La coqueluche, une maladie respiratoire oubliée

Les médecins doivent être sensibilisés

Publié le 12/06/2007
Article réservé aux abonnés

DE NOTRE CORRESPONDANT

LES ANNÉES 1950 sont bien loin, quand l'infection à Bordetella pertussis et à Bordetella parapertussis était responsable d'une cinquantaine de décès par an. Depuis la généralisation de la vaccination décidée en 1966, le nombre de cas de coqueluche a régulièrement baissé. La déclaration obligatoire a été arrêtée en 1986. Mais, en dépit d'une couverture vaccinale élevée et d'un vaccin efficace, la maladie est réapparue au début des années 1990. Un Centre national de référence a été mis en place à l'Institut Pasteur dès 1993 pour la surveillance des souches et, en 1996, un réseau de surveillance de la maladie est créé, Renacoq, qui regroupe des cliniciens et des bactériologistes chargés de notifier les cas de coqueluche vus en consultation ou hospitalisés.

Selon les plus récentes données disponibles, la coqueluche a été responsable de 35 décès entre 1996 et 2005, dont 80 % concernaient des enfants de moins de 3 mois. La réémergence s'explique par une diminution de la protection vaccinale dans le temps et des rappels naturels peu fréquents du fait de la vaccination et du faible taux de souches circulantes. Le visage de la maladie s'est transformé. «Depuis une dizaine d'années, la coqueluche se manifeste à nouveau avec une modification de ces carac-téristiques épidémiologiques, explique le Dr Sophie Gibaud, biologiste au laboratoire de bactériologie et d'hygiène hospitalière du CHU de Nantes. L'incidence augmente chez les adolescents et chez l'adulte et «la transmission ne se fait plus d'enfant à enfant, mais de parent à enfant».

Toux inexpliquée.

Chez l'adulte, la maladie peut prendre une forme atypique. Une étude publiée en 1999 a montré que, chez les adultes, un tiers des toux inexpliquées et persistantes, au-delà de sept jours, étaient des coqueluches. «Le diagnostic est difficile à poser chez l'adulte, précise le Dr Sophie Gibaud. On y pense souvent au bout de deux ou trois semaines. Dans les premiers jours, la personne peut avoir le nez et les yeux qui coulent, la gorge qui picote. Puis une toux s'installe. Tout laisse penser à une petite rhinite, à une bronchite qui traîne.»

Un diagnostic difficile à poser, mais crucial tant, souligne la biologiste nantaise, «tout va dans le sens d'un réservoir bactériologique constitué par les adultes et les adolescents».

Les parents sont à l'origine de la contamination des nourrissons dans 54 % des cas et la fratrie dans 26 % des cas. Bordetella pertussis est une bactérie productrice de toxines qui se transmet très facilement au cours de la première semaine après le début des symptômes.

La réunion organisée par le CHU de Nantes (service de néonatologie-réanimation pédiatrique, des maladies infectieuses et tropicales et le Laboratoire de bactériologie et hygiène) et soutenue par l'Institut Pasteur et les Laboratoires sanofi-Pasteur-MSD, avait pour objectifs de sensibiliser et d'informer les professionnels de santé, médecins généralistes, pédiatres, gynécologues, pharmaciens, ou encore les acteurs de santé que sont les Ddass, les PMI, les médecins du travail, sur cette maladie respiratoire oubliée, au diagnostic parfois difficile.

Pour s'adapter à la nouvelle donne épidémiologique, un nouvel outil de diagnostic a été développé : le PCR (Polymerase Chain Reaction), la fameuse technique moléculaire qui permet de mettre en évidence le génome ou l'ADN de la bactérie. «Très spécifique et sensible, cet outil est intéressant, surtout au-delà des quinze premiers jours, le délai à partir duquel la culture de la bactérie n'est plus fiable», précise le Dr Gibaud. L'examen, qui n'est pas encore remboursé, est utilisé depuis 2000, dans le laboratoire du CHU de Nantes, le seul centre du Grand Ouest agréé par le Centre national de référence (CNR).

On ignore l'étendue réelle de l'affection puisque aucune surveillance n'existe au sein de la population générale. Cependant, l'incidence de la coqueluche communautaire a été estimée à 885/100 000 par le Conseil supérieur d'hygiène publique de France en septembre 2006 et l'incidence moyenne nationale chez les moins de 3 mois est évaluée à 279/100 000 par Renacoq. Les recommandations de vaccination – les dernières ont été publiées en décembre 2006 – ont pour objet de tenter d'enrayer la propagation de la maladie. Outre les enfants (à partir de 2 mois) doivent être vaccinés les futurs parents, le père et la fratrie en cours de grossesse de la mère ; la vaccination de la mère est recommandée le plus tôt possible après l'accouchement. De même, elle est recommandée pour toute personne au contact de nourrissons trop jeunes pour avoir reçu trois doses du vaccin coquelucheux (moins de 6 mois).

> OLIVIER QUARANTE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8184