DE NOTRE CORRESPONDANT
ALORS qu'Angela Merkel doit être élue chancelière d'Allemagne aujourd'hui, le seul consensus existant entre la droite et la gauche, en matière de santé, porte sur la nécessité de réformer rapidement le financement de l'assurance-maladie afin d'en assurer la pérennité.
Si la « grande coalition » qui réunit sociaux-démocrates et chrétiens-démocrates prévoit dès à présent de restaurer les finances de l'assurance dépendance, mais aussi de donner un tour de vis aux dépenses de médicaments, notamment en forçant les producteurs de génériques à diminuer leurs prix de 5 %, les opinions divergent quant aux mesures à prendre pour protéger le système à long terme.
Certes, la réforme de 2004 a permis de restaurer l'équilibre de l'assurance-maladie. Mais elle risque de replonger dans le rouge en 2007 si aucune mesure supplémentaire n'est prise. La droite chrétienne-démocrate plaide, depuis deux ans, pour le remplacement des cotisations d'assurance-maladie par des primes d'assurance individuelles. Mais la gauche social-démocrate réclame une « assurance universelle » basée non plus seulement sur les cotisations, mais sur l'ensemble des revenus.
De l'huile sur le feu.
Dans l'immédiat, les deux partenaires de ce qui reste un mariage forcé vont devoir expédier les affaires courantes, et de nombreuses mesures concernant la gestion des hôpitaux, de même que le temps de travail des médecins, entreront en vigueur en janvier, comme prévu.
Alors que les spécialistes de politique de santé des deux partis s'observent avec méfiance, la ministre sortante de la Santé Ulla Schmidt, qui gardera son poste dans le cabinet d'Angela Merkel, vient de jeter de l'huile sur le feu en annonçant, le 15 novembre dans la presse, une réforme de la rémunération des médecins et de l'organisation des caisses. Elle souhaite réduire considérablement le nombre de caisses maladie existant dans le pays, plus de 260 actuellement, et surtout s'attaquer à la structure des honoraires médicaux.
Il existe en Allemagne deux catégories d'assurés, ceux qui dépendent des caisses publiques, équivalentes à nos caisses primaires, et ceux qui dépendent de caisses privées ou gérées par les entreprises.
Un peu à l'image de notre secteur II, les médecins qui soignent un patient affilié à une caisse privée ou d'entreprise peuvent demander jusqu'à 1,7 fois le prix de la consultation qu'ils demandent à un patient « public ».
A l'occasion d'une refonte de la nomenclature des actes, Ulla Schmidt a proposé d'unifier les honoraires des deux groupes, par un système de péréquation : on abaisse certains honoraires, on en relève d'autres. L'Ordre et les syndicats médicaux ont réagi aussitôt avec vigueur, en dénonçant un plan d'économies déguisé : cette unification se traduirait, selon leurs calculs, par une perte de 17 000 euros par an et par médecin, alors même que leurs revenus stagnent ou baissent. Selon l'Ordre, la ministre veut « niveler le système de santé par le bas », et cette mesure pourrait acculer à la faillite près d'un cabinet médical sur trois. Prononcées quelques jours avant « l'intronisation » d'Angela Merkel, les déclarations de Ulla Schmidt ne sont pas, bien sûr, le fruit du hasard. Elles confirment les craintes des médecins qui redoutent que le nouveau gouvernement, à défaut de réformer la santé, ne se lance dans une course éperdue aux économies et à la rigueur, dont les professionnels seront les premières victimes.
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