LE «CERTIFICAT médical datant de moins de deux mois attestant, à l'exclusion de tout autre indication, que l'intéressé a été examiné», exigé de tout candidat au mariage, qui reçoit en échange une brochure d'éducation sanitaire ainsi que des informations sur la grossesse, la contraception et les MST (proposition de dépistage du VIH), est promis à la disparition. Cette disposition, qui figure dans le code civil depuis 1942 (article 63), vit ses derniers moments. Une proposition de loi relative à la simplification du droit en demande l'abrogation, ainsi que de 125 autres textes législatifs. Adoptée par l'Assemblée le 9 octobre, en première lecture, elle sera examinée au Sénat le 25 octobre.
Selon les auteurs de la proposition, Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois du Palais-Bourbon, Etienne Blanc et Yves Jego, tous trois députés UMP, il est temps de tourner la page, sachant que 47 % des naissances se déroulent hors mariage. D'autant que cela permettrait de faire économiser à l'assurance-maladie 14 millions d'euros chaque année. De telles dépenses «ne se justifient plus», disent-ils.
Une logique de politique sanitaire.
Pour le Dr Emmanuelle Piet, médecin de protection maternelle et infantile en Seine-Saint-Denis, «il est fâcheux que la gratuité n'ait plus cours. Nous allons retrouver les patientes en prénatal, à un moment où, bien entendu, il devient impossible de procéder à des vaccinations [rubéole, en particulier, NDLR]. La suppression de cet examen –qui permet, entre autres, de faire le point sur la toxoplasmose, la syphilis ou encore le VIH– au nom d'une certaine égalité, puisque les pacsés et les personnes vivant en couple de manière non déclarée s'en trouvaient exclus, appelle, de mon point de vue, à l'instauration pour tous d'une consultation gratuite préconceptionnelle. Heureusement, il reste les centres de planning familial. Personnellement, j'y assure ce qui est recommandé dans le cadre de feu l'examen prénuptial.»
Sur le même ton, le Dr Jacques Waynberg, directeur de l'Institut de sexologie de Paris, fait remarquer que la mesure, «empruntée au régime réactionnaire de Vichy interdisant l'avortement et la contraception» [loi de 1920] s'inscrit dans «une logique de politique sanitaire et d'information du public. Des jeunes gens qui n'avaient jamais eu de contact avec un médecin trouvaient l'occasion d'entendre parler de prévention et pourquoi pas de sexualité», souligne le spécialiste, qui est responsable du diplôme universitaire de sexologie et de santé publique à Paris-VII. Il y voit «une perte pour le couple et surtout pour le généraliste qu'on cantonne dans les fonctions de réparateur des pannes et des sévices de la vie. Son rôle de conseil, une fois de plus, passe à la trappe!».
Trouver un dispositif de substitution.
«Le dispositif était obsolète, pense pour sa part le Dr Philippe Lefèbvre, ex-président de l'Association nationale des centres d'interruption volontaire de grossesse et de contraception. Il ne s'adressait qu'aux personnes désireuses de se marier, négligeant toutes celles qui vivent en couple hors mariage. Pour autant, j'estime regrettable qu'on ne prévoit pas la mise en place de quelque chose d'autre qui apporterait le même type d'informations», commente le gynécologue médical.
François Bourdillon, président de la Société française de santé publique, considère comme «une bonne chose» le fait d'écarter «une obligation». En contrepartie, lui aussi souligne la nécessité de ne pas relâcher, au sein du colloque singulier, la prévention des risques liés aux futures grossesses. «L'examen prénuptial était atteint par un péché originel», dit au « Quotidien », en relevant la date 1942, le Dr André Deseur, conseiller ordinal national, vice-président de la section de l'exercice professionnel et généraliste en Seine-et-Marne. «Cela étant, ajoute-t-il, il permettait un inventaire de l'état de santé d'une jeune femme vue pour un motif autre que la maladie. Il offrait la possibilité de détecter des facteurs de risque de transmission de maladie héréditaires ou génétiques. Enfin, si le changement annoncé doit simplifier la vie des citoyens!»
«L'objectif est de réduire les formalités demandées aux usagers», confirme le ministre du Budget, Eric Woerth, dans un entretien au « Figaro » du 9 octobre. «Je regrette, conclut le Dr Deseur, que le Parlement n'ait pas consulté de sociétés savantes sur le sujet.» Dans l'exposé des motifs de la proposition de loi sur la simplification du droit, il est indiqué que les conseils généraux diffuseront une brochure d'information aux personnes en âge de procréer.
Mariages et certificat
– L'an dernier, 274 400 mariages ont été célébrés, 8 800 de moins qu'en 2005 ; dans huit mariages sur dix, les époux se marient pour la première fois. Les mariages ont lieu de plus en plus tard : à 29,1 ans en moyenne pour les femmes et 31,1 ans pour les hommes (chiffres 2005). Quant aux PACS, leur nombre progresse rapidement : 60 500 ont été conclus en 2005 et 57 500 pour les trois premiers trimestres de 2006.
– Le certificat prénuptial est rempli en deux exemplaires après deux consultations et des examens biologiques. Pour les femmes de moins de 50 ans sont obligatoires des examens sérologiques de la rubéole et de la toxoplasmose, la détermination des groupes sanguins et Rhésus et, le cas échéant, la recherche d'anticorps irréguliers. Le médecin doit proposer aux futurs conjoints un test VIH, auquel peuvent être ajoutés des sérologies des hépatites B et C et de la syphilis. Le praticien doit, en outre, commenter la brochure d'information donnée aux conjoints.
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