LES MEDICAMENTS dits « orphelins » sont des médicaments utilisés tant pour le diagnostic que pour la prévention et le traitement des maladies rares. Du fait du nombre très restreint d'utilisateurs, ces médicaments sont économiquement peu intéressants pour l'industrie pharmaceutique.
Sous l'impulsion et la pression des associations de malades, une législation sur les médicaments orphelins a vu le jour, d'abord aux Etats-Unis en 1983, puis au Japon et en Australie en 1990. En décembre 1999, l'Europe a adopté à son tour un règlement favorisant la mise sur le marché de « médicaments orphelins ». C'était l'aboutissement d'un projet activement porté par Eurordis (coordination européenne des associations de maladies rares), soutenue notamment par l'AFM (Association française contre les myopathies), organisatrice du Téléthon en France. Cette législation a été « un fer de lance sur un plan politique, économique d'une possibilité de développement de médicaments améliorant la condition de milliers de personnes », souligne Yann Le Cam. Il préside le Comité des médicaments orphelins (Comp), qui a très rapidement (en avril 2000) vu le jour, à l'Agence européenne des médicaments, à Londres.
Cette réglementation européenne, qui établit une procédure communautaire pour la désignation de médicaments orphelins, offre des incitations pour la recherche, l'élaboration et la mise sur le marché de tels médicaments. Parmi les incitations les plus importantes, on retiendra l'exclusivité commerciale pour une période de dix ans après l'AMM, dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, un avantage concurrentiel conséquent puisqu'aucun produit similaire concurrent ne peut être commercialisé. On note également des coûts réduits pour toutes les étapes de la procédure centralisée de mise sur le marché à l'Agence européenne d'évaluation des médicaments (Emea), des aides au développement des essais cliniques, un accès prioritaire des programmes de recherche européens, une accélération des procédures.
Deux cent cinquante molécules à l'étude.
Cinq ans après l'adoption de la législation, le bilan apparaît très positif : 409 dossiers ont été soumis au Comp, dans lequel des malades « experts du vécu de la maladie » participent aux décisions ; 251 médicaments ont été désignés comme orphelins et sont en cours de développement ; 18 médicaments orphelins ont été mis sur le marché, bénéficiant potentiellement à 250 000 malades.
A ce concept de santé publique qui avance dans toute l'Union européenne, améliorant la vie de millions de malades, la France participe activement, puisque 29 % des AMM pour les médicaments orphelins européens sont « d'origine France ». Notre pays est, avec le Royaume-Uni, un des leaders dans ce domaine. Les médicaments orphelins sont à l'origine de la création de nombreuses entreprises spécialisées. Ils contribuent au développement d'un nouveau secteur d'activité pour les biotechnologies, les laboratoires pharmaceutiques.
Seules ombres au tableau, les délais et les conditions d'accès inégaux à ces médicaments (par exemple, trois centres en France seulement délivrent Fabrazyme, algasidase bêta, pour le traitement de la maladie de Fabry), dans un même pays et à l'intérieur de l'UE, la difficulté parfois d'obtenir des données sur ces médicaments. L'un des objectifs actuels d'Eurordis est d'obtenir un accès « réel et rapide à de nouveaux traitements sûrs et efficaces pour le plus grand nombre de patients atteints de maladies rares en Europe ».
Les maladies rares
La définition d'une maladie rare repose sur le nombre restreint de malades en regard de la population générale, moins d'une personne sur deux mille. Si, prise individuellement, chaque maladie rare affecte un nombre très faible de patients, considérées dans leur ensemble, les 5 000 à 7 000 maladies rares touchent de 6 à 8 % de la population, soit 24 à 36 millions de personnes dans la communauté européenne, dont 50 % d'enfants. A 80 % d'origine génétique et à 20 % d'origines diverses (virus, bactéries, substances chimiques...), les maladies rares sont très diverses, mais possèdent des caractéristiques communes : elles sont graves, chroniques, évolutives, invalidantes, douloureuses, altèrent fortement la qualité de vie du patient, mettent souvent en jeu le pronostic vital. Dans la majorité des cas, il n'existe aucun traitement.
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