Après la catastrophe sanitaire provoquée par la canicule, le trou de la Sécu... serait en partie imputable aux médecins libéraux ! Ce nouveau procès, implicite, fait bondir plusieurs syndicats depuis quelques jours.
Le rapport de la Cour des comptes cite en effet les revalorisations d'honoraires des généralistes ou la mise en place d'un système inflationniste de visite à tarif majoré (VMMD) pour les patients âgés de plus de 75 ans en ALD parmi les « décisions majeures » ayant entraîné une accélération de la croissance des dépenses depuis 2000. Et donc l'aggravation des déficits. Plusieurs médias grand public n'ont d'ailleurs pas hésité à établir aussitôt un lien de cause à effet entre les revalorisations tarifaires accordées aux médecins et la situation catastrophique des comptes sociaux. Même si les magistrats de la rue Cambon justifient aussi l'évolution incontrôlée des dépenses par la « forte croissance des indemnités journalières », les « protocoles hospitaliers » signés en 2000 et 2001 ou encore la « renonciation au déremboursement des médicaments à SMR insuffisant », les médecins libéraux acceptent d'autant plus mal cette « culpabilisation » que la Cour des comptes a rendu public un chiffrage erroné de l'accord conclu avec les généralistes en 2002 et a sous-estimé, semble-t-il, les compensations induites par les actions sur les génériques, les antibiotiques et les visites (« le Quotidien » du 22 septembre).
« Le Titanic, c'est nous »
« Nous pouvons l'avouer maintenant, la grande peste c'est nous, le naufrage du Titanic c'est nous, Tchernobyl, c'est nous, la tempête de 1999 c'est encore nous, l'Erika c'est toujours nous et les enquêtes finiront bien par montrer que nous ne sommes pas étrangers à la faillite du Crédit lyonnais, d'Alstom et à la déconfiture de Vivendi Universal », ironise le Dr Jean-Marc Rehby, président de la branche généraliste de la Fédération des médecins de France (FMF). « En enfonçant toujours le même clou, haro sur les médecins, vous avez mis en place un numerus clausus catastrophique conduisant à une pénurie de médecins, de psychiatres, d'anesthésistes et surtout de chirurgiens généralistes », poursuit le Dr Rehby. La Coordination nationale des médecins généralistes (CONAT) dénonce, dans le même registre, les « accusations fantaisistes de la Cour des comptes ». Alors que celle-ci affirmait dans son rapport que les effets compensatoires (hausse des génériques, baisse des visites...) des revalorisations du C et du V étaient « réels mais limités (70 millions d'euros environ) », la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) a corrigé le tir en affirmant au contraire que l'accord était déjà majoritairement autofinancé (150 millions d'euros d'économies contre un surcoût de 270 millions d'euros en année pleine). Un calcul confirmé par le ministère de la Santé.
Les spécialistes libéraux, et notamment les chirurgiens du secteur I qui attendent en vain une revalorisation de leurs honoraires, sont également montés au créneau pour fustiger certains raccourcis transformant les médecins en boucs émissaires permanents. « Nous ne pourrions accepter une quelconque diabolisation des professionnels de santé libéraux », avertit le Dr Jean-Gabriel Brun, vice-président d'Alliance, pour qui 200 cliniques privées sont « déjà promises à une fermeture pure et simple d'ici à deux ans ». Pour le syndicat, l'analyse et la connaissance du « coût comparé du soin hospitalier public et privé » sont indispensables.
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