Nous l'avons déjà expliqué, le gouvernement s'est fixé plusieurs axes de travail dans son projet de loi de Finances 2004 : encourager le travail et favoriser l'emploi ; favoriser les solidarités entre générations ; stimuler l'innovation, la recherche et le développement ; rééquilibrer la fiscalité de l'énergie ; moderniser et simplifier l'impôt. Le point, aujourd'hui, sur les mesures relatives au second objectif, à savoir la solidarité entre générations.
Régime fiscal du PERP, Plan d'épargne-retraite populaire
Vedette incontestée de la série de réformes contenues dans le projet de loi de Finances pour 2004 : la création du PERP, Plan d'épargne-retraite populaire, qui traîne derrière lui la mise à mort du PEP (Plan d'épargne populaire) depuis le 25 septembre (les conditions des PEP ouverts avant cette date ne sont pas modifiées). Rappelons que l'article 111 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu, à compter de 2004, une incitation fiscale permettant à chacun de se constituer une épargne-retraite en complément des régimes par répartition : réduction du revenu net global des cotisations versées, à titre facultatif et en dehors de l'activité professionnelle, aux Plans d'épargne-retraite populaire (PEPR) et aux régimes Prefon et assimilés.
Cette réduction se fait dans la limite d'un plafond, exprimé pour chaque membre du foyer fiscal en proportion de ses revenus d'activité et assorti d'un plancher, qui permet d'accorder des possibilités de déduction plus élevées aux titulaires de rémunérations les plus faibles et de couvrir les inactifs, notamment le conjoint du foyer.
Sur cet avantage fiscal sont imputées, pour des raisons d'équité, les cotisations qui permettent déjà la constitution en franchise d'impôt, dans la cadre de l'activité professionnelle, des droits à la retraite en plus des régimes légaux de retraite par répartition (régimes de retraite supplémentaires rendus obligatoires par l'entreprise, régimes facultatifs Madelin, abondement de l'entreprise au PPESVR).
Parallèlement, cet encouragement à l'épargne est accompagné d'une simplification des règles de déduction des cotisations : déduction sans limite des cotisations versées aux régimes obligatoires de retraite complémentaires (ARRCO et AGIRC, pour les salariés) ; déduction sous un plafond spécifique des cotisations versées aux régimes obligatoires d'entreprise de retraite supplémentaire ou aux régimes Madelin ; déduction sous un plafond des cotisations versées au titre de la prévoyance.
Le nouveau dispositif du projet de loi de Finances fixe les différentes limites sous lesquelles les cotisations de retraite et de prévoyance seraient désormais déductibles de l'assiette de l'impôt sur le revenu :
- cotisations versées au titre de l'épargne-retraite (PERP) : limite maximale de 10 % des revenus d'activité professionnelle (dans la limite de huit fois le plafond annuel de la Sécurité sociale, dit P, soit 233 472 euros en 2003, donc une déduction annuelle maximale de l'ordre de 23 500 euros) ou de 10 % du plafond annuel de la Sécurité sociale (2 920 euros en 2003) ;
- cotisations de retraite des revenus professionnels (régimes obligatoires d'entreprise et régimes Madelin) : pour les salariés, 8 % de la rémunération annuelle brute retenue dans la limite de huit fois le plafond annuel de la Sécurité sociale ; pour les non-salariés, 10 % du bénéfice imposable, retenu aussi dans la limite de huit fois le plafond annuel de la Sécurité sociale.
Pour tenir compte d'une couverture plus réduite que celle des salariés (ARRCO/AGIRC) et, donc, de possibilités de déduction hors plafond plus limitées, les non-salariés bénéficieraient, sur la fraction du bénéfice supérieur à P (29 184 euros en 2003) et inférieure à 8 P (233 472 euros en 2003), d'un espace de déduction supplémentaire de 15 %. Les cotisations déductibles à ce titre ne seraient pas imputables sur le plafond de déduction de l'épargne-retraite (PERP).
En outre, un plancher annuel de déduction, égal à 10 % de P (2 920 euros en 2003), permettrait de prendre en compte la situation des entreprises déficitaires ou faiblement bénéficiaires, compte tenu de la spécificité des modes de détermination des bénéfices professionnels ;
- cotisations de prévoyance (maladie, maternité, invalidité, décès) des revenus professionnels (régimes obligatoires d'entreprise et régimes Madelin) : limite annuelle respectivement égale à 3 % de la rémunération annuelle brute et 3,75 % du bénéfice imposable, dans la limite de 8 P (233 472 euros en 2003). Ces limites seraient assorties d'un plancher égal à 7 % de P (2 043 euros en 2003) afin de prendre en compte la situation des titulaires des salaires ou bénéfices les moins élevés et les entreprises déficitaires.
Pour les médecins non salariés, la déduction des cotisations facultatives au titre de la perte d'emploi subie s'effectuerait dans la limite de 1,875 % du bénéfice imposable, également plafonné à 8 P. Un plancher de déduction, fixé à 2,5 % de P (730 euros en 2003), serait également applicable.
