« Le rendez-vous et fixé ce vendredi 4 mars à 13 heures. Les patients et les confrères se sont relayés pour le faire passer. J’espère qu’il y aura du monde », dit en préambule le Dr Joselyne Rousseau, généraliste installée à Pierrefitte (Seine-Saint-Denis) et présidente de l’Association des professionnels de santé de cette ville du 93. La raison de ce rassemblement de soutien et de ras-le-bol? L’agression dont a été victime la semaine dernière une gynécologue de Pierrefitte à son cabinet. L’auteur des faits, prétextant un rendez-vous pour sa mère, pénètre dans le cabinet et tente de dérober le sac du médecin. Cette dernière résiste. Elle est violemment frappée à la tête et souffre d’une fracture de la main. L’âge de l’agresseur, interpellé lundi ? 17 ans.
Violence des mineurs
« C’est une triple réalité que nous observons depuis en gros, août 2009. Auparavant, les agressions auxquelles devaient faire face les professionnels de santé de nos communes limitrophes de Pierrefitte et de Stains, n’étaient que sporadiques. Mais depuis deux ans, elles ont augmenté en violence et sont surtout commises par des mineurs », explique le Dr Rousseau qui sait de quoi elle parle. Installée à Pierrefitte au tout début des années 80, elle-même a, dû faire face à dix-sept agressions: de la tentative de vol de son sac à main au sortir du cabinet, à la menace armée. C’est d’ailleurs ce dernier acte de violence qui s’est produit en octobre 2009 qui l’a amenée à « sécuriser » un peu plus son cabinet. Ainsi, à l’alarme qu’elle avait déjà installée en 2003, le Dr Rousseau y a désormais adjoint une caméra vidéo à l’entrée.
Pour autant, cette praticienne qui exerce en solo se refuse « à baisser les bras. Dans la commune, les rapports, tant entre médecins qu’avec les patients sont très bons. Ces actes de violence ne sont le fait que d’une minorité ». Mais face à laquelle, Joselyne Rousseau et ses confrères se sentent sinon désemparés, du moins sérieusement démunis. Faute d’appuis. « La population de Stains et de Pierrefitte s’est accrue de quelque 10 000 habitants en quelques années. Tandis que dans le même temps, l’effectif des policiers municipaux a diminué de cinquante agents », développe la généraliste, qui ne cache pas regretter le temps de la police de proximité.
Car aujourd’hui, la mairie a beau faire preuve de compréhension, elle semble, elle aussi être dépassée par le phénomène. Comme le résume le Dr Rousseau « ils font ce qu’ils peuvent ». Côté commissariat, les professionnels de santé de la ville ont, en revanche, obtenu un peu plus de résultats concrets. Comme la désignation, il y a quatre ans, d’un référent santé, forme d’interlocuteur privilégié auprès duquel les praticiens peuvent déclarer les tentatives de vols ou d’agression et porter plainte…
Rage et colère
Mais cela ne leur suffit plus. A l’appel de l’association, professionnels de santé et patients ont décidé de prendre leur exercice en main et de taper du poing sur la table. « Il y a une forme de rage et de colère. Nous voulons résister », s’emporte Joselyne Rousseau. Le rassemblement de vendredi n’est qu’une première étape. Le 15 mars prochain, une délégation a rendez-vous à la préfecture de Bobigny pour faire entendre sa voix auprès des tutelles, parmi lesquelles l’ARS et la cpam. « Il faut que notre mission de service public, celle du soin délivrée à la population soit reconnue et qu’on nous donne les moyens de continuer à l’assumer », martèle celle qui continue à assurer ses tours de garde à la maison médicale de garde de Saint-Denis et qui n’a pas renoncé à aller en visite au domicile de ses patients de la cité située à quelques encablures de son cabinet.
Forte du soutien de la population du quartier, « qui signe et fait tourner les pétitions », le Dr Rousseau et ses confrères ne se laisseront certainement pas chasser de leur commune. Marre d’être des victimes et des cibles privilégiées, les professionnels de santé de Pierrefitte et de Stains en appellent désormais aussi "au ministère de l’Intérieur". Message transmis à Claude Guéant, nouveau patron de la Place Beauvau.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature