LES MÉDECINS seraient-ils l'exception ? On serait tenté de le croire à la lecture des résultats du sondage réalisé par l'IFOP (1) pour « le Quotidien » auprès de 402 médecins, spécialistes et généralistes.
En effet, alors que l'ensemble des Français affirmaient leur profond pessimisme dans une étude similaire publiée il y a quelques semaines par « le Journal du dimanche », les médecins libéraux affichent aujourd'hui leur optimisme. Ainsi, 61 % d'entre eux (contre 33 % seulement pour l'ensemble de la population) sont confiants en l'avenir et 39 % disent le contraire.
Si l'on regarde de plus près les résultats de ce sondage, on constate que ce sont les femmes médecins (66 %) et les moins de 45 ans (69 %) qui sont les plus optimistes. Mais on ne note guère de différences selon les sensibilités politiques, puisque ceux qui disent avoir voté Ségolène Royal ou François Bayrou lors du dernier scrutin présidentiel sont aussi optimistes que les électeurs de Nicolas Sarkozy.
Comment expliquer ce sentiment, alors que se profilent à l'horizon des décisions que n'applaudiront sans doute pas la majorité des médecins libéraux ?
Le médecin, confronté chaque jour à la maladie et à des situations sociales difficiles, des cas sociaux souvent douloureux, relativise ses propres difficultés. Ce qui peut éclairer du moins en partie les résultats de ce sondage et la différence notable avec ceux des Français. Les praticiens, malgré leurs problèmes, sont conscients que leur situation est moins difficile que celle que connaissent beaucoup de leurs concitoyens. Ce qui explique sans doute aussi qu'ils sont une majorité notable à affirmer qu'ils conseilleraient à leurs proches de devenir médecin. Ils sont ainsi 56 % contre 43 % à estimer que le métier de médecin reste une profession intéressante à exercer. Ce sont, là encore, les plus jeunes, les moins de 45 ans, qui sont les plus enthousiastes, puisque 64 % d'entre eux (contre 54 % pour les plus de 45 ans) sont prêts à recommander le métier de médecin. À noter que les spécialistes seraient plus nombreux à le faire que les généralistes et que les médecins de la région parisienne semblent les moins « heureux », puisque seuls 48 % d'entre eux conseilleraient à leurs proches d'embrasser la même carrière qu'eux.
Désenchantés.
Mais les médecins dans leur ensemble ne se voilent pas la face. Car s'ils affirment leur optimisme et sont prêts à conseiller à leurs proches le métier de médecin, ils sont dans le même temps très critiques sur la politique du président de la République et du gouvernement en matière de santé et de protection sociale. Ce qui peut sembler paradoxal. Il est clair que les projets des pouvoirs publics inquiètent les médecins, et les derniers échos de la future loi Patients, santé territoires n'y sont sans doute pas pour rien.
Ainsi, seuls 37 % des médecins libéraux contre 38 % en février dernier et surtout 57 % il y a tout juste un an, en septembre 2007, portent un jugement positif sur la politique de santé et de protection sociale définie par Nicolas Sarkozy et conduite par le gouvernement. À l'inverse, 62 % (contre 59 % en février et seulement 39 % il y a un an) la condamnent. Le jugement est sans appel. Même les médecins qui ont voté Sarkozy en mai 2007 avouent leurs réticences et sont aujourd'hui moins tolérants qu'hier, puisque 45 % d'entre eux critiquent les orientations du gouvernement en matière de santé et de protection sociale et que « seulement » 54 % l'approuvent contre 58 % en février et… 76 % il y a un an. Le désenchantement est clair, d'autant que – et c'est la première fois que cela apparaît –, dans toutes les catégories d'âge, les opinions négatives de l'ensemble des médecins l'emportent sur les avis positifs.
Ce sentiment de déception se retrouve lorsque l'on demande aux médecins libéraux leur opinion sur la ministre de la Santé. Le résultat est sévère pour Roselyne Bachelot qui, il y a un an, recueillait 53 % d'avis favorables et même 62 % en mai 2007, peu après son arrivée au ministère de la Santé. Aujourd'hui, elle n'obtient que 44 % d'avis favorables (contre 46 % en février dernier). La cote de Roselyne Bachelot ne cesse de se dégrader et il n'est pas certain que cela s'arrange dans les prochains mois, vu les projets du gouvernement et de la ministre de la santé.
(1) Sondage réalisé par l'IFOP pour « le Quotidien du Médecin » à partir d'un échantillon de 402 médecins, 255 généralistes et 147 médecins spécialistes.
La représentativité de l'échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, spécialité) après stratification par région et catégorie d'agglomérations. Les interviews ont eu lieu, du 1er au 3 septembre 2008, par téléphone au domicile des personnes interrogées.
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