action conjuguée d’un psychologue, d’un travailleur social et du généraliste au cabinet de ce dernier.
L’Alsace, qui a ouvert la voie en 2000, compte 17 microstructures animées par 21 généralistes, 9 psychologues et 4 travailleurs sociaux, qui suivent 630 patients (« le Quotidien » du 20 février 2004).
Un deuxième réseau (RMS) est opérationnel en Provence avec 6 microstructures pour 12 généralistes, 6 psychologues et 3 travailleurs sociaux au service d’une centaine de toxicomanes. Un troisième réseau est en cours de constitution dans la Loire- Atlantique et un autre est en projet à Reims.
Une prise en charge plus performante.
Pour le Dr Patrick Noss, 58 ans, ancien médecin cadre du centre strasbourgeois de transfusion sanguine, la microstructure médicale a rendu plus performante la prise en charge des héroïnomanes dont il s’occupe depuis l’ouverture de son cabinet à Hochfelden (Bas-Rhin) en 1989. C’est un confrère qui lui a parlé de la microstructure, sorte de microcentre de soins pour pharmacodépendants aux opiacés implanté au sein même du cabinet du généraliste. «Ce qui m’intéressait à travers la MS, c’était la prise en charge globale, dit-il au “Quotidien”. L’aspect médical, je le connaissais, mais me faisait défaut la dimension psychologique et sociale. Avant, je me contentais de prescrire du Subutex sans le savoir-faire psychologique que cela implique, et, bien entendu, j’étais impuissant en ce qui concernait la vie sociale de la personne», qui très souvent est à la dérive ou dans le besoin.
Tout a démarré à l’été 2003. Le Dr Patrick Noss a aménagé, dans sa salle d’attente, un local fermé où reçoivent (gratuitement)un psychologue, le mardi de 16 h à 20 heures, et un travailleur social, le lundi de 17 heures à 19 heures.
La microstructure suit actuellement une quarantaine de toxicodépendants, à 99 % héroïnomanes, avec une moitié sous Subutex et l’autre sous méthadone. De 22 ans de moyenne d’âge, avec cinq à six ans d’ancienneté dans la toxicomanie, les patients du Dr Noss – autant de filles que de garçons – sont pour une quinzaine d’entre eux des nouveaux venus. «Le Subutex ne leur suffisait plus» et les sevrages successifs n’aboutissaient à rien. Chaque toxico sous méthadone se rend à son cabinet tous les 14 jours, et voit le psychologue comme le travailleur social deux fois par mois au début, puis toutes les 6 ou 8 semaines. Pour le Subutex, les consultations médicales sont mensuelles et les contacts avec le psychologue et le travailleur social sont trimestriels. De leur côté, les trois intervenants font le point chaque mois, en présence du pharmacien local et, une fois sur deux, cette rencontre a lieu au siège du RMS alsacien à Strasbourg.
Quand Elodie, 24 ans, a découvert la microstructure par le bouche-à-oreille, en juin 2005, elle prenait de l’héroïne depuis l’âge de 18 ans, «rien ne l’avait arrêtée». Le Dr Noss a mis en route un traitement à la méthadone, 30 mg, et progressivement 90 mg ; depuis deux mois, elle est à 20 mg, sans avoir jamais rechuté. La douzaine d’entretiens que la jeune femme a eus avec le psychologue y sont pour quelque chose . «Sa transformation est visible», témoigne le généraliste, qui observe qu’elle effectue un travail par intérim tandis que ses relations familiales se sont renouées.
Le RMS auquel est rattaché le Dr Patrick Noss, financé par l’agence régionale de l’hospitalisation et l’Urcam Alsace**, valorise l’activité clinique, la recherche et la formation de ses membres. Un partenariat avec les intervenants du dispositif de soins existant est formalisé par ailleurs, tant avec les autres structures sanitaires en addictologie qu’avec les référents hospitaliers que ce soit dans les domaines des hépatites B et C, du VIH ou de la psychiatrie.
* Rencontres organisées par la Coordination nationale des réseaux de microstructures médicales, tél. 03.88.22.05.49, www.reseau-rms.org, coordination-nationale@reseau-rms.org.
** Sont également financeurs la Drass, les conseils généraux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, la ville de Strasbourg et la Mildt. Ce qui permet notamment la gratuité des consultations avec le psychologue.
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