LES SYNDICATS de médecins espéraient secrètement que Xavier Bertrand prenne du galon. Beaucoup ont appris avec soulagement sa nomination au ministère de la Santé et des Solidarités. « C'est une satisfaction de voir que la continuité est la règle et que le chef d'orchestre de la réforme de l'assurance-maladie succède à Philippe Douste-Blazy », commente le Dr Michel Chassang. Le président de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf) constate « la montée dans l'ordre protocolaire » du ministère de la Santé, avec la création d'un ministère délégué à la Sécurité sociale, « signes que la santé est reconnue comme une priorité nationale à l'heure où d'importantes réformes sont engagées ». Le Dr Chassang souhaite maintenant que la composition d'un nouveau gouvernement entraîne l'accélération du processus conventionnel, ralenti par le référendum sur la Constitution européenne.
« Maintenant, le turbo ».
Dans un communiqué commun, les Drs Chassang et Cabrera demandent la tenue avant le 15 juin d'une réunion décisionnelle sur la Classification commune des actes médicaux (Ccam), l'un des dossiers en suspens de la réforme.
Le Dr Dinorino Cabrera, président du Syndicat des médecins libéraux (SML), espère que la nomination de Xavier Bertrand à Ségur permettra de rattraper le temps perdu. « L'homme connaît bien les dossiers et nous avons beaucoup travaillé avec lui. » Le président du SML dresse la liste des sujets bloqués auxquels devra s'atteler très vite le nouveau ministre. « Ccam, secteur optionnel, tarifs CMU... Plein de petits dossiers "traînaillent" comme le C2 des anesthésistes et des anapaths (avis d'expert ponctuel) . Il est temps de rendre une copie complète. »
Le Dr Pierre Costes, président de MG-France, souhaite pour sa part que les attentes exprimées par les 13 000 médecins généralistes qui ont répondu au référendum de son syndicat soient prises en compte. « Le moment n'est pas de s'interroger sur les ministres, mais de savoir s'ils rouvriront le dialogue social comme l'a annoncé Dominique de Villepin », annonce-t-il. Le chef de file de l'opposition à la convention médicale voit dans la composition du nouveau ministère un signe encourageant. « Plusieurs hommes aux manettes du gouvernement connaissent les difficultés de la médecine générale » : le secrétaire général de l'Elysée, Frédéric Salat-Baroux, Philippe Bas, Xavier Bertrand sont de ceux qui ont piloté la réforme de l'assurance-maladie. Pierre Costes escompte « une ouverture du dialogue entre le gouvernement et toutes les composantes de la médecine générale, praticiens, enseignants, internes, afin d'obtenir enfin une reconnaissance universitaire, professionnelle, conventionnelle et tarifaire pour la médecine générale ».
Quelle place pour l'hôpital ?
La nomination de Xavier Bertrand soulève diverses interrogations chez les médecins hospitaliers. Le Dr Rachel Bocher, présidente de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (Inph) lâche tout de go : « Je n'ai aucune certitude, mais j'ai des craintes. L'hôpital n'a pas été consulté sur la réforme de l'assurance-maladie, le parcours de soins ou le dossier médical personnel (DMP) . Allons-nous vers une privatisation de l'hôpital public ou le maintien d'un service public fort à l'hôpital ? »« Sans a priori », le Dr Bocher jugera « sur pièces ». « Il faut un signal fort permettant de renouer le dialogue, restaurer la confiance et engager l'hôpital au centre du débat », ajoute-t-elle. Le Dr Pierre Farragi, président de la Confédération des hôpitaux généraux (CHG), veut rencontrer rapidement Xavier Bertrand pour aborder les sujets hospitaliers les plus urgents, comme la réforme du statut des PH ou la budgétisation des établissements, « dont certains sont dans des situations préoccupantes ».
Les étudiants en médecine ont été prompts à réagir à la composition du gouvernement. Ils réclament une plus grande écoute des ministres de la Santé et de l'Education nationale. « De nombreux dossiers ont été lancés et il ne faudra pas les oublier lors de la transmission de témoin », explique l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf). « Stage chez le praticien en 2e cycle, choix de sa discipline et de sa ville d'internat par amphithéâtre, redoublement des 6e année, démographie médicale, répartition sur le territoire et conditions d'accès au 3e cycle... », autant de sujets dont les carabins souhaitent l'aboutissement dans les semaines à venir. En grève en début d'année, les internes de médecine générale (Isnar-IMG) veilleront à ce que le ministre de la Santé poursuive la réflexion sur la reconnaissance universitaire et professionnelle de leur spécialité. Le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (Snjmg) est plus exigeant et presse déjà le nouveau gouvernement « de surseoir à la mise en place du médecin traitant et d'engager avec toutes les parties prenantes les concertations nécessaires à la refonte de ce projet ».
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