Les médecins libéraux restent déterminés contre le projet de loi de santé du gouvernement. Après avoir observé une période de retenue à la suite de l’attentat terroriste contre « Charlie Hebdo », les cinq syndicats représentatifs se sont retrouvés jeudi soir pour décider de la suite à donner à leur mouvement de contestation contre la réforme de Marisol Touraine. Tous réclament l’ouverture d’une négociation tarifaire en urgence pour porter la consultation à 25 euros – la ministre de la Santé a pour l’heure fermé la porte à toute revalorisation.
Modus vivendi
Selon nos informations, la CSMF, MG France, le SML, et la FMF ont décidé, avec le soutien du BLOC, de poursuivre et d’amplifier la guérilla administrative entamée début janvier (grève de la télétransmission, boycott des téléservices de l’assurance-maladie). « De nouvelles actions coups de poing seront annoncées dans les jours à venir », prévient un leader syndical, désireux de ne pas brûler toutes ses cartouches. La grève nationale des gardes pourrait être relancée après celle menée fin décembre. La Basse-Normandie a déjà lancé ce mouvement (lire page 4).
Malgré les divisions stratégiques d’autant plus marquées que les élections professionnelles approchent, les syndicats ont trouvé un modus vivendi. Ils ont décidé de ne pas participer aux groupes de travail dans la configuration initiale proposée par le ministère de la Santé (sur le tiers payant, la politique régionale, la délégation de tâches). « Il était prévu de confier la direction du groupe de travail sur le volet territorial du projet de loi à une directrice d’ARS, c’est une provocation », s’étrangle le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux de France (CSMF).
Eviter la tutelle de la CNAM sur les honoraires
Les syndicats affichent donc un front uni pour revoir les modalités de la concertation autour du projet de loi dont l’examen au Parlement est programmé en avril. « Les groupes de travail doivent être redéfinis sur leur pilotage et leurs thématiques », précise le Dr Ortiz. Les médecins veulent aussi participer à la concertation sur l’accessibilité financière dans les cliniques et aborder le volet de la prévention.
Depuis quelques jours, les médecins sont surtout en quête d’un compromis sur la problématique du tiers payant, dont la généralisation est annoncée à l’horizon 2017. Si les syndicats refusent catégoriquement tout système obligatoire, ils recherchent des solutions techniques acceptables pour la dispense d’avance de frais (au-delà du tiers payant social qui fait consensus). La piste d’une carte monétique à débit différé (comme celle déjà mise en place par le Crédit mutuel) a la préférence d’au moins deux organisations (la CSMF et la FMF). Elle est envisagée par MG France mais rejetée par le SML.
« Cette solution présente un double avantage, affirme le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF. Elle garantit aux médecins d’être réglés entièrement et aux patients d’être débités après avoir été remboursés. » Ce système permettrait de ne pas placer le paiement des professionnels sous la coupe de l’assurance-maladie et d’assurer directement le règlement des dépassements aux praticiens en secteur II.
Sortie de crise ?
« Tout le monde refuse le tiers payant obligatoire, tout le monde veut un tiers payant simple, efficace, avec un seul flux, disponible pour les médecins qui veulent le pratiquer », explique le Dr François Wilthien, vice-président de MG France, prêt à discuter d’« outils utiles et intelligents ». « On ne veut pas le collier étrangleur de la Sécu », ajoute le Dr Hamon.
Présentée dès mars 2014 lors d’un premier groupe de travail infructueux sur le tiers payant, cette solution monétique n’a pas été retenue par le ministère de la Santé, rétif à l’implication centrale du monde bancaire dans cette réforme. « Nous proposons une porte de sortie de crise, il faut que la ministre la prenne », confie un leader syndical.
S’il approuve l’unité de la profession pour amplifier la grève, le Syndicat des médecins libéraux (SML) se démarque, refusant tout compromis sur le tiers payant. « Il faut que Marisol Touraine retire son texte afin que nous le réécrivions », explique son président, le Dr Eric Henry.
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