LE PROJET DE LOI de financement de la Sécurité sociale (Plfss) de 2005 adopté en Conseil des ministres prévoit de ramener le déficit de l'assurance-maladie de 13 à 8 milliards d'euros et un objectif national des dépenses d'assurance-maladie (Ondam) de + 3,2 % (1). Pour la première fois, le ministre de la Santé a précisé que le volet hospitalier de cet Ondam serait « probablement » fixé à + 3,6 % pour les secteurs public et privé (« le Quotidien » d'hier). Sans être un grand mathématicien, on peut en conclure que l'enveloppe réservée à la médecine de ville devrait être particulièrement « serrée », pour reprendre l'expression des représentants des syndicats de médecins libéraux.
Dubitatifs ces dernières semaines quant aux objectifs affichés par le gouvernement, les syndicats ne manquent pas de souligner la volonté de fixer un Ondam faible mais aussi son « irréalisme ». Le Dr Michel Chassang, président de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf), trouve dommageable de fixer un Ondam à un niveau trop bas pour la médecine libérale, « à l'heure où une enquête montre que 20 % des prescriptions de ville viennent de l'hôpital » (« le Quotidien » du 4 octobre). Le président de la Confédération indique qu'il mettra « tout en œuvre pour parvenir à remplir cet objectif s'il y a une convention », mais il ne se sent « pas dans une obligation de résultats ». Quoi qu'il arrive, « les honoraires des médecins ne seront pas la variable ajustable d'un Ondam pifométrique ».
Le Dr Dinorino Cabrera affiche le même état d'esprit. Le président du Syndicat des médecins libéraux (SML) voit « un encouragement mais pas une promesse » dans cet Ondam « un peu trop serré » à son goût. « En 1993, après la signature de la convention, l'objectif était de 3,4 % et nous avions fait 1,6 », se souvient le Dr Cabrera. Le président du SML veut donc rester optimiste : « On est dans le domaine du possible, c'est le moment de se retrousser les manches. »
Une part d'incohérence.
Le Dr Pierre Costes, président de MG-France, décèle pour sa part une incohérence entre les objectifs et les moyens que se donne le gouvernement : « Le ministère ne peut pas demander un médecin traitant pour chaque assuré sans donner les moyens économiques nécessaires à sa mise en place. Cette réforme va entraîner des transferts de l'hôpital sur la ville. Qu'il s'agisse d'interruptions journalières ou de transports, la nouvelle règle veut que le médecin traitant soit en charge de ces prescriptions. »
Le Dr Jean-Claude Régi, président de la Fédération des médecins de France (FMF), ne comprend pas que l'on « charge la barque des médecins libéraux ». L'objectif global de 3,2 % lui paraissait déjà très audacieux. « Avec un Ondam à + 3,6 % pour les hospitaliers, je crains fort que l'on fixe des objectifs "irréalisables" à la médecine de ville et qu'elle ne soit pas dans les clous... » Le Dr Régi est d'autant plus sceptique que les dispositifs de maîtrise médicalisée (le médecin traitant et le dossier médical personnel) - dont le ministère attend un milliard d'économies en 2005 - n'auront « pas d'effet immédiat ».
Le Dr Felix Benouaich, président d'Alliance, s'interroge également sur les sources d'économie attendues : « 2,9 millions, d'accord mais sur quoi et comment ? »
Pour se donner toutes les chances de tenir l'Ondam 2005, les médecins libéraux demandent que les négociations conventionnelles commencent au plus vite. « Les choses traînent en longueur et le temps est contre nous », conclut le Dr Chassang.
(1) L'objectif national de dépenses d'assurance-maladie (Ondam) réduit à + 3,2 %, équivaut en fait à + 3,8 % (contre 4 % en 2004 et 5,3 % en 2003), compte tenu de la réduction du périmètre des dépenses.
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