Réduction d'impôt au titre des frais de dépendance
Actuellement, les personnes dépendantes bénéficient d'une réduction de 25 % (dans la limite d'un plafond annuel de 2 300 euros) au titre de frais d'hébergement au sein d'un établissement de long séjour, ou des frais spécifiques à la dépendance lorsqu'elles sont hébergées dans un établissement ayant conclu une convention en matière d'assurance-maladie. En sont exclues les personnes hébergées dans un établissement d'un autre type.
Le dispositif proposé par le projet de loi de Finances souhaite élargir le dispositif, qui concernerait non plus 200 000 personnes comme aujourd'hui, mais 600 000, en l'étendant à tous les établissements engagés dans la réforme sociale, qu'ils aient ou non signé une convention ou qu'ils soient soumis à la tarification ternaire provisoire (soins, dépendance, hébergement). En outre, le plafond annuel des dépenses serait porté de 2 300 à 3 000 euros.
Equipements pour les personnes âgées ou handicapées
Afin de faciliter l'autonomie des personnes âgées ou handicapées, le gouvernement propose que les travaux d'installation d'équipement spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées (les mécanismes de sécurité et d'accessibilité, comme les mains courantes, les barres de maintien, les systèmes de commande, et les équipements sanitaires, comme les baignoires à porte, le siège de douche, l'évier à hauteur réglable...) ouvrent droit au bénéfice du crédit d'impôt pour dépenses d'équipements. Ces travaux devront être réalisés entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2005 dans la résidence principale, quelle que soit la date d'achèvement de l'immeuble. Le taux de crédit d'impôt applicable à ces travaux serait porté à 25 % (rappelons qu'il est de 15 % pour les équipements visant à la maîtrise de l'énergie ou à la protection des logements dans les zones à risque).
Réduction temporaire des droits sur les donations en pleine propriété, refonte des barèmes lors du démembrement des droits
Afin de renforcer l'encouragement des transmissions anticipées de patrimoine en pleine propriété, les donations consenties sous cette forme bénéficieraient d'une réduction des droits de mutation à titre gratuit de 50 %, quel que soit l'âge du donateur... réduction jusque-là limitée aux donateurs de moins de 65 ans (30 % après 65 ans, 0 % après 75 ans). Objectif : favoriser la transmission de l'intégralité des droits attachés à un bien (nue-propriété et usufruit), de nature à améliorer leur valorisation par les héritiers. Sont concernées les donations effectuées entre le 25 septembre 2003 et le 30 juin 2005.
En ce qui concerne les donations démembrées (donation de la nue-propriété, conservation de l'usufruit), le barème, qui datait de 1901, a été refondu pour tenir compte de l'espérance de vie actuelle (voir encadré). Cependant, afin de ne pas accroître l'avantage procuré aux donations en nue-propriété du fait de la revalorisation de l'usufruit dans ce nouveau barème, il est proposé de diminuer les réductions de droits de donation applicables aux donations portant sur la seule nue-propriété des biens. Ces réductions passeraient de 50 à 35 % des droits lorsque le donateur est âgé de moins de 65 ans, et de 30 à 10 % lorsqu'il est âgé de 65 ans révolus à 75 ans, et toujours de 0 % au-delà de 75 ans révolus.
Par souci de simplification, le barème déterminant des valeurs fiscales des droits démembrés serait étendu aux mutations à titre onéreux.
Premier vent de critiques
« Si certaines des mesures proposées vont dans le bon sens, en particulier celles qui visent à encourager l'épargne-retraite, l'ensemble n'exprime pas une politique de l'épargne claire, cohérente et stable, estime la Fédération bancaire française (FBF). Le projet en faveur de l'épargne-retraite répond à un vrai besoin, que prend en compte l'incitation fiscale proposée (déduction pouvant aller jusqu'à 10 % du revenu professionnel). Néanmoins, la complexité du système risque de décourager les Français qui voudraient y avoir recours. En effet, l'enveloppe de 10 % couvre trois produits différents : le Plan d'épargne-retraite populaire (PERP), les régimes de retraite supplémentaire (dits article 83) et l'abondement de l'entreprise au PPESVR. Pour améliorer la lisibilité du dispositif et en faciliter l'utilisation par tout un chacun, il serait souhaitable que l'abondement de l'entreprise fasse l'objet d'un traitement à part ; l'épargnant pourrait ainsi mieux gérer les sommes qu'il souhaite affecter lui-même à son épargne retraite. »
Et de critiquer également d'autres mesures (suppression du PEP, suppression de l'avoir fiscal, qui touche directement les petits porteurs individuels d'actions et les détenteurs de PEA) et remettre en cause certains dispositifs d'épargne, notamment ceux de l'épargne longue qui finance les entreprises et les investissements du secteur productif.
« Ces deux propositions, qui viennent s'ajouter à la réforme impromptue du PEL en décembre 2002, sont des facteurs de déstabilisation et d'incertitude pour l'épargnant, qui ne lui donnent ni lisibilité ni visibilité sur les grandes orientations économiques. »
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