Le gain pondéral observé chez les patients sous antipsychotiques se produit généralement en début de traitement ; il est de 6 à 8 kg en moyenne durant les 6 à 12 premiers mois de traitement et a tendance à se stabiliser par la suite. Il s’agit volontiers d’une répartition androïde des graisses, dont on sait qu’elle est davantage corrélée à des complications cardiaques et à une insulinorésistance. La prise de poids est due à différents facteurs : augmentation de l’appétit, effet direct sur les métabolismes glucidiques et lipidiques, consommation de boissons (caloriques) du fait de la sécheresse buccale. En réalité, tous les traitements antipsychotiques ne sont pas équivalents de ce point de vue.
Poids et dépression
Autre population exposée au risque d’obésité, les patients présentant une dépression bipolaire ; et cela même en l’absence de traitement thymorégulateur. Un taux de cortisol élevé pourrait expliquer ce phénomène, tout comme une faible adhésion aux régimes diététiques. Or le traitement favorise, lui aussi, une prise de poids : deux tiers des patients sous lithium augmentent leur poids d’au moins 5%. Là encore, plusieurs mécanismes sont impliqués: augmentation de la diurèse et de la soif (prise de boissons caloriques), hypothyroïdie, augmentation de l’appétit, diminution du métabolisme de base, stimulation glucocorticoïde.
Enfin, un gain pondéral peut être observé au cours des traitements antidépresseurs. Il faut alors distinguer la prise de poids du patient que la dépression avait fait maigrir et qui « récupère » son poids normal du gain pondéral véritablement dû à l’antidépresseur (en particulier tricyclique). Les mécanismes en cause sont : l’interaction avec les neurorécepteurs responsables de la satiété, la sécheresse buccale, une diminution du métabolisme de base… Néanmoins, les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine exposent moins à ce type de problème ; certains favorisent même une perte pondérale, tout au moins au début du traitement.
«L’augmentation du poids, parfois importante, est généralement très mal vécue des patients, note Christiane Monod (1). Au mal-être de la maladie s’ajoute alors une modification de l’image corporelle préjudiciable à l’estime de soi déjà altérée chez ce type de patient. La prise de poids est un motif fréquent d’arrêt du traitement.» Informer, éduquer et (ré)appren-dre aux patients à équilibrer leur alimentation est donc très important. Cela demande du temps et un vrai savoir-faire.
« Les médicaments font-ils grossir », Charles G. Hagège, conférence Diétécom 2005.
(1) Christiane Monod, présidente de l’Unafam (Union nationale des amis et familles de malades psychiques) lors d’une conférence de l’institut Lilly.
Des ateliers pédagogiques à l’hôpital
Le programme Equilibre, élaboré par l’institut Lilly et mis à disposition des équipes soignantes des services psychiatriques hospitaliers et des centres de soins, vise à prévenir et à gérer les variations pondérales chez les patients souffrant de maladies psychiatriques. Ce programme se déroule en deux temps : la formation par des diététiciennes des équipes soignantes, puis la mise en place d’ateliers pédagogiques destinés aux patients dans les services concernés. Il s’agit de familiariser les malades avec les différents groupes d’aliments et, particulièrement, les graisses et les sucres, de leur apprendre à composer un repas, à maîtriser un budget, à éviter le grignotage (en préférant des collations équilibrées et programmées) et d’une façon générale à prendre soins d’eux-mêmes.
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